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Zhao Benshan 赵本山

Présentation

par Brigitte Duzan, 25 décembre 2012, actualisé 14 juillet 2015

 

Zhao Benshan est aussi célèbre en Chine qu’il est méconnu ailleurs. Ses apparitions régulières à la télévision chinoise lors des spectacles de fin d’année dans des numéros comiques extrêmement populaires en ont fait une vedette nationale.

 

Mais c’est justement son registre comique, fondé sur un art populaire à base de jeux de mots quasiment intraduisibles, qui le rend difficilement compréhensible pour un public non sinophone. Depuis la fin des années 1990, il s’est cependant évadé de cette image restrictive et a montré qu’il était aussi un excellent comédien, prisé des plus grands réalisateurs chinois actuels.

 

Orphelin du Liaoning devenu maître du  errenzhuan

 

Zhao Benshan (赵本山) est né le 2 octobre 1957 dans une 

 

Zhao Benshan en 2012

famille de paysans pauvres, dans un trou perdu du Liaoning, le hameau de Shizuigou, ou « rigole de la bouche de pierre » (石嘴沟), dans le district de Kaiyuan de la cité minière de Tieling (铁岭市开原县), au nord de la province.

 

Formation sur le tas et lent apprentissage

 

Naître au début du Grand Bond en avant n’était pas un cadeau du ciel. Le jeune Benshan se retrouve orphelin six ans plus tard. Il est alors recueilli par un oncle aveugle qui va lui enseigner la seule chose qu’il connaît : l’art traditionnel local du errenzhuan (二人转), c’est-à-dire une forme de quyi (曲艺), cet art de la narration chantée formé sur la base de littérature orale et de ballades chantées qui s’est développé de manière spontanée dans le peuple chinois depuis l’antiquité.

 

Le quyi se présente essentiellement sous la forme de monologues ou de dialogues humoristiques qui ont pour thème des faits de la vie quotidienne, mais qui puisent aussi leurs sources dans les histoires drôle populaires, les anecdotes historiques, voire simplement les jeux de mots. Le errenzhuan est une forme de dialogue comique propre à la région du Dongbei (1).

 

Lorsque Zhao Benshan a commencé à être formé à cet art, il était en pleine évolution. Il était en effet, à l’origine interprété exclusivement par des hommes, comme c’était le cas général en Chine des arts de la scène. Ce n’est qu’à partir de 1955 que des femmes ont fait leur apparition dans les dialogues du errenzhuan, et que le genre a commencé à évoluer vers la forme actuelle : un dialogue humoristique entre un homme et une femme, voire parfois deux couples.

 

A dix-sept ans, en 1974, Zhao Benshan entre dans l’équipe artistique de propagande d’une commune populaire (nous sommes en pleine Révolution culturelle) ; il passe ensuite dans une troupe de théâtre amateur avant d’être enfin admis dans une troupe de quyi en 1978, comme interprète de errenzhuan, dans le district de Xifeng (西丰) de Tieling.

 

Artiste reconnu

 

Il n’a cependant pas de statut fixe jusqu’en 1982. Mais cette année-là, il participe au premier « festival rural » de quyi du Liaoning en jouant le rôle d’un aveugle dans une pièce chantée, « Le sanxiang brisé » (《摔三弦》), mis en scène conjointement par les deux stars locales du quyi, Li Zhongtang (李忠堂) et Cui Kai (崔凯). Le numéro ayant obtenu le premier prix, Zhao Benshan accède au statut d’artiste professionnel.

 

Le sanxiang brisé

 

Jiang Kun

 

En 1986, il est admis dans la troupe d’art populaire de la ville de Tieling (铁岭市民间艺术团). Etant allé interpréter un numéro à Shenyang, la capitale du Liaoning, il remporte un succès triomphal devant une salle de plus de trois cents personnes. Son nom devient connu dans tout le Dongbei, comme deviennent célèbres les numéros qu’il interprète.

