Accueil Actualités Réalisation
Scénario
Films Acteurs Photo, Montage
Musique
Repères historiques Ressources documentaires
 
     
     
 

Metteurs en scène

 
 
 
     
 

Chang Tso-Chi 张作骥

Présentation

par Brigitte Duzan, 16 août 2013

 

En août 2013, le réalisateur taïwanais Chang Tso-Chi (张作骥) était l’un des cinéastes “asiatiques” à concourir en compétition officielle au festival del film Locarno avec son huitième long métrage : « A Time in Quchi » (《暑假作业》). C’est l’occasion de revenir sur la carrière d’un réalisateur qui mériterait d’être mieux connu.

 

Débuts sous les auspices de Hou Hsiao-hsien

 

Né en 1961 dans le district de Jiayi, à Taiwan (台湾嘉义), Chang Tso-Chi n’était pas destiné à faire

 

Chang Tso-chi

du cinéma : il a d’abord fait des études scientifiques, et obtenu un diplôme en ingéniérie électrique.

 

Cinéaste par accroc

 

La fureur de vaincre

 

Si Chang Tso-Chi s’est ensuite orienté vers des études cinématographiques, c’est un peu par hasard. Il a décrit dans des interviews ses premiers émois de spectateur, dans l’ambiance taïwanaise, hyper nationaliste, de son adolescence : l’un des premiers films dont il se souvient est « La fureur de vaincre » (精武门), film d’arts martiaux hongkongais de 1972, l’un des plus importants de Bruce Lee ; il était applaudi à tout rompre chaque fois qu’il passait une raclée à ses adversaires tandis que l’apparition de Japonais entraînait des volées de projectiles sur l’écran. Rien ne distinguait Chang Tso-Chi des autres spectateurs.

 

Pendant qu’il faisait son service militaire, un de ses amis lui demanda ce qu’il allait faire ensuite : réparer des appareils de télévision  ou des postes de radio était une option peu réjouissante.  C’est alors qu’il envisagea de faire une carrière de photographe. Restait à trouver une école. Finalement, ce

fut l’Université de la Culture chinoise, département de théâtre  et cinéma, dont il sortit diplômé en 1987.

 

C’était le début de la Nouvelle Vague du cinéma taïwanais. Chang Tso-Chi allait passer plusieurs années à apprendre le métier avec les plus grands réalisateurs taïwanais - et hongkongais - du moment.

 

Assistant pendant plusieurs années

 

Après divers petits boulots sur des plateaux de tournage, Chang Tso-Chi fut remarqué par Yu Kan-ping (虞勘平) qui le prit sous son aile. Il fut l’assistant des réalisateurs hongkongais Yim Ho (严浩) et Tsui Hark (徐克), mais surtout de Hou Hsiao-Hsien (侯孝贤), lors de la préparation et du tournage de « La cité des douleurs » (《悲情城市》), en 1988.

 

Il travailla en particulier sur l’adaptation du scénario,  avec le grand écrivain et scénariste Wu Nien-Chen (吳念真). C’est cette expérience d’écriture scénaristique qu’il mit ensuite en pratique pour écrire le scénario de son premier film, qui obtint en 1991 le Prix du meilleur scénario décerné par le Bureau d’information du gouvernement de Taiwan.

 

Un premier film renié

        

A la toute fin des années 1980, l’industrie publicitaire  taïwainaise connut un vrai boom, et attira nombre de réalisateurs par la promesse de gains rapides. Chang Tso-Chi profita de la manne, mais s’en lassa et abandonna pour revenir vers le cinéma.

 

C’est à ce moment-là qu’il obtint le prix du scénario déjà mentionné, auquel était attachée une aide gouvernementale de 145000 US$. Mais, avant même qu’il ait pu commencer le tournage de ce qui allait devenir  « Shooting in the Dark » (暗夜枪声), l’investisseur principal se retira, et Chang Tso-Chi dut geler son projet. Il ne put le remettre à flot que grâce à une société de Hong-Kong, qui le laissa le réaliser, mais lui retira le montage final. Le film porte quand même son nom, mais Chang Tso-Chi ne le reconnaît pas pour sien, et le film n’est jamais sorti à Taiwan.

