|
Le film de Liu
Jian déprogrammé du festival d’Annecy à la demande du
producteur
par Brigitte Duzan, 14 juin 2017
C’est avec des réactions contradictoires que le
public et les spécialistes ont appris, par une
annonce laconique sur le site du festival le 2 juin,
que « Have
a Nice Day
» (《好极了》),
le second film du réalisateur chinois de films
d’animation
Liu Jian (刘健),
a été déprogrammé du festival de films d’animation
d’Annecy qui se tient du 12 au 17 juin. |
|
Have a Nice Day
(affiche de la Berlinale) |
Liu Jian à Berlin |
|
Les réactions ont d’abord été négatives, accusant
les organisateurs du festival de céder aux pressions
exercées par les autorités chinoises. La réalité est
moins simple, et plus représentative de l’air du
temps.
En fait, les autorités ont fait pression sur le
festival à de multiples reprises. Le film est quand
même une satire féroce de la société chinoise
actuelle, où une pléthore de gens sont prêts à tout
pour mettre la main sur un sac contenant un million
de yuans qu’a fauchés un employé à son patron pour
tenter d’amadouer sa fiancée. On connaît ce genre
d’intrigues, c’est amusant quand c’est traité en
comédie, comme c’est souvent le cas. Mais ici, on
peut faire confiance à Liu Jian, la comédie se fait
noire, et même macabre.
Pourtant, malgré les pressions, le festival n’a pas
cédé. Le film est d’ailleurs sorti à la
67ème Berlinale en
février dernier. |
Mais, entre-temps, une nouvelle loi est entrée en
vigueur en Chine, qui oblige les producteurs à
obtenir un visa de sortie pour pouvoir présenter les
films qu’ils ont produits dans des festivals
étrangers.
Dans le cas de Liu Jian, selon le festival d’Annecy,
c’est le producteur lui-même qui a demandé aux
organisateurs du festival de retirer le film du
|
|
Une société
coupe-gorges |
programme – ce qui est ambigu car le principal producteur
est Le Joy Animation Studio, fondé par
Où tout le monde est
un peu gangster |
|
Liu Jian lui-même en 2007. C’est en fait toute
l’équipe du film qui est visée. On imagine les
menaces auxquelles ils ont dû être soumis, y compris
leur famille et leurs proches. Aujourd’hui plane
toujours le risque de se retrouver en prison, accusé
de nuire à la sécurité du pays ou de fomenter des
troubles, sans pouvoir se disculper ni accéder aux
services d’un avocat. |
On comprend donc, dans ces conditions, la décision du
festival d’Annecy. Mais avec quelque effroi quant à la
situation des réalisateurs en Chine. Ah les beaux jours !
|
|