Accueil Actualités Réalisation
Scénario
Films Acteurs Photo, Montage
Musique
Repères historiques Ressources documentaires
 
     
     
 

Films

 
 
 
     
 

« Falling Flowers » : une bio édulcorée de la romancière Xiao Hong

par Brigitte Duzan, 13 juin 2013

 

Avec « Falling Flowers » (《萧红》), Huo Jianqi (霍建起) poursuit son exploration des biographies de personnalités politiques et littéraires commencée en  2011 avec « The Seal of Love » (《秋之白华》), évocation romancée de la vie de Qu Qiubai (瞿秋白), l’un des premiers dirigeants du Parti communiste chinois et ami de Lu Xun.

 

Comme l’indique le titre chinois, « Falling Flowers » est consacré à la vie de Xiao Hong (萧红) (1). Il a été présenté au festival de Shanghai en juin 2012, pour le centième anniversaire de la naissance de la romancière, puis est sorti sur les écrans chinois en mars 2013, mais sans rencontrer un grand succès – il a été retiré d’un grand nombre de cinémas au bout d’une quinzaine de jours.

 

Coproduit, en autres, par China Films et Han Sanping (韩三平), « Falling Flowers »  est depuis lors l’objet d’une promotion active : il était programmé dans le cadre de la 

 

Falling Flowers

3ème édition du festival du cinéma chinois en France, en mai 2013, puis a été rajouté à la sélection des films en compétition au 16ème festival de Shanghai, en juin.

 

Une bio romancée

 

Présentation du film pour le centenaire de naissance de Xiao Hong

 

L’une des principales faiblesses du film vient de son scénario : une suite de déboires sentimentaux et de malheurs divers construite en flash back qui se traîne sur deux heures.

 

 

Une vie de femme dans les années 1930

 

Le film commence dans une chambre d’hôtel à Hong Kong, en 1941, alors que les Japonais bombardent la ville. Une femme alitée, gravement malade, reçoit la visite d’un admirateur de ses livres. C’est Xiao Hong, en train de mourir de tuberculose. Elle raconte alors à son visiteur les tristes souvenirs de ce que fut sa vie.

 

Elle se souvient de son enfance dans le district de Hulan (呼兰), dans le Heilongjiang. Encore toute jeune, en 1930, son père veut la donner en mariage au fils d’une riche famille locale, Wang Dianjia (汪殿甲), alors elle s’enfuit à Pékin, qui était encore Beiping, et entre à l’école normale supérieure de filles. Dianjia l’y rejoint et elle accepte de vivre avec lui à condition qu’il la laisse poursuivre ses études. Mais, quand ils n’ont plus d’argent, ils reviennent vivre à Harbin, tandis que les Japonais occupent le Dongbei.

 

En 1932, cependant, Xiao Hong s’aperçoit qu’elle est

 

Huo Jianqi avec l’actrice Song Jia

enceinte, et Dianjia l’abandonne. A court d’argent, elle est à deux doigts d’être vendue dans une maison

 

Affiche avec les deux acteurs Song Jia et Huang Jun
(en haut de l’affiche, en rouge : 每一个男人都会爱上她

tous les hommes pouvaient tomber amoureux d’elle)

 

de passe pour solder ses dettes. C’est alors que la rivière Songhua inonde la ville. Xiao Hong est sauvée par un journaliste, Xiao Jun (萧军), rédacteur d’un journal auquel elle a demandé de l’aide. Il tombe amoureux d’elle.

 

 

Mais il perd bientôt son emploi et ils se retrouvent sans argent. Xiao Jun sauve la situation en donnant des cours d’arts martiaux au fils d’une famille aisée, mais tombe amoureux de sa sœur. Finalement tout s’arrange, mais ils fuient l’avancée des troupes japonaises et les menaces d’arrestation en partant vers le sud, et d’abord à Qingdao.

 

En 1934, ils sont à Shanghai où Xiao Hong rencontre Lu Xun qui leur vient en aide.

 

A Hong Kong, au début du film

Mais les événements la forcent à partir au Japon, et sa vie devient une constante fuite, de ville

 

Sous le regard de Lu Xun

 

en ville : à Linfen, dans le Shanxi, elle rencontre un de ses admirateurs, le jeune Duanmu Hongliang (端木蕻良)  qu’elle épouse après s’être séparée de Xiao Jun. Mais la guerre la force à fuir encore, à Wuhan, et enfin à Hong Kong….

 

 

Un mélodrame sans âme

 

Quiconque s’intéresse à la romancière en Xiao Hong sera déçu : il n’est guère question de son oeuvre littéraire. On entendra juste mentionner quelques titres, de temps à autre : les « Contes de la rivière Hulan » (《呼兰河传》) par le visiteur de Hong Kong, à la fin, et c’est ce qui entraîne le flash-back, ou la nouvelle « La mort de la belle-sœur Wang » (王阿嫂的死), écrite à Harbin.

 

Mais, contrairement aux biographies habituelles où la vie constitue la toile de

 

Rencontre providentielle dans Harbin inondé

fond de l’œuvre d’un écrivain, ici, ce sont les œuvres qui sont des épiphénomènes ; toute l’attention

 

Vie à deux

 

est portée sur les malheurs dus à la guerre et les péripéties sentimentales. 

