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Jia Ling 贾玲

Présentation

par Brigitte Duzan, 22 décembre 2024

 

 

Jia Ling (en 2024)

 

 

Depuis 2021, Jia Ling est célèbre en Chine pour le film « Hi, Mom » (《你好,李焕英》) qu’elle a coécrit et réalisé et dont elle interprète le rôle principal : sortie sur les écrans chinois en février 2021, pour les fêtes du Nouvel An, cette comédie a été, et reste, l’un des plus « gros » succès de tous les temps au box-office chinois [1]. Même en tenant compte des raisons qui ont contribué à un tel succès (impact du confinement, médiocrité des films en concurrence), il est certain que le film a touché des cordes sensibles et qu’il reflète un phénomène de société à l’aube des années 2020.

 

Le xiangsheng comme comédie télévisée d’un nouveau genre

 

Jia Ling (贾玲) est née en avril 1982 dans le district de Yicheng (宜城), dans le nord du Hubei. En 1994, voulant devenir actrice, elle entre à l’École d’art de Wuhan (武汉艺术学校) où elle étudie pendant deux ans. En 2000, elle postule pour la classe d’interprétation de l’Institut central d’art dramatique (中央戏剧学院), mais sa candidature n’est pas retenue. Elle la renouvelle l’année suivante, en postulant également pour la classe de xiangsheng (相声) [2], classe dans laquelle elle est finalement admise.

 

C’est alors, fin 2001, qu’elle reçoit la nouvelle que sa mère est morte dans un accident : alors qu’elle était allée aider son mari à rentrer le foin et qu’ils repartaient en tracteur, elle s’était assise sur le haut du chargement pour le stabiliser et elle était tombée. Elle avait 48 ans. Cela restera un trauma pour Jia Ling.

 

Sa sœur aînée abandonne alors ses études pour l’aider à poursuivre les siennes. Mais, après l’obtention de son diplôme, en 2003, elle ne trouve pas de travail comme interprète de xiangsheng, discipline déjà assez rare, où les femmes le sont encore plus. Elle fait donc toutes sortes de petits boulots pour survivre, toujours avec l’aide de sa sœur.  

 

En 2003, cependant, elle participe à la compétition nationale de xiangsheng (全国相声小品邀请赛), et remporte le premier prix. Deux ans plus tard, elle est admise dans la troupe artistique de la Radio chinoise (中国广播艺术团) et en 2006 remporte le deuxième prix de la compétition de xiangsheng de la télévision nationale (CCTV).

 

En juillet 2009, avec un autre comédien, elle forme une troupe intitulée « Taverne du nouveau rire » (新笑声客栈), en créant un nouveau style de xiangsheng, baptisé « cool » (kùkǒu xiàngsheng 酷口相声). Et en 2010, elle fait ses débuts à la télévision, dans le Gala du Nouvel An de CCTV, avec un sketch qui arrive en troisième place dans les préférences des téléspectateurs.

 

En juin 2014, elle est l’une des principales interprètes d’un show d’improvisation avec un sketch intitulé « Lok Street » (xǐlè jiē《喜乐街》), littéralement « Rue de la joie ». Son sketch est repris dans le Gala du Nouvel An de CCTV en février 2015 (2015年中央电视台春节联欢晚会》).

 

Cette même année, Jia Ling monte un autre sketch, adapté de la légende de Hua Mulan (《木兰从军》), pour un show de la télévision du Zhejiang intitulé « Mobilisation générale pour la comédie » (喜剧总动员). Le sketch est diffusé en septembre 2016 et soulève une vive controverse : au lieu de l’héroïne qui s’habille en homme pour aller vaillamment combattre à la place de son père, Jia Ling fait de Mulan une jeune paysanne un peu idiote qui s’enrôle sous les drapeaux pour manger à sa faim. Un institut de recherche sur Mulan va jusqu’à demander à Jia Ling de faire des excuses publiques…

 

En 2016, elle participe avec son équipe à la première saison d’une compétition de comédies télévisées avec un sketch en hommage à sa mère intitulé « Hello, Li Huanying » (《你好,李焕英》) qui remporte la première place dans le show télévisé. Elle continue de participer à ces shows télévisés dans les années suivantes, mais entre-temps « Hello, Li Huanying » a été adapté au cinéma, pour devenir « Hi, Mom »…

 

De « Hello, Li Huanying » à « Hi, Mom »

 

« Hi, Mom » (《你好,李焕英》) a remporté un succès que rien ne laissait prévoir, sauf un heureux concours de circonstances, dans un contexte post-covid de cinéma anémique. Malgré tout, ce que l’on peut en retenir, au-delà des chiffres, c’est l’impact d’ordre émotionnel du film : si l’idée d’un retour vers le passé a un côté un peu simpliste, y compris dans sa matérialisation à l’écran, le scénario joue ensuite sur les possibilités qu’offre cet artifice pour revenir sur la relation mère-fille, avec un regard rétrospectif.

