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Zhao Dayong
赵大勇
Présentation
par Brigitte Duzan, 19 janvier
2014, actualisé 8 mars 2016
Zhao Dayong fait
partie des jeunes documentaristes indépendants
chinois les plus percutants apparus dans les années
2000.
Il est passé à la
fiction en 2010, ainsi que pour son film suivant,
présenté au festival de Berlin en février 2014. Mais
la limite entre fiction et documentaire est des plus
floues chez lui...
Peintre et
publicitaire
Zhao Dayong (赵大勇)
est né en 1970 à Fushun, dans l'est du Liaoning (辽宁抚顺). |
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Zhao Dayong |
En 1988, il commence des études de peinture à l'Institut des
Beaux-Arts Lu Xun de Shenyang (沈阳鲁迅美术学院)
à la fin desquelles, en 1992, il s'installe à Pékin comme
peintre professionnel.
En 1995, il part à Canton et débute dans le
graphisme publicitaire, puis, en 1998, devient réalisateur
de spots publicitaires. En 1997, il crée une revue d'art
contemporain chinois, « Culture et Morale » (《文化与道德》),
et, l'année suivante, une agence publicitaire, à Canton.
En 2000, il participe au
programme d'échange de l'université Harvard pour se
perfectionner en art de l'Asie de l'Est. Puis, à la fin du
programme, en 2001, il rentre à Canton et décide de devenir
réalisateur indépendant.
Documentariste indépendant
C'est en 2006 que sort son
premier documentaire, tourné dans la grande rue commerciale
de Shanghai, Nanjing lu.
Street Life
Street Life |
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« Street Life »
(《南京路》) a tout de suite fait connaître Zhao Dayong.
Son documentaire suit les traces d'un marginal sans
abri qui vit le jour en collectant des objets à
recycler de tas d'ordures, et se fait la nuit poète
et chanteur, comme les conteurs d'autrefois, dans
une Nanjing lu vidée de sa foule diurne. Ce qu'il
chante ? Des épisodes du « Voyage en Occident »
(《西游记》)...
Ce que filme Zhao
Dayong, c'est l'envers du décor bien connu de cette
artère vouée au |
commerce et au divertissement
depuis le milieu du 19ème siècle : des bandes de pauvres
hères rejetés
aux marges de la
société dite de consommation, qui livrent, et se
livrent, une lutte féroce pour survivre.
Il filme en DV, avec
une caméra très mobile qui s'attache aux pas de
chacun comme une ombre, sans prendre parti, ni
s'émouvoir, sauf peut-être un instant, quand un
enfant verse une larme en évoquant la mère qui l'a
abandonné.... mais cet instant-là en dit plus, avec
plus d'intensité, que le reste des 78 minutes du
film (1).
Ghost Town
Après « Street Life »,
Zhao Dayong est parti filmer la vie dans un village
perdu, dans les montagnes à la frontière de la
Birmanie, une ville fantomatique : « Ghost Town »
(《废城》 ).
Sorti en 2008, ce second film est le pendant du
premier : un documentaire sur les marges rurales de
la Chine, après ses marges urbaines. Il est beaucoup
plus long, près de trois
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Ghost Town |
Rough Poetry |
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heures, comme si la
vie s'écoulait si lentement, là-bas, qu'on ne
pouvait la capter naturellement qu'en misant sur la
durée. Zhao Dayong l'a construit en un triptyque qui
commence par
évoquer le poids de la tradition et du passé, avant
de s'attacher aux jeunes générations : Voix
(“上帝的声音”), Souvenirs (“记忆”), Innocence (“少年”).
C'est à nouveau filmé
en numérique, et financé par le réalisateur sur ses
propres deniers. Pas question, bien sûr, de visa de
censure : « Vouloir passer la censure, dit Zhao
Dayong, c'est comme accepter de se faire violer. »
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The High Life
Après un film
expérimental, il a réalisé un troisième
documentaire, cette fois sur une autre population
marginale, la population africaine de Canton, vue à
travers l'histoire d'une église nigériane.
Puis il est passé à la
fiction, avec « The High Life » (《寻欢作乐》), sur un
scénario remarquablement bien construit, qui déroule
cinq fils narratifs subtilement liés entre eux. Le
film oppose deux univers, symbolisés par deux
personnages principaux : un gardien de prison, et un
aspirant poète qui est en fait un petit escroc.
L'univers carcéral de l'un apparaît cependant très
proche, finalement, du taudis où évolue l'autre,
visuellement d'abord, l'un et l'autre étant enserrés
dans de hauts murs étouffants.
« The High Life » est
un film esthétiquement très réussi, qui fait tomber
les limites entre documentaire et fiction :
l'histoire |
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The High Life |
est fictive, comme la plupart
des personnages, mais les situations sont directement
inspirées de l'expérience documentaire du réalisateur. La
fiction permet juste de mieux appréhender le réel.
Shadow Days
Après "The High Life", "Shadow
Days" (《鬼日子》), sorti en première mondiale au festival de
Berlin en février 2014, est un second film de fiction où
l'aspect documentaire est cependant très présent.
Filmographie
2006 Street Life 《南京路》 -
documentaire
2008 Ghost Town《废城》 - documentaire
2009 Rough Poetry 《下流诗歌》 - film expérimental
2009 My Father’s House
《家园》
- documentaire
2010 The
High Life
《寻欢作乐》
-
fiction
2014 Shadow
Days 《鬼日子》 - fiction
Note
(1) A lire en complément,
une très bonne analyse
de Street Life :
http://dgeneratefilms.com/film-reviews/a-mad-dance-on-shanghai-streets-zhao-dayongs-street-life
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