 

La raison essentielle est que la scénariste habituelle de Huo Jianqi, son épouse Su Xiaowei (苏小卫), n’a pas été maîtresse du scénario. Au générique apparaît comme scénariste principale Yi Fuhai (乙福海), qui est aussi productrice du film. Or, elle est directrice adjointe du bureau de la radio-télévision du Heilongjiang (黑龙江广播影视局) (2).

 

Le scénario est typique d’un film télévisé, mettant l’accent sur les côtés dramatiques caractéristiques d’une vie de femme dans les années 1930 en Chine : évasion d’une famille féodale, tentative d’éducation en université, grossesse et pauvreté, le tout dans le contexte de la guerre et de l’avancée des troupes japonaises. Le mélodrame se corse avec les trahisons masculines : mariage imposé et abandon du mari, sauveteur providentiel mais qui se révèle coureur de jupons, quête de l’amour vrai…

 

Fuite devant l’avancée de l’armée japonaise

 

Shu Nan recevant un prix Huabiao

pour la musique de « La fondation

de la République » en 2011

 

Il n’y a cependant pas de véritable construction narrative, et l’absence d’intérêt pour l’œuvre est compensée par des dialogues d’un style littéraire qui tend sans doute à imiter, ou évoquer, le style poétique des écrits de Xiao Hong, mais n’a aucune justification dans le contexte et fait juste artificiel.

 

Le mélo est souligné par une musique indigeste, signée Shu Nan (舒楠), déjà collaborateur de Huo Jianqi pour « La fondation de la République » (《建国大业》) et « La fondation du Parti » (《建党伟业》). C’est en général le compositeur des grands "machins" nationaux, comme aurait dit le Général, Jeux olympiques, commémoration du tremblement de terre de Wenchuan et autres.

 

 

Un film qui ne vaut que par l’interprétation et la photographie

 

Fort heureusement, Huo Jianqi a du métier, et il est superbement servi par ses acteurs et son chef opérateur : on regarde la photographie bouche bée sans trop faire attention à l’histoire et aux pleurs abondamment versés.

 

Excellente interprétation

 

Le rôle de Xiao Hong était initialement prévu pour May Wang (王珞丹), l’actrice qui interprète le rôle de la journaliste stagiaire

 

Reconstitution historique

Yang Jiaqi (杨佳琪) dans le film de Chen Kaige « Caught in the Web » (《搜索》).  

 

Jeux de clair-obscur

 

Finalement, cependant, il est allé à une actrice, elle-même originaire du Heilongjiang, qui est parfaite dans le rôle : Song Jia (宋佳).  Même si elle ne ressemble absolument pas à Xiao Hong, elle apporte une certaine dignité à son personnage, tout comme Huang Jue (黄觉) dans le rôle de Xiao Jun. Les rôles secondaires sont aussi très bien interprétés, en particulier l’actrice Li Yiling (李依玲) qui vient, justement, de la télévision, mais campe son personnage de maîtresse tout en finesse.

  

Superbe photographie

 

Le meilleur du film est cependant la photographie, signée Shi Luan  (石栾), et non du chef opérateur habituel de Huo Jianqi,  Sun Ming (明). Originaire lui aussi du Heilongjiang, Shi Luan filme les paysages enneigés du Nord avec l’amour de celui qui y est né. Il utilise les ralentis pour souligner le souvenir, mais ce sont surtout ses compositions qui forcent l’admiration.

 

On a parfois l’impression d’une galerie de tableaux avec des éclairages à contre-jour, et des effets de clair-obscur, avec une

 

Jeux de clair-obscur

lampe au premier plan, font souvent penser à la Madeleine à la veilleuse de Georges de la Tour. L’œil

 

Composition sous la neige

 

est constamment sollicité si l’esprit ne l’est pas… Shi Luan a été récompensé du prix de la meilleure photographie au 15ème festival de Shanghai, en juin 2012.

 

 

« Falling Flowers » souligne le problème des biographies de personnalités célèbres (传记片), dans le cinéma chinois, genre qui a longtemps été grevé de lourdeurs idéologiques, et est aujourd’hui ravalé au rang de mélodrames sans consistance.

 

 

 

Notes

(1) Sur Xiao Hong et son œuvre, voir :

www.chinese-shortstories.com/Auteurs_de_a_z_Xiao_Hong.htm

(2) Outre China Film et le bureau de la radio-télévision du Heilongjiang, le film est coproduit par le département de la publicité du Comité du Parti du Heilongjiang et le département de la publicité de la municipalité de Harbin. Il s’agit d’un film pour célébrer l’enfant du pays, mais au travers de ses malheurs plus que de son œuvre.

 

Shi Luan (à gauche) recevant

son prix à Shanghai

 

 

 

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



Qui sommes-nous ? - Objectifs et mode d’emploi - Contactez-nous - Liens

 

© ChineseMovies.com.fr. Tous droits réservés.

Conception et réalisation : ZHANG Xiaoqiu