Li Ruijun et son
superbe « retour à la poussière » :
un film où prime l’émotion
par
Brigitte Duzan, 14 février 2023
Return to Dust
Sorti en première mondiale en
février 2022 à la Berlinale où il était en compétition, puis
en Chine au début du mois de juillet, « Return to Dust »
(《隐入尘烟》) – en français « Le Retour des hirondelles »
[1]
– est le cinquième film
de Li
Ruijun (李睿珺)
après le superbe « Old
Donkey » (《老驴头》)
qui l’a fait connaître en 2010
[2].
Pour
ce nouveau film, il est revenu dans son Gaotai natal, dans
le Gansu (甘肃高台).
C’est en quelque sorte un retour aux sources, dans une
tonalité pleine d’une douce chaleur humaine caractéristique
du réalisateur, mais avec ici un ton critique à peine voilé
qui a valu au film d’être « retiré des étagères » peu de
temps avant le 20e Congrès du Parti. Réduit en
Chine au rang de ces films
fantômes victimes d’une censure aveugle,
le film a pu sortir en France, le 8 février 2023, et c’est
une chance : c’est sans doute le plus beau film de Li Ruijun
à ce jour, et le plus beau film que l’on ait vu sortir de
Chine depuis longtemps.
Affiche pour le
festival de Berlin
C’est
un film d’autant plus personnel que c’est Li Ruijun lui-même
qui en a écrit le scénario : il a passé un an à l’écrire,
puis un an à tourner le film et encore un an à le monter.
Mais c’est en fait une idée qu’il a mûrie pendant cinq ou
six ans, et qui est bien sûr inspirée de la réalité et de
ses souvenirs.
L’émotion dans la simplicité
Une
histoire douce-amère
Le
film s’attache à deux êtres que la vie n’a pas gâtés :
souffrant d’un léger handicap, Cao Guiying (曹贵英)
a été le souffre-douleur de sa famille, reléguée dans une
cabane et tellement battue qu’elle en est devenue
incontinente ; quant à Ma Youtie (马有铁),
ayant largement dépassé l’âge de se marier, mais toujours
célibataire avec pour tout capital un vieil âne, il est
considéré comme l’idiot de la famille. Tous deux sont
devenus une charge pour leurs familles respectives qui ne
trouvent rien de mieux pour les caser que de les marier l’un
à l’autre.
Premières images :
Youtie et Guiying pendant que les familles discutent
de leur mariage
La vie
les a rendus introvertis, incapables de communiquer. Ils
sont gênés d’avoir à vivre ensemble. Mais le malaise initial
se résorbe peu à peu. Après des années de solitude, ils
découvrent presque avec incrédulité la joie tranquille d’une
vie nouvelle à deux.
Mais
il leur faut résoudre le problème du logement. Dans un
contexte de dépeuplement accéléré des campagnes chinoises,
les vieilles maisons du village sont promises à démolition,
les propriétaires partis travailler en ville, dans le sud,
qui n’y vivent plus y étant encouragés par les primes
offertes par les autorités : primes de démolition pour
reconstruire un habitat plus digne de la Chine moderne. Les
maisons sont détruites l’une après l’autre et réduites à des
tas de gravats.
Ma
Youtie et Cao Guiying ont commencé à retaper l’une de ces
vieilles maisons et à s’y installer. Mais, alerté par les
autorités du village, le propriétaire revient pour toucher
la prime et faire démolir la maison. Ils vont alors
entreprendre de s’en construire une eux-mêmes, en commençant
par fabriquer les briques d’adobe, mises en cercle à sécher
au soleil, et en utilisant les poutres et montants de portes
et de fenêtres en bois qu’on leur a gracieusement permis de
récupérer des maisons démolies. C’est un travail éreintant,
mais c’est aussi un travail à deux avec au bout du compte un
foyer bien à eux, comme ils n’avaient jamais osé en rêver.
