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« A New Old Play » de Qiu Jiongjiong : l’opéra du Sichuan revisité comme mémoire populaire

par Brigitte Duzan, 18 juin 2025

 

Premier long métrage de fiction de Qiu Jiongjiong (邱炯炯), « A New Old Play » (《椒麻堂会》) a commencé sa carrière en obtenant le prix spécial du jury au festival de Locarno en août 2021. Il a poursuivi avec, entre autres, le prix du jury du festival des Trois-Continents à Nantes en novembre 2021 et le prix FIPRESCI au festival de Hong Kong en août 2022. Sorti sur les écrans français le 11 juin 2025 grâce au distributeur Carlotta Films, le film a – comme ailleurs – remporté l’adhésion enthousiaste du public comme des critiques qui ont pu le voir.

 

 

A New Old Play

 

 

On peut résumer l’histoire en quelques mots rapides : un grand acteur de l’opéra du Sichuan vient de mourir et se retrouve à la porte du monde des enfers ; accueilli par les deux gardiens en poste, il revit les moments les plus mémorables de son existence d’artiste confronté à l’histoire tumultueuse de la Chine du 20e siècle.

 

C’est à la fois vrai, et trompeur : vrai pour ce qui concerne les grandes lignes du scénario, trompeur car tout est dans les détails, narratifs et esthétiques. « A New Old Play » est une œuvre d’artiste à contre-courant du cinéma actuel, et surtout du cinéma chinois, mais le présenter ainsi serait encore réducteur, car « A New Old Play » est avant tout un film éminemment personnel, de par sa conception même, mais aussi par les choix et exigences esthétiques de sa réalisation.

 

·         Une histoire familiale

 

« A New Old Play » est inspiré de l’histoire familiale du réalisateur, et plus précisément celle de son grand-père, Qiu Fuxin (邱福新), célèbre acteur d’opéra du Sichuan (川剧), décédé en 1987 alors que Qiu Jiongjiong avait dix ans[1]. Pour le 30e anniversaire de sa mort, en 2017, le père du réalisateur a écrit une biographie du grand acteur, et a demandé à Qiu Jiongjiong d’en illustrer les 15 chapitres – ce qu’il a fait, en l’espace de deux mois. Son grand-père avait exercé une influence prédominante sur son éducation et sa formation hors des sentiers battus universitaires et institutionnels ; il apparaît en filigrane dans son œuvre, à commencer par son deuxième court métrage, « L’Ode à la joie » (《彩排记》), c’est-à-dire « Répétitions ». C’était déjà un hommage à l’art de Qiu Fuxin, réalisé en 2007, pour le 20e anniversaire de la disparition du grand artiste, spécialiste des rôles de chou ()[2], un rôle bien plus important dans l’opéra du Sichuan que dans les autres opéras traditionnels chinois.

 

Qiu Fuxin dans l’opéra du Sichuan « Deux collectes d’or » 《双拾黄金》

https://www.youtube.com/watch?v=mDnpephEhTQ

 

La vie de la troupe familiale, baptisée Xin You Xin (新又新 ), littéralement « Nouveau et encore nouveau », a longtemps été l’environnement familial de Qiu Jiongjiong : sa grand-mère maternelle Lin Zhigang (林志刚) y a rencontré son mari – elle est le sujet du film de 2011 « My Mother’s Rhapsody » (《萱堂闲话录》) –  et le père du réalisateur, Qiu Zhimin (邱志敏), était un restaurateur, et un conteur exceptionnel, qui est le sujet du tout premier film de Qiu Jiongjiong, « Moon Palace » (《大酒楼》)… et on le retrouve en chair et en os dans « A New Old Play ».

 

Qiu Jiongjiong a vécu à Leshan, avec son grand-père, jusqu’à l’âge de dix ans, et il a appris l’opéra avec lui.

 

 

Qiu Jiongjiong enfant apprenant l'opéra avec son grand-père

 

 

C’est tout cet univers bordant le fantastique que Qiu Jiongjiong a fait revivre dans son film, avec les moyens du bord, pourrait-on dire : toutes les ressources de son art de peintre et de son imagination de créateur au service d’un art de la scène aussi minimal que celui de l’opéra chinois.

 

·         Un film opératique

 

Le film est né d’un projet initial intitulé « Neo-New Adventures », titre du scénario que Qiu Jiongjiong a écrit de mai 2017 à février 2018, inspiré de l’appellation de la troupe de son grand-père. Il était au départ non-fictionnel, fondé sur les éléments biographiques de Qiu Fuxin. C’est en en faisant un « objet » cinématographique que Qiu Jiongjiong en a fait une fiction, extrêmement originale, en mêlant des inspirations de tous horizons, théâtre et cinéma, explicitement revendiquées, qui incluent aussi bien Fellini que Brecht et Tati, dans un cadre qui est celui de l’opéra du Sichuan, dans la langue originale, celle parlée à Leshan[3].

