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« Chongqing Blues », un film très subtil de Wang Xiaoshuai à redécouvrir

par Brigitte Duzan, 1er août 2020 

 

Huitième film de Wang Xiaoshuai (王小帅), réalisé après « Shanghai Dreams » (《青红》) et « Une Famille chinoise » (《左右》), « Chongqing Blues » ( Rìzhào Chóngqìng 《日照重庆》) a été en compétition au festival de Cannes en mai 2010 et il est sorti en Chine le 5 novembre suivant. Il sort sur les écrans français le 5 août 2020.

 

Avec ce décalage de dix ans, il apparaît d’autant plus comme un maillon significatif dans l’œuvre du réalisateur. Il est en effet construit sur une thématique qui parcourt toute son œuvre : les problèmes de relations entre parents et enfants, et en particulier la figure du père vis-à-vis du fils.

 

En quête du fils

 

Lin Quanhai(林权海) est capitaine d’un bateau au long cours. Au retour d’un voyage en mer, il apprend que Lin Bo (林波), son fils de 25 ans, est mort, abattu par la police six mois auparavant, après avoir pris en otage une jeune femme dans un supermarché. Il part aussitôt enquêter sur sa mort, pour tenter de comprendre ce qui s’est passé. Cela fait quinze ans qu’il n’a pas vu son fils : il l’a abandonné alors que l’enfant avait dix ans. Il ne se souvient même plus de son visage, et n’a aucune idée de ce qu’il était devenu.

 

Il tente de revoir son ancienne épouse, l’ami de son fils, sa petite amie, les témoins, tout le monde lui ferme la porte au nez en lui faisant comprendre qu’ils le tiennent en grande partie responsable de la fin tragique de son fils. Seul son vieil ami Lao Jin est content de le revoir ; c’est le père du meilleur ami de Lin Bo, et lui aussi a des problèmes relationnels avec son fils, Xiao Hao (), une tête brûlée, rebelle et sans égards pour son père, qui refuse de parler à Lin Quanhai.

 

Chongqing Blues, affiche chinoise

 

Affiche du festival de Cannes

 

Wang Xueqi/ Lin Quanhai dans la ville

 

Peu à peu, cependant, celui-ci réussit à amorcer le dialogue avec les principaux témoins du drame : la petite amie, la doctoresse prise en otage ; son ancienne épouse finit même par accepter de l’emmener voir non la sépulture, mais le lieu où elle a dispersé les cendres de Lin Bo : au bord du fleuve, car son rêve était de rejoindre son père en mer, et le fleuve l’y conduira… C’est la scène où Wang Xiaoshuai laisse enfin percer l’émotion, qui reste cependant contenue : le film est d’une infinie tristesse, mais sans expression superflue des sentiments.  

 

Un père absent

  

Au cours de ses pérégrinations d’une personne à l’autre, Lin Quanhai découvre à quel point son absence a pesé sur son fils, au point qu’il était maladivement accroché à son ami Xiao Hao et qu’il n’a pas supporté la défection de sa petite amie. Le père absent avait créé un tel vide dans son existence qu’il était viscéralement attaché aux peu d’amis qu’il avait autour de lui.

 

Lin Bo lors de la prise d’otage

 

Lin Quanhai avec la petite amie de Lin Bo

 

Le film complexifie cependant quelque peu le tableau : Lao Jin est bien là, lui, mais son fils ne le supporte pas. Il suffit cependant qu’il ait une attaque et soit hospitalisé pour que son fils réalise qu’il déteste peut-être son père, mais que celui-ci lui est indispensable. Le film est donc plus profond qu’on ne l’aurait pensé : la figure du père y devient l’un des éléments clés de la personnalité d’un enfant, qui se définit en regard de lui, même s’il le méprise ou le déteste, et même si le père est excessivement autoritaire.

 

Le thème père//fils qui sous-tend le fil narratif de « Chongqing Blues » est omniprésent dans l’œuvre de Wang Xiaoshuai. On le retrouve dans « Shanghai Dreams » (traité au féminin) en 2005, dans « 11 Flowers » en 2011, mais on le retrouve surtout dans le dernier film, « So Long, My Son » ( 地久天长》), en 2019, et là avec une thématique inversée.

 

 

Chacun muré dans sa solitude et sous le poids du passé

D’excellents acteurs, dont Chongqing

 

Un trio d’acteurs qui se distingue

 

Lin Bo s’imaginant capitaine au long cours

 

Tourné en 2010, « Chongqing Blues » a bénéficié d’une superbe galerie d’acteurs, dont, d’abord, crevant l’écran par sa présence douloureuse, presque mutique : Wang Xueqi (王学圻) dans le rôle du père. Le fils est interprété par un Qin Hao (秦昊) encore débutant, mais qui venait de se faire remarquer l’année précédente dans « Nuits d’ivresse printanière » (《春风沉醉的晚上》) de Lou Ye (娄烨). Très juste également dans le rôle en demi-teinte de la doctoresse Zhuqing (竹青,), Fan Bingbing (范冰冰) montre qu’elle pouvait donner de la profondeur à un second rôle.

 

Principaux rôles et interprètes

 

Wang Xueqi 王学圻        Lin Quanhai 林权海, le père

Ding Jiali 丁嘉丽            Li Yuying 李育英, première épouse de Quanhai, mère de Lin Bo

Wang Kuirong 王奎荣     Lao Jin 老金, vieil ami de Lin Quanhai

Qin Hao 秦昊                Xiao Hao , le fils de Lao Jin et ami de Lin Bo

Fan Bingbing 范冰冰      Zhuqing 竹青, la doctoresse, otage de Lin Bo

Li Fei’er 李菲儿             Xiaowen 小雯, la petite amie de Lin Bo

Zi Yi 子义                     Lin Bo 林波, le fils

 

Chongqing

 

C’est à Chongqing qu’a été tourné le film, et il en est un tableau en contre-plongée. Wang Xiaoshuai a utilisé le voile de brume qui couvre quasiment toujours la ville pour en faire l’image symbolique de l’atmosphère du film, le ciel nimbé de son voilé bleuté étant à l’image des sentiments des personnages.

 

Seule image restant de lui : une photo floue

  

Dernière entrevue : avec le policier qui a tué Lin Bo,

sur fond de ville dans la brume

 

Le film est aussi une histoire de la vie à Chongqing, de cette sorte de jungle urbaine des années 1990-2000. C’est une ville vue de l’intérieur, un film conçu en images bien plus qu’en dialogues, et dont les images laissent une marque profonde et durable.

 

 

L’une des rares vues de la ville : le poids de la brume comme du passé

 

 

Le titre

 

Quant au titre, il est à double sens : Rìzhào Chóngqìng (日照重庆) signifie ‘soleil sur Chongqing’, ou plutôt ‘lumière sur Chongqing’ (au sens de faire la lumière sur…). Mais Rìzhào est également un port important au sud-est du Shandong, à environ 170 km au sud-ouest de Qingdao, avec une belle plage. C’est là que vit le demi-frère de Lin Bo, que celui-ci est à deux doigts de kidnapper pour que son père n’ait d’autre sujet d’attention que lui.

 

 

Bande annonce

 

Le film n’est pas parfait, il a ses défauts et ses zones d’ombre, mais tel qu’il est il permet de mesurer la genèse d’une œuvre, le chemin parcouru de « Chongqing Blues » à « So Long My Son ».

 

 

 

     

 

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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