 

Il attire alors l’attention de Jiang Kun (姜昆), grand maître du xiangsheng et promoteur du

quyi (2) ; venu assister à l’un des ses spectacles, il constate son talent, et son immense succès auprès du public. En 1987, Jiang Kun propose donc Zhao Benshan au directeur du grand gala du Nouvel An de la télévision nationale chinoise (中央电视台春节联欢晚会). C’est le début d’une tradition qui va perdurer jusqu’en 2012.

 

De l’errenzhuan à la télévision et au cinéma

 

Les galas du Nouvel An

 

A partir de 1990, Zhao Benshan a participé tous les ans au spectacle du Nouvel An de CCTV, à la seule exception de l’année 1994. Ce sont des numéros désormais célèbres, dont certains forment des séries.

 

Parmi les plus connus figure le numéro de 1999, « Hier, aujourd’hui, demain » (《昨天、今天、明天》), premier d’une série de quatre intitulée « Baiyun Heitu », (《白云黑土》), soit Nuage blanc et Terre noire, nom de deux paysans frustes mais allègres qu’il interprète en duo avec sa comparse Song Dandan (宋丹丹).

 

Zhao Benshan et Song Dandan dans Baiyun Heitu

 

Toutes ces numéros ou « petites pièces » (小品) ont valu à Zhao Benshan le titre de « roi des petites pièces » (小品王”) ou « roi de la comédie » (喜剧之王”).

 

Les séries télévisées

 

Dans le rôle de Ma Dashuai

 

Zhao Benshan a évolué en cours de route vers le feuilleton télévisé, dans la même veine comique, mais avec une nuance de satire sociale de plus en plus affirmée. Deux personnages symboliques de deux de ces séries sont restés célèbres : Liu Laogen (刘老根) et Ma Dashuai (马大帅). Ils font partie de la culture populaire.

 

Ces deux séries ont été diffusées sur CCTV entre 2001 et 2005. « Liu Laogen » (《刘老根》) est un cas intéressant. La série, en 22 épisodes, a été produite par Zhao Benshan pour ‘l’heure d’or » des programmes télévisés, 20h-21h ; l’histoire est typique de ses scénarios, plus profonds qu’il ne semble au premier abord.

 

Au début de la série, Liu Laogen vit depuis plus d’un an en ville avec son fils, et il en a assez des corvées quotidiennes qui lui sont assignées : nettoyer, faire la cuisine, emmener sa petite fille à l’école et aller la chercher ; il décide de rentrer chez lui au village. Et il retrouve tout de suite ses manières et sa mentalité de paysan, inchangées malgré la modernisation du pays – c’est le thème majeur récurrent des œuvres de Zhao Benshan.

 

Il décide d’aider le village à s’enrichir, et pour ce faire élabore un projet de centre de vacances en développant les ressources touristiques locales. Le projet est la source de malentendus et de conflits, affectifs et moraux, qui le forcent à procéder à des ajustements répétés et il lui faut aussi tenir compte de sa propre vie familiale. Il est finalement grugé par les cadres corrompus du village qui lui extorquent trente millions de yuans, et, au total, s’en sort ruiné et brisé psychologiquement.

 

L’histoire illustre le prix payé par les villageois, en Chine, dans la phase de transition entre économie planifiée et économie de marché, avec les phénomènes parallèles de corruption et d’enrichissement illicite. La série eut un immense succès. Une enquête préalable auprès des téléspectateurs avait d’ailleurs montré que 54 % d’entre eux trouvaient qu’il n’y avait pas assez de films traitant de sujets ruraux, et c’est ce qui avait incité à produire la série.

 

Il est significatif que la série suivante, dans le même créneau horaire, ait été une histoire aseptisée, où tout se termine bien ; elle est entièrement en putonghua, à l’exclusion de toute expression dialectale, et s’intitule… « Field of Hope »… mais elle n’est pas de Zhao Benshan.

