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Hu Wei 胡伟
Présentation
par Brigitte
Duzan, 14 décembre 2013, actualisé 15 janvier 2018
Hu Wei est l’un
des ces jeunes réalisateurs chinois de la génération
« post-80 » formés hors du moule de l’enseignement
strictement chinois, dont le regard et l’esthétique
témoignent d’une profonde originalité, nourrie de sources
très diverses.
Un cursus en
quatre étapes et deux courts métrages
Hu Wei est né en
1983 à Pékin. C’est là qu’il a commencé sa formation de
cinéaste à l’Université normale de Pékin (北京师范大学)
dont il est sorti au bout de quatre ans, en 2006. Il est
ensuite venu en France poursuivre ses études.
En 2008, il a suivi
un programme d’été de trois mois sur le documentaire, à la
Femis, l’école nationale
supérieure des métiers de l'image et du son, à Paris.
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Hu Wei |
Pour son travail de
fin d’études, il a réalisé un court métrage documentaire de
23’, « Sans toi » (《没有你在》),
pour lequel il a suivi pendant plusieurs semaines une
immigrée chinoise dans les rues de Paris :
Sans toi |
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arrivée en France
depuis sept ans, mais ne parlant toujours pas français, elle
vit, seule, sans papiers, en fouillant les poubelles des
quartiers huppés de la capitale, et en revendant ses
trouvailles au marché noir à Belleville, ce qui lui permet
de payer les études de son fils en Chine – une « glaneuse »
comme sortie de l’univers d’Agnès Varda.
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Le documentaire a
été présenté en 2009 au festival Cinéma du réel à Paris.
Cette même année
2009, Hu Wei est entré à l’Ecole nationale supérieure des
Beaux-Arts, à Paris, pour suivre le programme post-diplôme
La Seine. A la fin de ce cursus, il est ensuite allé à
Tourcoing, au Studio national des arts contemporains Le
Fresnoy qui héberge aussi un programme de formation dont
l’objectif est surtout de permettre aux jeunes artistes
sélectionnés de réaliser leurs propres œuvres avec des
moyens techniques adéquats.
C’est dans ce cadre
que Hu Wei a réalisé, en 2012, son premier court métrage de
fiction, de 23’ : « Le propriétaire ». Le jour de la
Fête du printemps, un immigré chinois à Paris entreprend des
démarches pour obtenir sa carte de séjour, mais celles-ci
échouent à cause d’un certification de domiciliation bientôt
périmé. Il part alors en quête d’un certain Ding, dont
dépend l’obtention du papier idoine, mais Ding est
introuvable…
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Le propriétaire |
On est passé de
l’univers de Varda à celui de Beckett, ou de Borges :
l’homme sans nom poursuit sa quête avec une opiniâtreté sans
émoi, même confronté à des événements étranges qu’il se
borne à photographier, jusqu’à ce que les dernières
séquences nous le montrent sous un jour plus inquiétant ; le
film vire alors à la série noire, le superbe noir et blanc
venant apporter une touche expressionniste qui renforce le
malaise ; mais c’est surtout le malaise de ne pas réussir à
cerner un personnage qui reste un mystère.
Avec ce court
métrage, Hu Wei définit une méthode et un style : un
scénario très bien écrit au départ, et une réalisation aux
confins du documentaire et de la fiction, avec un sens
consommé de l’image, dans une esthétique parfaitement
adaptée à son sujet.
Le propriétaire,
bande annonce
http://vimeo.com/45499108
La lampe au beurre
de yak…
La lampe au beurre de
yak |
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C’est en 2010, et
sur un scénario écrit dès 2004, que Hu Wei a commencé la
préparation du court métrage de fiction qui, après bien des
difficultés, est sorti en 2013 et a rencontré depuis lors un
succès bien mérité dans nombre de festivals, après avoir été
présenté à la 52ème Semaine de la critique au
festival de Cannes :
« La lampe au
beurre de yak » (《酥油灯》).
Sans longueurs superflues – il ne dure qu’un petit quart
d’heure – le film marque un pas supplémentaire dans la
carrière de Hu Wei : il témoigne toujours d’une attention
particulière au scénario, mais développe ici une conception
artistique très personnelle, au confluent de la
photographie, de l’image en mouvement et de l’art plastique.
Il a été couronné du Prix du
meilleur court
métrage au festival du Golden Horse à Taipei, le 23 novembre
2013.
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… Et après
2014-2015 : Villa
Médicis
Hu Wei a ensuite
été sélectionné parmi les candidats à une résidence à la
Villa Médicis, l’Académie de France à Rome, et il a été l’un
des dix-sept pensionnaires de la Villa, pendant l’année
2014-2015. Le projet de sa résidence consistait dans
l’écriture du scénario de son premier long métrage de
fiction. La promotion de cette année était accompagnée par
le philosophe italien Giorgio Agamben, chargé de donner des
conférences, organiser des séminaires, favoriser les
échanges entre les pensionnaires et les aider dans leurs
recherches.
Hu Wei a en fait trois projets de longs
métrages, sur la communauté chinoise de Paris, mais avec des
options stylistiques différentes. Son projet le plus avancé,
« Beyond the Dawn », a fait partie du programme Next Step
2015 de la Semaine de la critique, à Cannes, qui réunissait
dix jeunes réalisateurs
.
2016 : Nouveau
court métrage
Pendant ce
temps, Hu Wei a également préparé un nouveau court
métrage, de 19 minutes, « Ce qui nous éloigne »
(《人生若只如初见》) ;
produit par Ama Productions, la société de Julien
Féret, il a été tourné à Paris. Il a été projeté
lors de la 73ème édition de la Biennale
de Venise en août 2016, dans la section Orizzonti,
puis, en février 2017 au festival de
Clermont-Ferrand, et à la Cinémathèque française, à
Paris, le 5 juin 2017, lors d’une séance spéciale de
sept courts métrages, présentée par Jacques Kermabon
.
Le film a
pour thème la première rencontre entre une jeune
fille qui a été élevée en France, par une famille
française, et ses parents biologiques, chinois. Mais
il se situe au moment où ces derniers se préparent à
repartir, après le choc émotionnel de leur
confrontation. C’est un fragment de vie dont Hu Wei
nous laisse libre d’imaginer l’avant et l’après.
C’est aussi, |
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Ce qui nous éloigne,
affiche de la Biennale |
récurrente chez
lui, l’exploration des frontières entre deux cultures et
deux mondes.
Le court métrage
bénéficie de l’interprétation de grands acteurs, dont
Isabelle Huppert et André Wilms.
Filmographie
Courts métrages
2006 Mon père sait
voler
2009 Sans toi
《没有你在》
2012 Le
Propriétaire
《业主》
2013
La Lampe au beurre de yak
《酥油灯》
2016
Ce qui nous éloigne 《人生若只如初见》
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