 

 

The Neo-New Adventures

 

 

Le scénario retrace donc l’histoire du personnage de Qiu Fu (丘福), alter ego du grand-père, dont est souligné le rôle de chou, ne serait-ce que par son maquillage (soulignant de blanc la base du nez), donnant à l’ensemble un esprit spécifique qui est celui de ces rôles dans l’opéra du Sichuan. Le film se déroule en séquences successives comme des actes dans un opéra, en partant de la séquence initiale (Qiu Fu arrivé aux portes du monde des Enfers), traitée sur un mode fantastique, mais opératique. Dès le départ, toute notion de réalisme est exclue, ajoutant un effet de distanciation entre scène et auditoire, comme chez Brecht, et laissant au spectateur le soin de décrypter les scènes par sa propre imagination, comme autrefois le faisaient les spectateurs des représentations données par les troupes d’opéra ambulant.

 

L’histoire se déroule en flashback à partir de cette séquence initiale, des années 1920, de la chute de la dernière dynastie à la période des seigneurs de la guerre, aux années 1980, en passant par toutes les grandes phases de l’histoire chinoise de cette moitié de siècle : guerre sino-japonaise, guerre civile, fondation de la République populaire, etc. Mais ce n’est qu’un cadre : ces événements historiques ne sont évoqués qu’indirectement, par les incidences qu’ils ont sur la vie de Qiu Fu et de son entourage, et sur la vie de la troupe qui change d’appellation avec les changements de régime.

 

 

La troupe, années 1920

 

 

Les tableaux successifs récréent une atmosphère sans vouloir être réalistes, comme le fait le théâtre. Chaque tableau pourrait avoir un titre. Ainsi, la fin des Qing est évoquée par une séquence qui pourrait être intitulée « l’ère de l’opium », avec un côté typiquement « décadent », et un côté caricature qui rejoint l’esprit « chou ».

 

 

La plaie de l’opium, « dans le passé »

 

 

Les tableaux suivants sont construits de la même manière, au gré des péripéties historiques qui influent sur l’identité des personnages. Le trait est souvent forcé, la satire d’une ironie souvent cinglante. Si la Révolution culturelle apparaît comme une mascarade et la Chine populaire comme un régime incapable de construire des murs droits, la Grande Famine est évoquée dans la pire de ses horreurs, mais sans dramatisation excessive ; c’est peut-être l’une des seules séquences où affleure un réalisme sans fard, à l’aune de cet épisode sanglant de la période maoïste qui reste un tabou intégral, que même les films les plus critiques, et interdits, n’ont jamais osé aborder, et en particulier dans des termes aussi crus et directs, même dans l’ironie, que ceux du film de Qiu Jiongjiong.

 

On se gardera bien d’en divulguer les détails, mais il faut saluer ce véritable défi à la censure, qui empêche le film d’être diffusé en Chine, sauf à le défigurer en supprimant l’inacceptable ou considéré comme tel.

 

Cette manière de concevoir le film va de pair avec sa mise en œuvre, volontairement minimaliste, et pas seulement faute de moyens : par impérative nécessité stylistique.

 

·         Un film « bouts de ficelle »[4]

 

Le film a été tourné en août 2019 à Leshan, la ville de Qiu Jiongjiong et de son grand-père, dans la vieille usine d’un ami où a été recréé un studio de fortune de 400 m2. C’était aussi le site du tournage du film précédent, « Mr. Zhang Believes » (《痴》), dont le titre chinois signifie « fou à lier ». Ce film, réalisé en 2015, préfigurait « A New Old Play » en tant que cinéma documentaire expérimental faisant état d’une histoire opposée à l’histoire officielle (celle des camps de laogai), dans une esthétique très stylisée, au niveau des couleurs autant que de la conception générale : une sorte de théâtre d’ombres. Pour ce film aussi une tente avait été construite sur le parking de l’usine en guise de studio.

 

 

A New Old Play, théâtre d’ombres

 

 

Pour « A New Old Play », Qiu Jiongjiong a repris l’idée de décors fabriqués et peints à la main, dans des matériaux naturels, bois, coton, tissu, pierre, briques, comme pour les représentations théâtrales d’autrefois, avec une exagération frisant l’absurde soulignant le fond du propos. Tout est visiblement faux, dans une esthétique expressionniste, pour induire un effet théâtral, avec l’effet de distanciation propre à la dramaturgie de Brecht. Un bateau hébergeant la troupe vogue sur une mer de tissu blanc agité à la main ; le fleuve de l’oubli est un tissu gris ; la distinction entre monde des vivants et monde des morts repose simplement sur la lumière, plus ou moins diffuse, plus ou moins claire, et sur la couleur des accessoires, noirs ou blancs. L’esthétique évoque souvent Jacques Tati avec une semblable maladresse voulue, savamment poétique.