Guiying venue chercher
Youtie rentré tard dans la nuit
(image à la Fantin de la Tour)
Et
comme dans les rêves de Perrette, ils ont bientôt des
poussins puis des poules, le tout sous l’œil de l’âne qui
est le troisième compagnon dans l’histoire, indispensable
aux durs travaux quotidiens. Le bonheur est là, simple et
tranquille, au gré du labeur dans les champs, en marge du
village qui ne sait que se moquer. Ma Youtie est traité
comme un demeuré et même contraint, ayant un groupe sanguin
rare, de donner son sang pour sauver l’huile locale qui ne
lui fait même pas cadeau des semences qu’il lui vend. Mais
même cet abus scandaleux n’entame pas leur bonheur qui tient
à leur capacité à jouir simplement des joies les plus
infimes, en acceptant les revers du destin avec une sorte de
résignation paisible.
De
purs moments de bonheur et de poésie
Le
film distille une émotion contenue, à fleur de peau, mais il
est aussi constamment sous tension, en échappant comme par
un miracle renouvelé aux conventions du mélodrame. Dur
labeur, certes, que ce travail dans les champs avec des
techniques ancestrales qui privilégient le rapport de
l’homme à la terre, au gré des saisons et toujours sous la
menace des intempéries. Cependant, même un orage soudain
éclatant dans la nuit et menaçant de réduire en charpie les
briques d’adobe ne parvient pas à tourner au drame ;
entraînés par le vent et tombés dans la boue, les deux
complices trempés se rient des éléments dans une séquence
formidable.
Semailles
C’est
ce rapport à la terre qui sous-tend la philosophie de Ma
Youtie, philosophie de la vie qui est sagesse ancienne et
qu’il énonce en quelques sentences laconiques – la terre
nourrira toujours celui qui la travaille, dit-il à Guiying,
assis au bord du champ, comme en opposition à ces villageois
enrichis qui reviennent au village faire démolir leur
maison.
Mais
c’est une sagesse qui prend tout son sens en se vivant à
deux. Dans la maison achevée, le premier élément de
décoration, qui restera unique, est le caractère du double
bonheur nuptial découpé dans du papier rouge épinglé sur le
mur, au-dessus du lit, comme emblème bien visible de ce
bonheur inattendu que ni l’un ni l’autre n’aurait songé
pouvoir vivre un jour, avec un toit sur la tête. Sous leur
regard, tout devient merveilleux, à commencer par ce carton
percé de trous pour faire office de couveuse et qui,
illuminé de l’intérieur, devient lanterne magique dans la
nuit. Même émerveillement quand éclosent les poussins, en
piaillant à qui mieux mieux.
Moisson
On
pourrait citer une pléiade de penseurs et de poètes chinois,
mais on pense aussi bien à Francis Jammes : « …Le fait
est que l'oiseau chante Et, puisqu'il éclôt d'un œuf, Est-ce
une chose étonnante Que le chant sorte tout neuf, Avec
l'oiseau, de cet œuf ?... »
[3].
Et les
poussins grandissent, deviennent petites poules qui animent
la cour de la maison sous l’œil de l’âne, ce vieux compagnon
des jours heureux. Et c’est encore à Francis Jammes que l’on
pense, à son poète demandant à l’oiseau s’il a vu le Bon
Dieu en volant, à quoi l’oiseau répond :
Non. Le Bon-Dieu n’est pas en haut. Il est en bas. Il habite la petite maison
que tu vois où il y a une fontaine et
des œillets sauvages et un chien
qui s’endort aux mouches de l’étable…
[4]
Pas de
chien ici, mais un âne, pas de fontaine ni d’œillets
sauvages mais des champs de blé sous un soleil de plomb, pas
de Bon Dieu non plus, bien sûr, mais la Terre. Et un même
sentiment de communion paisible avec la nature, dépeint avec
une simplicité dont le même Francis Jammes a dit : « Les
ignorants parlent [de la simplicité] comme d’une chose toute
naturelle, que l’on devrait produire sans la préparer.
Erreur. [Elle] est l’apanage de la culture et de l’émotion… »
[5]
L’âne
C’est
cette émotion que l’on ressent tout au long du film et qui
en est comme la colonne vertébrale. Émotion où sourd une
certaine anxiété au fur et à mesure que passe le temps, et
que l’on se dit qu’un bonheur aussi ténu est bien fragile.