 

 

Hi, Mom

 

 

En recréant l’atmosphère des années 1980, dans un contexte épidémique tendu où la grande majorité des Chinois étaient dans l’impossibilité de rentrer dans leur famille au moment des fêtes du Nouvel An, le gouvernement ayant interdit les déplacements pour des raisons sanitaires, le film a suscité une émotion d’autant plus forte auprès de spectateurs bloqués loin de chez eux. Le changement de titre même (de « Hi, Li Huanying » à « Hi, Mom ») souligne l’aspect symbolique de la mère dans le film, au-delà de celle, précisément, de Jia Ling, facilitant la symbiose affective de chacun avec le personnage du film, entre rire et larmes, comme dans les mélodrames d’antan.

 

« Hi, Mom » reste malgré tout empreint de sa marque originelle : les productions de comédies télévisées. Le xiangsheng de Jia Ling est d’un comique souvent lourd, fort heureusement allégé dans son film dont on retient finalement  l’atmosphère nostalgique de passé aux teintes pastel soulignées à plaisir par la photo – de Sun Ming (孙明) plutôt que de Liu Yin (刘寅) [3].

 

Et de « Hi, Mom » à « YOLO »

 

Jia Ling s’éclipse ensuite pour préparer son deuxième film, « YOLO » (《热辣滚烫》), qui sort en février 2024, comme le précédent pour les fêtes du Nouvel An.

 

 

YOLO

 

 

« YOLO » est adapté d’un film japonais de 2014 : « 100 Yen Love » (《百円の恋》) – un film classé « sports drama » et qualifié par un critique du Hollywood Reporter de « powerful portrait of punch-drunk love » ; il avait pour lui d’avoir obtenu le Japanese Cinema Splash Award au 27e festival de cinéma de Tokyo.

 

 

100 Yen Love

 

 

Écrit avec quatre autres coscénaristes, « YOLO » reprend les grandes lignes du scénario du film japonais, mais en lui insufflant une autre dynamique et une thématique légèrement différente. « YOLO » est l’histoire d’une jeune femme d’une trentaine d’années, Du Leying (杜乐莹), vivant avec ses parents, dans une semi-réclusion, déçue par la vie, en conflit avec sa sœur et trompée par sa meilleure amie ; tombée amoureuse d’un entraîneur de boxe, elle finit par trouver un équilibre physique et émotionnel dans une pratique sportive qui lui redonne tonus et confiance en elle, et une nouvelle indépendance. Le titre chinois - Rè là gǔntàng《热辣滚烫》- soit « chaud, épicé et brûlant », se veut symboliser cette vie dont la réussite finale est faite de combats acharnés.

 

YOLO, trailer

 

Jia Ling – qui interprète Du Leying - semble avoir elle-même suivi le parcours de son personnage, ayant perdu quelque cinquante kilos pour le tournage comme le soulignent ad libitum le dossier de presse et la plupart des articles sur le film [4]. Il a ainsi soulevé toute une polémique sur le culte du corps en Chine aujourd’hui, surtout chez les jeunes femmes, culte exacerbé au cinéma, mais présent aussi en littérature[5] : comme si la perte de poids était la voie royale vers un regard apaisé sur soi-même. Le film est aussi la glorification de la jouissance épicurienne du moment présent – YOLO étant l’acronyme de « You Only Live Once ». Jia Ling en sort transformée, et plus que jamais emblématique d’un cinéma au féminin

 

On retiendra que « YOLO » a été un nouveau succès au box-office. Les droits de distribution à l’international ont été acquis par Sony Pictures. Le film est sorti le 21 mars 2024 à Singapour et en Malaisie. Jia Ling a de beaux jours devant elle.

 

 

La nouvelle Jia Ling

 

 

En Chine, cependant, beaucoup de ses fans ne se reconnaissent plus en elle… L’avenir n’est pas si souriant que ses nouvelles photos.

 


 


[1] Et, en décembre 2024, reste noté 7.7 sur douban.

[2] Genre relevant d’une tradition populaire du nord, longtemps divertissement des Galas de fin d’année de la télévision chinoise, sous l’égide de Zhao Benshan (赵本山) et de ses disciples.

[3] Sun Ming a été le directeur de la photo du « Xuanzang » (《大唐玄奘》) de Huo Jianqi (霍建起), tandis que Liu Yin s’est illustré comme celui, entre autres, de « Taking Tiger Mountain by Strategy » (《智取威虎山》) de Tsui Hark et de « The Wandering Earth » (《流浪地球》) et autres films de Guo Fan (郭帆).

[4] Après en avoir pris vingt pour les besoins du début du film. On n’en finit pas de comparer avant et après

 

 

     

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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