 

 

Décors de théâtre

 

 

·         Un film familial

À cette esthétique théâtrale s’ajoutent la personnalité et le jeu des acteurs et des membres de l’équipe qui sont tous des parents, des proches ou des amis du réalisateur, comme les troupes de théâtre autrefois. Les acteurs sont non professionnels contrairement aux membres de la troupe qui sont des acteurs d’opéra du Sichuan.

- Le personnage principal de Qiu Fu (丘福) adulte est interprété par Yi Sicheng (易思成), un curateur de festivals de cinéma que Qiu Jiongjiong a rencontré au festival Yunfest et qui jouait un rôle mineur dans « Mr. Zhang Believes ».

- L’épouse de Qiu Fu, Tong Huafeng (桐花凤), est interprétée par Guan Nan (关南) et le double rôle du fils adolescent de Qiu Fu et de « Pattes de poulet » (鸡脚神), le cuisinier de l’auberge du Bossu, est joué par Xue Xuchun (薛旭春), tous deux spécialistes de l’organisation de festivals de cinéma, proches du réalisateur et du producteur Ding Ningyuan (丁宁远)[5].

 

 

Yi Sicheng et Guan Nan

 

 

- Gu Tao (顾桃), qui interprète le rôle du Bossu (Tuó’er 驼儿), serviteur de la troupe et ultérieurement aubergiste dans l’au-delà, est un documentariste indépendant ; son rôle a été tout spécialement conçu comme aphasique car Qiu Jiongjiong avait peur qu’il n’arrive pas à mémoriser son texte ; du coup il a imaginé un effet supplémentaire en ajoutant un surtitrage, comme dans les films muets des débuts du cinéma, mais un surtitrage très esthétique lui aussi.

 

 

Retrouvailles sur le pont des enfers, avec surtitrage (à g.)

 

 

- Qiu Zhimin (邱志敏) interprète le rôle de Liu Anren (刘安仁), dit le Vérolé (Ma’er 麻儿), fondateur de la troupe de théâtre Nouveau-Nouveau (personnage inspiré du seigneur de la guerre passionné d’opéra Ma’er chez lequel Qiu Xinfu s’est réfugié pendant la guerre) : c’est le père du réalisateur.

- Chen Haoyu (陈浩宇), Qiu Fu enfant, est un neveu. Il est étonnant de vie et d’entrain, et il ressemble en outre aux autoportraits au même âge peints par Qiu Jiongjiong[6].

 

Chen Haoyu (Qiu Fu enfant)

Autoportrait de Qiu Jiongjiong

 

 

- La musique du film est signée par un proche qui s’est étroitement inspiré de thèmes de l’opéra du Sichuan. Quant à Qiu Jiongjiong, il fait une apparition cameo à la fin du film, comme un clin d’œil, au moment où la troupe fait la queue pour aller boire la potion de l’oubli, avant de passer le fleuve et quitter le monde des morts. Il se pose ainsi comme un descendant de l’histoire familiale et de la lignée des chou.

 

·         Chronique historique et culturelle

 

Ces éléments personnels parachèvent la maîtrise formelle d’un film où rien n’a été laissé au hasard, y compris les dialogues en dialecte de Leshan qui ajoutent leur propre musique à l’ensemble. De cette formidable fresque émergent quelques grands thèmes à la fois historiques et culturels, mais traités pour leur incidence sur la vie de chacun.

 

- Chronique historique, de la chute des Qing à la fin de la Révolution culturelle, en passant par la période des Seigneurs de la guerre, la guerre sino-japonaise, la guerre civile, la fondation de la République populaire, la Grande Famine et la Révolution culturelle.

 

Le thème général est que l’Histoire se répète sans cesse, mais le film tend à montrer un contraste entre le destin individuel, porté par des personnalités vivantes et dynamiques, et le sort cruel et implacable que leur réserve l’Histoire. La narration met en relief les histoires individuelles, loin de l’idéologie et des phrases abstraites. L’impact en est d’autant plus fort. C’est le cas en particulier de la séquence sur la Grande Famine, contée sous l’angle très personnel d’un bébé abandonné, évidemment une petite fille, recueillie par Qiu Fu et nourrie, à grand peine, par sa femme, dont le sort est expliqué par la mère qui revient la chercher : toute la tragédie, et l’horreur, de la période est dite en quelques mots[7].

