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Lan Hongchun 蓝鸿春

Présentation

par Brigitte Duzan, 6 juin 2022

 

Réalisateur et scénariste dont le premier film est sorti en 2018,  Lan Hongchun a pour caractéristique de faire des films en dialecte de Chaoshan (潮汕), sa région natale. C’est assez rare pour mériter d’être souligné car cela montre bien la vitalité persistante des dialectes locaux et de la culture qui leur est associée, surtout dans le sud, malgré la pression uniformisante du putonghua.

 

 

Lan Hongchun

 

 

Chaoshan est la zone située à l’extrême est du Guangdong, le nom étant l’abréviation des deux principales villes, Chaozhou (潮州) et Shantou (汕头). On y parle un dialecte minnan, le chaozhouhua () ou teochew, qui résulte de l’évolution, sous l’influence du cantonais et du hakka, du minnan que parlaient des populations venues s’installer là entre le 9e et le 14e siècles, sans doute à cause d’une surpopulation du Fujian. Comme Chaoshan a été un important foyer d’émigration vers l’Asie du sud-est entre le 17e et le 20e siècle, le teochew y est très répandu.

 

C’est là qu’est né Lan Hongchun, en 1985. Dans l’une de ses interviews données à la sortie de son deuxième film [1], il a expliqué qu’il avait commencé à s’intéresser au cinéma en 2007, alors qu’il était encore étudiant, après avoir vu le film de 1986 de Hou Hsiao-hsien (侯孝贤) « Poussières dans le vent » (《恋恋风尘》). Jusque-là le cinéma se limitait pour lui à celui de Hong Kong, mais il a retrouvé dans les films taïwanais une atmosphère proche de celle de la vie à Chaoshan.

 

Avant de se lancer dans son premier film, il a réalisé des documentaires pendant six ans pour Phoenix TV, ce qui l’a convaincu du caractère unique de la culture et des traditions de Chaoshan encore aujourd’hui.

 

2018 : Proud of Me 

 

« Proud of Me » (《爸,我一定行的》) - en chinois « ‘Pa, j’m’en sortirai » - a été réalisé avec un budget minimal de 7 millions de yuans financé par un groupe de copains. C’est un film à peine sorti de sa gangue, dans un style encore hybride influencé par le cinéma de Hong Kong mais aussi le meilleur de Taiwan, Edward Yang (杨德昌) outre Hou Hsiao-hsien. On retrouve dans « Proud of Me » une ligne narrative proche de leurs films autour du thème des relations père-fils ; mais c’est avec la chaleur particulière de la vie de Chaoshan et une authenticité inédite dans l’utilisation du dialecte local, en rupture avec un cinéma chinois homogénéisé par l’imposition du putonghua, même dans les films dits « de minorités » tournés dans les studios officiels.

 

   

Proud of Me

 

L’histoire se passe à Shantou. Le jeune « 369 » vit dans une petite bourgade avec son père veuf ; terminant péniblement le secondaire, il n’a pas une folle passion pour les études et passe plus de temps au café internet qu’en classe. Il semble attiré par l’une des élèves de sa classe, mais c’est surtout pour trouver des motifs de rater les cours. Finalement son père cède à sa volonté de ne pas continuer d’études universitaires, et lui trouve un job dans une usine de sous-vêtements. Il est renvoyé d’un job après l’autre, et finalement, au bout de huit ans, décide de partir tenter de faire son trou à Shenzhen, avec un capital de mille yuans qu’il a volés à son père. Un concours de chansons télévisé au cours duquel il participe impromptu en chantant « Je suis de Chaoshan » (我是潮汕人) fait de lui une célébrité sur les réseaux sociaux, mais quand il rentre chez lui, son père le rabroue tout autant…

 

 

Photo de tournage : l’échoppe du père

 

 

Sorti pendant l’été 2018, le film a des séquences très réussies, en particulier celle du show télévisé, mais le succès qu’il a eu est quand même étonnant pour une petite comédie familiale sur le sujet rebattu d’un jeune rebelle à l’autorité paternelle qui tient plus de la curiosité de niche que du blockbuster ; mais, tourné à Shantou, dans le dialecte local, et très bien interprété en particulier par les acteurs Zheng Runqi (郑润奇) et Zheng Pengsheng (郑鹏生) dans les deux rôles principaux, « Proud of Me » a emporté l’adhésion de la population locale, mais aussi de la diaspora.