 

C’est à partir de 2005 qu’il a créé une autre série tout aussi populaire que « Liu Laogen », mais moins critique, dont le troisième volet a été diffusé en 2010 : « L’amour au village » (《乡村爱情》).

 

Sur le tournage de la série télévisée L’amour au village

 

La seconde partie est assez caractéristique du style de Zhao Benshan. « Xiangcun aiqing 2 » 《乡村爱情 2》 est une série de 36 épisodes qui dépeint la vie dans un village chinois du Nord (du Liaoning, bien sûr), typique de la vie rurale en Chine aujourd’hui, avec les nouvelles tensions créées localement par le développement et la modernisation.

 

L’histoire évolue autour de deux couples de personnages : l’un une femme chef d’entreprise, Wang Xiaomeng (王小蒙), dont la fabrique de tofu est en pleine expansion, et l’autre le jeune homme qu’elle doit épouser, Xie Yongqiang (谢永强), qui possède, lui, un verger qu’il peine à entretenir, faute d’eau. Wang Xiaomeng  représente donc la réussite en affaires, Xie Yongqiang les problèmes de la vie agricole ; on peut aisément imaginer les conflits personnels qu’engendre ce genre de situation. L’autre couple est celui du chef

 

Avec Fan Wei dans L’amour au village 2

de village, Ren Changgui (任长贵), et de sa petite amie. Ren Changgui est un personnage très actif qui, de manière caractéristique, recherche des investisseurs pour développer les activités du village.  

 

Autour de ces quatre personnages centraux évolue une pléiade de parents, amis et nouveaux venus dans le village dont l’arrivée vient perturber les relations établies. Car l’intrigue est essentiellement fondée sur l’aspect sentimental des motivations des personnages dont même les décisions purement économiques peuvent être affectées par le danger de déstabilisation de leurs relations affectives. Le fait que les deux personnages principaux ne soient pas encore mariés est l’un des moteurs principaux de l’intrigue. En ce sens, le titre pourrait se traduire aussi bien par « l’amour au village » que par « l’amour du village » (ou de « son » village).

 

La peinture sociale a donc d’abord un côté très réaliste : la lutte acharnée de Xie Yongqiang pour trouver une source pour irriguer son verger, les pressions de Wang Xiaomeng pour qu’il cesse cette activité qu’elle juge dépassée et vouée à l’échec, et vienne plutôt travailler avec elle dans son entreprise, les efforts déployés par Ren Changgui pour attirer au village le magnat du Liaoning dans lequel il place tous ses espoirs - tout cet aspect socio-économique est très bien rendu.

 

Mais le film ajoute un côté fleur bleue à ce fond réaliste. Du coup, on passe les premières séquences à tenter de se souvenir des ramifications tentaculaires des relations entre les personnages, un peu comme quand on lit les trente premières pages des « Cent années de la solitude ». Mais on est loin de García Marquez, plus près de « Veillées de chaumières », et c’est justement ce qui fait le succès de la série auprès du public télévisé chinois. Chacun y reconnaît au moins un voisin, un ami, un parent, s’identifie à l’action, et s’approprie le texte. En ce sens, c’est du grand art. Du grand art populaire : une sorte de Comédie humaine chinoise qui fleure le terroir et la sauce au soja.

 

On reste quand même songeur devant l’aspect lisse et aseptisé de la série : pas l’ombre d’un problème de corruption, pas de paysan exproprié ou de bébé victime de lait contaminé. Les problèmes sont soigneusement passés au crible, et sont valorisées les actions positives qui vont dans le sens du développement et de l’harmonie sociale, le courage et la ténacité étant récompensés in fine, tel Xie Yongqiang finissant par trouver une source… d’eau chaude. On est dans le domaine de la comédie populaire intemporelle, non du documentaire engagé actuel.

 

Formation de disciples et héritiers

 

Xiao Shenyang dans A Simple Noodle Story

 

Cet art passe avant tout par la finesse de l’interprétation. Comme tout grand maître, Zhao Benshan a créé son école qui forme des disciples pour perpétuer son art : la classe de maître Zhao (赵家班).

