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« My 1919 » : en commémoration de la Conférence de paix de Paris et du traité de Versailles

par Brigitte Duzan, 02 mai 2014

 

« My 1919 » (《我的1919) est un film réalisé par Huan Jianzhong (黄健中) en 1999, pour le 80ème anniversaire de la Conférence de paix de Paris. Coproduit par le studio de Pékin, le studio de Xi’an et la compagnie Huayi Brothers (华谊兄弟), c’est un film conçu pour rappeler l’injustice infligée à la nation chinoise par le traité de Versailles, et commémorer la valeur des délégués chinois à la Conférence de paix de Paris qui refusèrent de le signer. Il prend au passage quelques libertés avec l’histoire qui affaiblissent le film plus qu’elles ne servent.

 

Les circonstances historiques

 

On sait les conséquences désastreuses des différents traités qui ont résulté de la Conférence de paix de Paris, et en particulier du traité de Versailles, signé en juin 1919. Pour les Chinois, ce fut un véritable traumatisme : il prévoyait dansson article 156 la rétrocession au Japon des concessions allemandes du Shandong. Or, la Chine était entrée en guerre

 

My 1919

en 1917 aux côtés de la Triple Entente à la condition de pouvoir récupérer les territoires chinois du Shandong passés sous contrôle allemand à la fin du dix-neuvième siècle, mais occupés par le Japon pendant la guerre. La délégation chinoise refusa donc de signer le traité.

 

Cette humiliation nationale catalysa le mouvement de mécontentement qui couvait en Chine et provoqua le mouvement dit « du 4 mai » (五四运动), mouvement de réforme dans tous les domaines qui allait affecter durablement la vie du pays, et en particulier la vie intellectuelle (1).

 

Le film

 

Le film de Huan Jianzhong relate les efforts déployés à la Conférence de paix par le délégué chinois Wellington Koo (顾维钧) pour défendre l’honneur de la Chine et faire reconnaître la légitimité de ses revendications sur les territoires du Shandong. C’est une superbe reconstitution historique des décors et les costumes, tout le contexte historique est mimétiquement rendu, jusque dans la ressemblance des principaux acteurs avec les personnages historiques qu’ils interprètent.

 

Cependant, le sujet était aride et quelque peu délicat ; les scénaristes - Huang Dan (黄丹) et Tang Louyi (唐娄彝) - se sont donc évertués à embellir les personnages et créer un soupçon d’intrigue romantique pour soutenir l’intérêt du public moyen.

 

Pourquoi Wellington Koo ?

 

Wellington Koo, vers 1919

 

Wellington Koo n’était pourtant pas le chef de la délégation chinoise, celle-ci était conduite par le ministre des affaires étrangères Lou Tseng-Tsiang (陆征祥). En effet, après avoir rejoint le parti de Sun Yat-sen, celui-ci fut  ministre des Affaires étrangères de janvier 1915 à décembre 1920 ; en sa qualité de chef de la délégation chinoise, c’est donc lui qui refusa de signer le traité.

 

Cependant, Lou Tseng-Tsiang aurait posé un problème si les scénaristes en avaient fait le personnage principal du film : il s’était converti au catholicisme après son mariage en 1899, et il deviendra moine bénédictin après le décès de son épouse en 1927. Non seulement il a été un diplomate chinois catholique, mais il a en outre laissé des mémoires où il développe sa vision du christianisme comme aboutissement du confucianisme.

 

Wellington Koo était plus acceptable, mais à condition de gommer certains aspects de son existence qui ne cadraient pas avec l’image de héros noble et pur que le film avait pour mission de transmettre.

 

Un héros habité par sa mission

 

Chen Daoming en Wellington Koo dans le film

 

Wellington Koo n’était pas un saint homme. Il a été marié quatre fois. Divorcé de sa première épouse en 1912, il s’est aussitôt remarié avec la fille cadette du premier Premier Ministre de la République de Chine, Tang Shaoyi (唐绍仪). Mais elle est morte durant l’épidémie de grippe de 1918, en laissant deux enfants. Au moment des négociations de paix à Paris, Wellington Kooétait donc veuf et faisait une cour assidue à la fille du magnat chinois de la canne à sucre en Indonésie Oei Tiong Ham (黄仲涵), qu’il l’épousera en 1921 à Bruxelles.

 

Le film a évacué cet aspect de la vie de Wellington Koo. A la place, les scénaristes ont créé le personnage de la petite soubrette Jeanne, timidement amoureuse du grand homme totalement absorbé, lui, par sa mission… Un pur héros révolutionnaire.

 

Il restait quand même encore un problème : il était nationaliste, Wellington Koo. Entre octobre 1926 et juin 1927, alors qu’il était ministre des Affaires étrangères, il a même été Président par intérim de la République de Chine. Ensuite, il plaidera en faveur de la continuation du soutien des Etats-Unis à la République de Chine quand le Guomingdang sera forcé d’y faire retraite.

  

Les scénaristes lui ont donc inventé un ami qui, lui, a abandonné la carrière diplomatique pour se vouer à la cause de la révolution communiste. Une rédemption pour Koo, en quelque sorte.

 

Autres petites entorses historiques

 

- Les dialogues alternent entre les diverses langues utilisées à la Conférence. Koo, pour sa part, a toujours fait ses discours en parfait anglais, il avait fait ses études à l’université Columbia, et maîtrisait parfaitement l’anglais. Dans le film, pourtant, sans doute pour que le public chinois s’y retrouve, il s’énonce en chinois, avec un interprète à ses côtés.

 

- Par ailleurs, le scénario comporte une petite séquence apocryphe qui a sa signification : le délégué japonais Makino se plaignant d’avoir égaré sa montre, Koo la sort de sa poche, ce qui lui vaut d’être accusé de voleur, jusqu’à ce que Koo lui rappelle qu’il la lui avait offerte – petit rappel allégorique de l’appropriation des territoires du Shandong par les Japonais.

 

L’un dans l’autre, « My 1919 » est un film qui témoigne du talent de réalisateur de Huang Jianzhong, même si les partis pris du

 

La séquence de la montre

scénario, reflets de l’idéologie de l’heure, limitent son intérêt.

 

Il faut néanmoins le voir non comme un document historique, mais comme un témoignage en soi sur les séquelles durables laissées dans l’esprit des Chinois par le traité de Versailles, aggravées par le sentiment antijaponais né de la dernière guerre, l’histoire du Shandong pouvant être en quelque sorte considérée comme un préambule à l’invasion de la Chine dans les années 1930.

 

Chen Daoming (陈道明) dans le rôle de Wellington Koo trouve là l’un des grands rôles de composition de sa carrière.

 

 

Note

(1) Sur le mouvement du 4 mai, voir

www.chinese-shortstories.com/Reperes_historiques_La_litterature_chinoise_au_vingtieme_siecle_2.htm

 

Le film

 

 

 

 

 

 
 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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