 

L’Histoire est évoquée à travers les souvenirs personnels, individuels et familiaux, cette « mémoire populaire » dont a parlé Michel Foucault en 1974, dans un entretien accordé aux Cahiers du cinéma, en désignant ainsi la mémoire de ceux qui n’ont pas les moyens de l’écrire eux-mêmes et de la diffuser[8]. Mémoire personnelle devenue « devoir de mémoire »[9]. Devoir évoqué de manière subliminale à la fin du film quand les membres de la troupe de théâtre, dont Qiu Jiongjiong, font la queue pour boire la potion de l’oubli (迷魂汤) de Meng Po (孟婆), avant de quitter le monde des morts.

 

C’est une nouvelle perspective pour aborder l’Histoire dans son aspect quotidien, qui inclut l’humour, même là où on l’attendrait le moins, et par exemple, encore, dans la séquence de la Grande Famine. Il y a un jeu à la fois sur le concret et sur la métaphore, un détail particulier prenant un sens symbolique, en particulier grâce à l’esthétique minimaliste du film.

 

 

Souvenirs du monde des morts

 

 

- La culture du Sichuan est le cadre et l’objet de cette saga familiale contée comme un opéra, opéra du Sichuan dont le langage est réinventé et modulé. Le film y gagne une dimension d’œuvre classique, mais enracinée dans la culture populaire locale, et rendue de manière très vivante par l’utilisation du dialecte de Leshan. On peut le comparer à la création d’une tradition d’anglais vernaculaire par Chaucer, mais qui prend un sens tout particulier dans la Chine d’aujourd’hui où l’on voit les dialectes prendre une place croissante tant en littérature qu’au cinéma, en remettant en valeur les cultures locales.

 

- Liée à cette culture est la vision de la mort des Sichuanais, qui prend des formes plus souples que globalement dans la tradition chinoise, en cherchant à établir une harmonie entre tristesse et joie. Le film tout entier est en fait le processus par lequel Qiu Fu se prépare à passer le pont Naihe (奈何桥) et quitter la « ville des morts » (Fengdu 丰都城), en se remémorant une dernière fois les événements de sa vie passée.

 

On est plongé dès la première séquence dans cette mythologie revue et corrigée de manière humoristique : Qiu Fu est accueilli par les deux gardiens de la porte des enfers que sont, selon la tradition, « Tête de bœuf » (牛头) et « Face de cheval » (马面), qui sont chargés de l’emmener, à son corps défendant, devant le roi des enfers, Yanluo Wang (阎罗王).

 

On pense au « Septième jour » (《第七天》) de Yu Hua (余华), mais un « Septième jour » qui serait adapté en opéra du Sichuan par un dramaturge désargenté, mais inspiré. Et refusant les sirènes de la censure en préférant renoncer à une sortie nationale afin de préserver son œuvre dans son intégrité.

  


 

À lire en complément

 

L’entretien avec le producteur Ding Ningyuan par dGenerate.

L’article (illustré) de The Paper (en chinois).

Interview par Shelly Kraicer.

 


 


[1] Il est décédé le jour de la fête des bateaux-dragons en tombant accidentellement d’un 6ème étage où il était monté, après avoir un peu bu, pour admirer les lanternes de la fête.
Source :
The Paper
.

[2] Souvent traduit par « clown », mais faute de mieux.

[3] « A New Old Play » est le deuxième film chinois à être tourné en dialecte sichuanais, après « Conscription » (Zhua Zhuangding《抓壮丁》), coréalisé par Chen Ge et Shen Yan (陈戈 / 沈剡). Le film relate la conscription forcée par les Nationalistes dans les campagnes du Sichuan pendant la guerre sino-japonaise. Sorti en 1963, il a été réalisé au lendemain de la Grande Famine, dans le contexte du retour de Mao sur la scène politique, et de la propagande visant à faire oublier la catastrophe provoquée par le Grand Bond en avant.

[4] Il me fait en effet penser à un souvenir de la fin des années 1990 : les constructeurs automobiles français cherchaient à imiter les prouesses de l’industrie automobile japonaise, or les Japonais étaient aussi très fiers de montrer ce qu’ils arrivaient à faire dans leurs vieilles usines. On faisait ainsi visiter aux ingénieurs français l’une des plus vieilles usines Honda qui était aussi l’une des plus performantes : on l’avait appelée « l’usine bouts de ficelle ».

[5] On notera également l’autre producteur, rarement cité : Yang Jin (杨瑾).

[6] Mais tout le film dérive des peintures du réalisateur.

[7] Qui font penser à la nouvelle d’A Cheng « Fumée de cuisine » 《炊烟》. On ne trouve pas de films sur la Grande Famine, mais il y a très peu de textes aussi.

[9] « Notre temps a inventé le devoir de mémoire » (René Rémond).

 

 

     

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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