 

Il en a maintenant toute une équipe, dont le premier fut Wang Xiaoli (王小利) et dont le plus médiatisé est sans doute Xiao Shenyang (小沈阳) qu’il a lancé en lui faisant interpréter l’un des rôles principaux d’abord en 2009 dans le film de Zhang Yimou « A Simple Noodle Story » (三枪拍

案惊奇), puis, en 2010,  dans le film du réalisateur taiwanais (Kevin) Chu Yen-Ping (朱延平) « Just Call

Me Nobody » (《大笑江湖》), pastiche un peu lourd du film de wuxia, mais où Xiao Shenyang est mis en valeur aux côtés de Kelly Lin.  

 

Il joue maintenant à leur côté au cinéma.

 

Excellent acteur de cinéma

 

De la télévision, Zhao Benshan est en effet passé au cinéma, avec des premiers rôles comiques, culminant en 1997 avec le rôle d’un colporteur loufoque dans le film atypique de Zhang Yimou « Keep Cool » (《有话好好说》). Mais il a ensuite évolué vers des rôles de composition dépassant la pure comédie, comme dans « Happy Times », à nouveau de Zhang Yimou, ou Getting Home 《落叶归根》 de Zhang Yang.

 

En 2009, cependant, il a été frappé par un sérieux accident de santé : une rupture d’anévrisme qui, après une opération, l’a laissé fragilisé et fatigué.

 

 

Zhao Benshan avec Xiao Shenyang

et Kelly Lin dans Daxiao Jianghu

 

Répétant son numéro “Blind Date II” en janvier 2012

 

Il continue cependant à jouer, mais son retrait inopiné du gala du Nouvel An de CCTV en 2012, pour la première fois depuis 1994, n’a pas manqué d’inquiéter. Son numéro devait s’intituler « Blind Date II » (《相亲II) et constituer une séquelle de son premier numéro du gala, en 1990.

 

 

Il est fort possible cependant que ce soit simplement le résultat d’un désaccord avec la nouvelle directrice de l’émission, Ha Wen (哈文). Celle-ci est arrivée à son poste en annonçant un renouvellement drastique du concept de la soirée, pour la moderniser et lui enlever sa raideur institutionnelle et son côté traditionnel. Il est possible que Zhao Benshan ait fait les frais de l’époussetage… Mais le gala sans lui n’a plus la même saveur.

 

Avec Ha Wen

 

Aussi calligraphe

   

 

 

Notes

(1) Sur l’histoire du errenzhuan et la structuration d’un spectacle, voir

http://philippe-mahou.chez-alice.fr/errenzhuan/errenzhuan.html

(2) Jiang Kun a été invité à plusieurs reprises au festival de quyi du Centre culturel de Chine à Paris, et y a fait une conférence sur l’histoire et « le charme » du quyi en 2011.

 

Principaux rôles au cinéma :

 

1997 Keep Cool 《有话好好说》 de Zhang Yimou - rôle du troisième marchand de bric à brac

1999 The Emperor and the Assassin《荆轲刺秦王》 de Chen Kaige – rôle de Gao Jianli (高渐离)

2000 Happy Times 《幸福时光》 de Zhang Yimou – rôle de Zhao

2006 Getting Home《落叶归根》 de Zhang Yang – rôle de Zhao

2009 A Simple Noodle Story 三枪拍案惊奇 de Zhang Yimou – rôle du capitaine

2010 Just Call Me Nobody 《大笑江湖》 de (Kevin) Chu Yen-Ping (朱延平)

2011 The Founding of a Party《建党伟业》- rôle du seigneur de guerre Duan Qirui (段祺瑞)

2012 The Grandmasters 《一代宗师》 de Wong Kar-wai

 

Son site, avec le détail de ses numéros d’errenzyuan et de ses séries télévisées :

http://www.zhaobenshan.org/   

 

 

 

 

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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