 

Proud of Me, bande annonce (sous-titres putonghua) https://movie.douban.com/trailer/235220/#content

 

Au total, avec des recettes de près de 50 millions de yuans, il aura rapporté sept fois la mise initiale, incitant le petite groupe d’amis à renouveler leur soutien au réalisateur et à investir dans son deuxième film.

 

2022 : Back to Love

 

Sur un scénario co-écrit avec l’acteur Zheng Runqi, « Back to Love » (《带你去见我妈》) [en chinois « Je vais t’emmener voir ma mère »] est une autre comédie familiale, mais ici sur les relations tendues entre une mère et son fils qui veut épouser une jeune femme « d’ailleurs » qui ne parle pas le dialecte local, et qui, en plus, est divorcée. Le dialecte devient ainsi le moteur de l’intrigue dont le thème principal est le pendant de celui du film précédent : le conflit entre modernité et tradition dans les relations entre parents et enfants.

 

 

Back to Love Back

 

 

Zheng Zekai (郑泽凯) est le fils aîné d’une vendeuse de viande de canard de Shantou. Il est parti vivre à Shenzhen où il travaille dans un entrepôt d’un oncle maternel. Il s’est épris là d’une femme de Hangzhou, Lu Jingshan (卢静姗), qu’il veut épouser, et qui est bien reçue dans la famille, sauf par la mère de Zheng Zekai qui ne parle que le dialecte de Shantou. La barrière linguistique semble insurmontable, sans parler de celle de la tradition qui voit les veuves d’un mauvais œil. Mais la fiancée a autant de caractère que la mère.

 

 

Back to Love Back, tout la famille autour de la grand-mère

 

 

« Back to Love » a un peu souffert du manque de moyens. La fin a été tournée sur smartphone faute de fonds pour terminer ; on peut y voir une originalité, mais cela donne quand même une impression de bâclage in extremis. L’une des forces du film est, comme le précédent, d’être interprété par des acteurs locaux amateurs. L’interprète du père, dans  « Proud of Me », était un petit vendeur de feuilles de chanvre. Celle qui interprète le rôle de la mère dans « Back to Love » est une mère de famille à moitié illettrée. Tous deux ont été amenés par leurs enfants et n’avaient aucunement songé à devenir des acteurs ; ils livrent leur propre personnalité, de même que la grand-mère dans « Back to Love » dont chaque ligne de dialogue a été adoptée en fonction de ses propres idées et convictions.

 

 

La mère devant l’autel familial

 

 

Bien que n’ayant rapporté que la moitié du film précédent, « Back to Love » témoigne d’une maturation artistique du réalisateur. Parti de son expérience d’enfant et d’adolescent en butte à l’esprit jugé étroit de ses parents, il livre dans son film une réflexion sur l’importance des traditions locales et familiales, et, en dépit des préjugés tenaces, la valeur d’une vie simple au sein d’une communauté partageant la même inépuisable énergie vitale.  Le fait qu’il s’agisse d’une communauté isolée et restreinte la rend d’autant plus précieuse, et en particulier pour les jeunes comme Lan Hongchun qui ont pu en apprécier la force de l’extérieur.

 

 

La barrière de la langue autour de la table familiale

 

 

Back to Love, bande annonce (sous-titres putonghua)  https://movie.douban.com/trailer/285009/#content

 

Ses films reflètent un véritable retour aux sources, exprimé dans un dialecte revivifié, qui s’exprime aussi dans les arts locaux, en musique en particulier, comme celle qui accompagne les deux films.    

 

Et ensuite ?

 

La vitalité locale, et dialectale, se traduit dans la richesse des histoires qui forment une inépuisable source pour des scénarios. Le prochain film, en cours d’écriture, de Lan Hongchun devrait être une autre histoire familiale, mais du point de vue des relations entre frères et sœurs. Il a fait part d’hésitations à tourner encore la totalité de son film en dialecte. Il serait bien dommage qu’il abandonne ce qui fait l’un des atouts de ses films, même si cela limite leur diffusion et rend difficile leur financement.

 


 

Filmographie

 

2018 Proud of Me 《爸,我一定行的》

2022 Back to Love 《带你去见我妈》

 


 

[1] Voir l’interview du 7 mai 2022 (en chinois) :

http://m.cyol.com/gb/articles/2022-05/07/content_8ePQJHW3E.html

 

 

 

     

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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