 

Malgré ce revers, en 1994, Chang Tso-Chi reçut une autre aide gouvernementale  de 145 000 US$ ; c’est ce qui lui permit de lancer le projet du film qui le rendit célèbre, et reste un film étonnant encore aujourd’hui : « Ah Chung » (忠仔).

 

1996 : Ah Chung

 

« Ah Chung » est considéré aujourd’hui comme une réussite, mais ce ne fut pas le cas à sa sortie, et, s’il permit à son auteur de se familiariser d’un coup avec les arcanes de la réalisation et de la production d’un film, sa gestation fut difficile et il fallut ensuite un certain temps à Chang Tso-Chi pour s’en remettre.

 

Malgré l’aide gouvernementale, le projet fut sur le point d’être abandonné, comme le précédent, faute de financement suffisant pour pouvoir démarrer le tournage, jusqu’à ce le producteur Lin Tien-Jung (林添榮) apporte un montant à peu près égal en matériel, caméras et autres.

 

L’histoire est très originale et plonge aux tréfonds de la culture populaire taïwanaise en faisant d’une ancienne

 

Ah Chung

coutume locale, venue du Fujian à Tainan sous la dynastie des Qing, l’un des éléments clefs du scénario : le rituel shamaniste dit « des huit généraux » (八家將), visant à éradiquer la peste, les maladies, et le mal sous toutes ses formes. Petit à petit, des troupes se sont constituées dans toute l’île pour pratiquer le rituel, mais le processus a été récupéré par la mafia qui s’en est servie pour y placer des jeunes délinquants sous sa protection.

 

Ah Chung, le site du film

 

C’est le cas du jeune Ah Chung qui est au centre du film violent, et terriblement réaliste,  de Chang Tso-Chi : le père est chauffeur de taxi, la mère gagne de l’argent en jouant et chantant dans une petite troupe qui anime mariages et enterrements, et n’a d’autre possibilité, pour caser son fils, que de l’envoyer se former pour devenir  membre d’une troupe de « huit généraux ».

 

Quand le grand-père meurt, la vie d’Ah Chung tourne au drame : son petit frère,

retardé mental, est blessé dans un accident de la route, et son père viole sa demi-sœur. Les représentations des « huit généraux », pour leur part, qui forment la toile de fond du film, sont d’une violence extrême, allant de transes à l’automutilation.  Mais le message est net : quel que soit son niveau de déchéance ou de malheur, tout individu peut obtenir sa rédemption.

 

Le film est fort et bien filmé, interprété par des acteurs non professionnels qui lui donnent un ton très réaliste.Chang Tso-Chi a appliqué là ce qu’il avait appris avec Hou Hsiao-Hsien. A sa sortie en 1996, « Ah Chung » a séduit critiques et spectateurs dans nombre de festivals, dont le festival Asie-Pacifique qui lui a octroyé le prix du jury, le Golden Horse qui lui a décerné le prix de la meilleure actrice dans un rôle secondaire, ou encore celui de Thessaloniki qui lui a accordé un prix de 7 000 $. A Taiwan, cependant, la concurrence de films

 

Chang Tso-chi Chang Tso-chi recevant

le prix du Golden Horse en 2011

grand public sortis au même moment (1) l’a réduit à disparaître des écrans au bout de dix jours.

 

Echec financier. Partiellement compensé par le succès au festival du Golden Horse.

 

1998-2010 : maturité croissante

 

The Best of Times

 

Il faudra deux ans à Chang Tso-Chi  pour repartir du bon pied : en 1998 il crée son propre studio qui produit son troisième film, « Darkness and Light » (黑暗之光), présenté à la Quinzaine des Réalisateurs du festival de Cannes, en 1999. C’est l’histoire, également très réaliste, d’une jeune fille qui vit avec des aveugles masseurs qu’elle aide dans leurs déplacements ; elle tombe amoureuse d’un jeune garçon membre d’un gang qui est tué dans une rixe, tandis que son père est emporté par une maladie…

 

En 2001, « The Best of Times » (美丽时光)en est comme le pendant, avec l’histoire de deux amis sur fond de lutte de gangs. Le film  fait partie de la sélection de la Biennale de Venise et obtient les prix du meilleur film et du meilleur acteur au festival de Singapour.