Et effectivement, le destin – pour ainsi dire - finit par
les rattraper. Guiying tombe malade…. On ne saurait en dire
plus pour ne pas déflorer la fin du film - fin qui semble
signifier qu’aujourd’hui pas plus qu’hier le bonheur n’est
possible pour deux êtres comme ces deux-là dans la campagne
chinoise.
Émotion distillée par les interprètes
L’émotion est certes portée par le scénario, mais elle est
distillée par les deux interprètes : Wu Renlin (武仁林)
dans le rôle de Ma Youtie et Hai Qing (海清)
dans celui de Cao Guiying. Il suffira de dire que l’un est
amateur et l’autre professionnelle, on ne le remarque pas.
Décoration de la
nouvelle maison avec le caractère du double bonheur
Wu
Renlin est l’oncle
du réalisateur, un vrai paysan de Gaotai, naturellement
taciturne. Hai
Qing est une grande actrice, peut-être plus connue pour ses
rôles à la télévision, mais elle a joué, au cinéma, dans « Sacrifice
» (《赵氏孤儿》)
de Chen
Kaige
ou encore dans « Love
Is Not Blind » (《失恋33天》)
de Teng
Huatao (滕华涛).
Cependant, elle est née en en 1978 à Nankin. Pour se
préparer à son rôle dans « Return to Dust », rôle de
composition particulièrement difficile pour une citadine,
elle est allée vivre quatre mois dans le village en
participant aux travaux des champs. Elle a insisté pour
choisir elle-même les vieux vêtements qu’elle porte dans le
film. Elle aura finalement passé dix mois au village, mais
elle en a gardé un mal de dos qui a duré bien plus
longtemps.
Elle a
également appris le dialecte car les dialogues du film sont
en dialecte du Gansu, ce qui ajoute une authentique couleur
locale au film.
Réception du film et censure
Succès, mais finalement censuré
Après
avoir vu sa sortie plusieurs fois repoussée, le film est
finalement sorti en Chine le 8 juillet 2022, après une
avant-première à Pékin deux jours auparavant. Il a aussitôt
remporté un grand succès. Le 29 août, il a été annoncé que
sa programmation en salle était prolongée jusqu’au 30
septembre. Mais il passait également sur les quatre
principales plateformes de streaming.
La couveuse magique
Pour pouvoir obtenir le visa
de censure, le film avait cependant dû subir des
changements. La fin surtout a été modifiée dans un sens plus
favorable à l’image du régime et du Parti (voir ci-dessous).
Pourtant, le 26 septembre, quelques semaines avant le 20e
Congrès du Parti, il a été brusquement retiré des écrans et
des services de streaming – « descendu des étagères » (xia
jia
下架),
comme on dit des livres censurés - tandis que toute
discussion sur le film était interdite sur les réseaux
sociaux.
Cette
mesure soudaine et inattendue a provoqué la stupeur et
engendré un début de protestation vite muselée. Les raisons
en sont pourtant relativement aisées à comprendre : elles
tiennent à l’image de la campagne donnée par le film.
Persistance de la pauvreté, et surtout de l’exploitation de
la pauvreté
Au-delà de la peinture poétique d’une vie à deux rythmée par
le cours des saisons et le travail de la terre, le film
montre en effet la persistance de la pauvreté dans les
campagnes reculées, le Gansu étant, selon les statistiques
de 2019, l’une des régions les plus pauvres de Chine. Mais
ce n’est pas tellement la pauvreté qui est en cause que la
persistance de l’exploitation de la pauvreté, dans un
contexte où les mentalités n’ont guère évolué et où les
paysans enrichis ont le haut du pavé comme autrefois les
propriétaires fonciers.
Le bonheur
Le film
montre l’exploitation éhontée à laquelle est soumis Ma
Youtie, et le mépris avec lequel il est traité. Même
l’allocation de logement qui lui revient en tant que paysan
le plus pauvre du village est détournée au profit d’un neveu
qui va se marier. Et quand il vend ses récoltes, il est
encore arnaqué par le négociant qui l’escroque sur le poids
et sur le total dû sous prétexte d’arrondir les chiffres et
faciliter la comptabilité. La séquence, réaliste, où les
paysans viennent apporter leurs récoltes pour les faire
comptabiliser en demandant des reports de paiement sur ce
qu’ils doivent pour les semences est ahurissante car elle
ressemble à des films sur les pratiques dites « féodales » à
la campagne avant la Réforme agraire
[6].