 

Chang Tso-Chi doit attendre 2008 pour sortir son film suivant : « Soul of a Demon »(蝴蝶), où sont mêlés des thèmes plus profonds que dans les films précédents, y compris le passé colonial de l’île et l’occupation japonaise, entraînant ressentiment et désir de vengeance, et donnant au film un ton de violence larvée qui finit par éclater.

 

Les deux personnages principaux sont ici deux frères, dont l’un sort de prison et retrouve son cadet, qui a rejoint le gang local. Leur père est japonais, et réapparaît après vingt ans d’absence, faisant resurgir le passé. La petite ville semble un piège où les gens sont pris entre des univers conflictuels, divisés par des fossés tant générationnels que sociaux et nationaux. Le calme de l’image contredit en permanence la tension latente qui finit par exploser : c’est remarquablement bien filmé.

 

Soul of a Demon

 

How are you Dad ?

 

Très original, le film suivant, “How are you, Dad ?”(...你好吗?),est en fait unesérie de dix courteshistoires depèresdansleurs relations avec leursenfants. Chang Tso-Chi l’a réalisé en hommage à son père récemment décédé, et en réponse à son souhait de voir son fils faire un film qu’il puisse comprendre.

 

Sorti le 31 juillet 2009, le film met en scène des gangsters aussi bien que de pauvres villageois qui ne peuvent payer les dépenses médicales de leurs enfants, ou des célébrités aux carrières brillantes mais aux familles brisées ; tous ces personnages ont en commun le statut de père, chacun déclinant l’amour paternel à sa manière.

 

 

When Love Comes

 

Sorti en septembre 2010, « When Love Comes » (当爱来的时候)reprend un thème courant : l’incompréhension, sinon les conflits, entre générations, mais plus spécifiquement, dans le contexte taïwanais, l’évolution des structures familiales d’une génération à une autre et la place de l’individu en leur sein.

 

Le film a pour personnage principal une adolescente dont le père prend une seconde épouse pour préserver la lignée, avec l’accord de la première épouse. Mais elle-même se retrouve bientôt enceinte, sans que son ami veuille assumer la charge de la paternité. C’est lorsque son père est hospitalisé qu’elle commence à comprendre sa logique, et ses deux mères, et à passer en même temps à l’âge adulte.

 

 

Trailer http://www.youtube.com/watch?v=3JJH_FnQJD0

 

10+10

 

Réaliste dans sa peinture des besoins affectifs de l’adolescente et subtil dans son analyse des relations entre ses personnages, le film sait aussi distiller l’émotion. Avec ses images au rythme calme et ses couleurs superbes, « When Love Comes » dénotait chez son auteur une maturité stylistique autant qu’intellectuelle qui laissait dans l’attente de la suite.

 

 

Cette suite attendue, c’est  « A Time in Quchi » (《暑假作业》), qui concourait pour le Léopard d’or au festival de Locarno en août 2013.

 

Le film raconte l’histoire d’un enfant envoyé chez son grand-père parce que ses parents sont en instance de divorce ; dans l’école élémentaire locale, il se lie d’amitié avec une petite fille d’une famille pauvre qui vit de la collecte de détritus recyclables, et avec un élève issu d’une famille aborigène qui en est secrètement amoureux. Ces deux amis permettent à l’enfant de surmonter sa tristesse… tout en élargissant son univers.

 

Chang Tso-Chi élargit aussi sa thématique, en l’ouvrant sur les relations entre les diverses populations de l’île.

 

A Time in Quchi

 

 

Note

(1) Il est sorti fin janvier 1996, en même temps qu’un film de Jackie Chan et « Les 101 Dalmatiens » de Walt Disney.

 


 

Filmographie

(réalisation et scénario)

 

2013 A Time in Quchi《暑假作业》

2011 10+10 (segment Sparkles)

2010 When Love Comes当爱来的时候

2009 How are you, Dad ?  ...你好吗?

2008 Soul of a Demon蝴蝶

2001 The Best of Times  美丽时光

1999 Darkness and Light  黑暗之光

1996 Ah Chung  忠仔

1994 Shooting in the Dark 暗夜枪声

 

 

 

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



Qui sommes-nous ? - Objectifs et mode d’emploi - Contactez-nous - Liens

 

© ChineseMovies.com.fr. Tous droits réservés.

Conception et réalisation : ZHANG Xiaoqiu