C’est
bien là que les choses ont achoppé.
Outrage à Xi et au Parti
Il se
trouve qu’avant le Congrès avait été publié et diffusé un
rapport triomphaliste sur les succès de la politique menée
par le Parti dans les campagnes, et en particulier sous
l’égide du président Xi Jinping ; selon un
rapport d’avril 2021 du Conseil d’Etat,
cette politique a abouti à l’éradication de la pauvreté
rurale en Chine. Un rapport en ce sens a même été
présenté à la Banque mondiale
le 1er avril 2022 sous le titre : « Sortir 800
millions d’individus de la pauvreté, leçons de l’expérience
chinoise ». « La Chine a réalisé son objectif de réduction
de la pauvreté selon le programme défini à la fin de 2020 »
a proclamé le vice-ministre des Finances Yu Weiping (余蔚平).
Hai Qing
Le
rapport soulignait que la Chine avait atteint son objectif
grâce à une double approche : d’une part une vaste
transformation économique permettant d’élever le niveau
général des revenus ; et d’autre part une attention plus
particulière portée aux régions souffrant de handicaps
naturels et du manque d’opportunités de développement. Le
rapport soulignait que les succès avaient été acquis grâce à
une gouvernance efficace sur le terrain.
Autant
de prétentions que le film réduit à néant en montrant
combien la réalité locale, justement, est loin de celle
revendiquée sur le papier par le régime de Pékin. Or la
lutte contre la pauvreté rurale est l’un des programmes
phares de Xi Jinping, en particulier avec une nouvelle
campagne lancée en 2015
[7].
« Return to Dust » ne pouvait que disparaître des écrans
chinois, sans aucun égard pour ses qualités artistiques, ou
au contraire en raison même de ses qualités artistiques qui
le rendent d’autant plus dangereux. Une véritable « herbe
empoisonnée » (毒草).
C’est
une chance que le film ait pu sortir en France, avec un seul
regret : que l’on ait choisi un titre français qui en
dénature la beauté en la banalisant. Le titre chinois – dont
le titre anglais est plus proche - signifie : revenir à un
état caché dans la poussière (et la fumée). Un sens un peu
ésotérique que l’on ne comprend vraiment qu’après avoir vu
le film.
Trailer de Return to
Dust
Return to Dust, clip Berlinale 1
Return to Dust, clip Berlinale 2
Return to Dust, clip Berlinale 3
Note a posteriori sur la fin du film et le titre
[à lire après avoir vu le film]
Le
film a été en butte à la censure et a été modifié pour
pouvoir sortir en salles. C’est surtout la fin qui a été
changée selon les exigences des censeurs, dans un sens
totalement contraire à l’esprit du film.
Les
séquences finales
Youtie
est parti travailler en laissant Guiying malade se reposer.
Quand il rentre, elle n’est pas là et il ressort la
chercher. Les villageois assis tranquillement au bord du
canal lui disent qu’elle était partie lui apporter à manger,
qu’elle a eu un malaise et qu’elle est tombée à l’eau. On ne
sait pas exactement depuis combien de temps cela s’est
passé, mais pas un seul n’a bougé pour tenter de la sauver.
Elle est déjà morte, son corps flotte à la surface quand
Youtie saute à l’eau pour la repêcher. Il ramène le corps
chez eux, l’installe sur le lit, enlève le caractère rouge
du double bonheur du mur, le remplace par la seule photo
qu’il a, celle de leur mariage, entourée d’un crêpe noir, et
sous la photo installe un autel funéraire.
La
suite est laissée volontairement floue. On voit Youtie
vendre toutes ses provisions et, avec l’argent obtenu, aller
rembourser ses dettes. Puis il libère son âne. Et dans la
dernière scène on voit la maison démolie, et le frère aîné
de Youtie toucher la prime de démolition – scène muette,
particulièrement émouvante dans son laconisme, filmée à côté
de l’âne dont on voit une partie de la tête, comme si la
démolition était vue par l’animal désorienté revenu chez lui
à la recherche de son maître.
On
comprend le geste de Youtie pour lequel l’avenir, et la
maison en particulier, n’avaient plus de sens sans Guiying,
Dans une très belle scène, justement, après avoir installé
le corps de Guiying sur le lit, Youtie soulève légèrement la
couverture qui la dissimule pour découvrir son poignet ; et
comme dans le champ dans une séquence précédente, il imprime
dans la peau une petit fleur avec des grains de blé : comme
ça, lui avait-il dit, je pourrai te retrouver où que tu
ailles… Il s’apprête à aller la rejoindre.
La petite fleur sur le
poignet
D’où
le sens final du titre : retour à la poussière, « la
poussière retourne à la poussière, la terre retourne à la
terre » (尘归尘,土归土),
« les fleurs s’épanouissent, les fleurs se fanent, puis
retournent à la poussière » (“花开了,花谢了,隐入尘烟。”).
Les modifications
Les
censeurs n’ont pas toléré cette fin poétique mais si sombre
et l’ont dénaturée en ajoutant une voix off dans la séquence
finale de la démolition, comme si l’un des deux personnages
s’adressait à l’autre pour lui expliquer que Youtie est
parti dans son nouvel appartement. Mais on voit bien que le
frère aîné et son fils attendent juste que le bulldozer ait
fini son travail, ils ne se parlent pas.
La
séquence de démolition de la maison avec le
sous-titrage de la voix rajoutée
La
version révisée comportait même une ligne de texte ajoutée
avant le générique, comme s’il s’agissait d’un
documentaire :
“2011年冬,老四马有铁在政府和热心村民的帮助下,乔迁新居,过上了新生活。”
« Pendant l’hiver 2011, avec l’aide du gouvernement et des
villageois au grand cœur, Ma Youtie est parti vivre dans son
nouveau logement et a commencé une nouvelle vie. »
Même
l’autel a été changé. Dans la version du film projeté en
France, c’est un autel funéraire avec deux bougies allumées
de chaque côté. Dans la version initiale sont posés sur la
table l’œuf que va manger Youtie en souvenir de Guiying,
mais aussi le flacon de poison qu’il va avaler, l’œuf étant
aussi utile pour atténuer la douleur causée par le
pesticide.
L’autel dans la version initiale
Ce
n’est certes pas la première fois que l’on voit les censeurs
chinois réagir ainsi, mais on est quand même étonné de les
voir utiliser encore aujourd’hui des moyens aussi grossiers,
voire infantiles. Il leur est sans doute bien plus aisé
d’interdire un film, ce qu’ils ont fini par faire.
Note sur le titre français
La
version sortie en France ne comporte pas ces modifications,
mais le titre choisi - « Le retour des hirondelles » - n’est
pas heureux.
Il ne
se comprend aussi que lorsqu’on a vu le fim : il s’agit d’un
détail qui prend valeur allégorique. Sous l’avancée du toit
de la vieille maison où Youtie et Guiying vont d’abord vivre
après leur mariage, il y a un nid d’hirondelles. Youtie
revient sur les lieux une fois la maison démolie, retrouve
le nid et le rapporte dans la nouvelle maison en espérant
que les hirondelles le retrouveront et y reviendront. Cela
porte bonheur, c’est un message d’espoir.
Dans
le contexte, outre le fait que c’est banaliser le film,
choisir « Le retour des hirondelles » comme titre équivaut,
consciemment ou inconsciemment, à se faire complice des
censeurs chinois.
[1] Titre
sans lien avec le titre original chinois, fondé sur
un détail du film à valeur allégorique. Voir la note
ci-dessus.
[2]
Il avait auparavant réalisé un
premier film, « Summer Solstice » (《夏至》),
mais dont il n’était pas satisfait.
[3]Francis
Jammes, De tout temps à jamais (Gallimard, 193).
Francis Jammes d’ailleurs qui a évoqué toute sa vie
les miséreux, les boiteux, les bossus, les animaux
souffrants et les jeunes filles pures.