Sun Xun
孙逊
Présentation
par Brigitte Duzan, 02 janvier 2017
Sun Xun (孙逊)
est aujourd’hui l’un des artistes en vue du
renouveau du film d’animation en Chine.
Il est né en 1980 à Fuxin, dans le Liaoning (辽宁阜新),
mais a fait ses études à l’Institut des Beaux-arts
de Hangzhou. C’est en 2006 qu’il a fondé son
« Studio d’animation Pi » (丌格动画工作室)
et depuis
lors, ses œuvres, tant picturales que
cinématographiques, ont fait le tour des grands
musées et des festivals de cinéma. Certaines de ses
œuvres ont ainsi été programmées dans |
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Sun Xun |
le cadre du
festival Shadows en octobre 2008, à Paris, tandis que la
galerie ShanghArt exposait des œuvres de Sun Xun à la FIAC.
2006-2008
Pour créer ses
animations, Sun Xun réalise des centaines de dessins
individuels, qui incorporent souvent des textes dans
l’image, sur des sujets qui sont le plus souvent historiques
et politiques. Puis il filme les dessins, l’un après
l’autre, pour donner une idée de mouvement, suggérer le
passage du temps ou les machinations de l’histoire. Les
œuvres réalisées pour la préparation des films sont
elles-mêmes des œuvres d’art à part entière, présentées
parallèlement aux films eux-mêmes, dans musées et galeries.

Coal Spell |
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En 2006, à
la biennale de Shanghai, il a inauguré une manière
très vivante d’initier le public à une démarche
créatrice qui participe autant de l’art graphique
que de l’animation. L’idée a ensuite été reprise et
développée à Pékin pour la création de « Coal
Spell » (《黑色咒语》) ;
le Platform China Contemporary Art |
Institute
a réalisé au printemps 2008 une exposition d’œuvres de Sun
Xun sur deux mois : pendant le premier, l’artiste a d’abord
tenu un studio public où l’on pouvait le voir réaliser les
sketchs préparatoires du film ; les œuvres réalisées ont
ensuite été exposées pendant le mois suivant. En
juin-juillet 2008, le Hammer Museum de Los Angeles a
appliqué la même méthode dans le cadre de son programme
d’artistes en résidence.
« Coal Spell »
relate l’histoire de Fuxin, la ville natale de Sun Xun comme
une sorte de variation sur un billet de banque (un ancien
billet de 5 yuans). Dans une ville mystérieuse et sombre,
parcourue par des tempêtes de sable, des nuées de fumées
noires s’échappant d’immenses cheminées d’usines cachent le
soleil ; les slogans idéologiques retentissent
quotidiennement pour rappeler les esprits à l’ordre et
brider leur curiosité du monde extérieur ; la ville est
ainsi une prison où l’histoire est enfermée.
Evoquant le monde
d’Aldous Huxley (《美丽新世界》),
le film est un hommage à la ville où Sun Xun a vécu son
enfance, et où il a commencé à douter de l’histoire telle
qu’on la lui inculquait. C’est une sorte de condensé de ses
thèmes favoris.
Car le monde de
Sun Xun est un univers très sombre, manipulé par des
magiciens et habité par le mensonge, peuplé d’animaux
monstrueux et menaçants, où dominent le noir du néant et le
rouge des flammes, où les murs se fissurent inéluctablement,
où les fumées d’usines se mélangent aux volcans en
irruption, où la guerre est toujours imminente et l’humanité
constamment menacée. Un univers très pesant de cataclysme
latent, magnifié encore par la musique, signée Jin Shan (金闪)
.
Coal
Spell
http://back.shanghartgallery.com/videos/13279.swf
Le site de la
galerie ShanghArt de Shanghai comporte des vidéos d’une
bonne partie des courts métrages réalisés par Sun Xun à
partir de 2004. Il manque juste « Heroes No Longer » qui est
lui aussi caractéristique de ses thèmes et de son style.
Satire impitoyable de la fabrication de l’histoire par un
régime autoritaire, la Chine pour ne pas la nommer, il
commence par les actualités de 1959 : l’Union soviétique est
victorieuse, la production de charbon de la Chine a dépassé
celle de l’Angleterre – c’est la période du Grand Bond en
avant – puis changement de décor : des mourants à l’hôpital
tandis que des corbeaux les surveillent, perchés sur des
fils électriques – image de la grande famine qui a suivi….
La musique, triomphale d’abord, se met peu à peu à
dérailler, comme un vieux 33 tours qu’on n’aurait pas
branché à la bonne vitesse….
2004 “Utopia in
the Day”
《日常乌托邦》
(4mn14s) est en 5
parties : ampoule, toupie (où un marionnettiste tire les
fils du monde), eau courante, échecs et réveil (où le monde
est détruit – dans l’obscurité finale, une main allume une
allumette…)
http://back.shanghartgallery.com/videos/8019.swf
2005 “Magician
Lie”
《魔术师的谎言》
(4mn14s) :
animation sur des visages traités comme des masques et un
corps nu maculé de terre sur lequel se meuvent des signes
semblables à des scarifications tribales – séance
d’exorcisme ou magie guerrière, on ne sait trop.
http://back.shanghartgallery.com/videos/8015.swf
2005 “A War
of Chinese Words”
《文字元年战役》
(2mn)
: des caractères chinois se muent en soldats, chevaux, chars
de combat antiques, et se font la guerre.
http://back.shanghartgallery.com/videos/11145.swf
2006
“Lie” (7 mn 20 s) : un espace indéterminé est habité
par un personnage portant un chapeau haut de forme (figure
récurrente chez Sun Xun, représentant le magicien/politicien
manipulateur des foules ; il est éclairé par la lune qui
brille à travers les barreaux de la fenêtre ; peu à peu,
cependant, les murs commencent à afficher des figures
inquiétantes qui se développent, et les créatures qui
naissent de ces formes étranges se transforment en bombes…
http://back.shanghartgallery.com/videos/8017.swf
2006 “Mythos”
《异邦》(12mn36s) :
en 2 parties, Mythos et les paroles de Mythos, collage
voulant représenter des souvenirs personnels tout autant que
la mémoire collective (le mythe). L’histoire est découpée en
tranches, l’univers est finalement la proie de flammes
rougeoyantes qui dévorent peu à peu les visages de photos
jaunies… effaçant la mémoire qu’elles tentaient de
préserver.
http://back.shanghartgallery.com/videos/43285.swf
2007 “Requiem”
《安魂曲》
(7 mn 21 s) : requiem pour un monde à l’agonie, où les rues
sont en flammes et le ciel envahi par des espèces de
moustiques géants qui survolent la ville comme des
hélicoptères menaçants.
http://back.shanghartgallery.com/videos/8013.swf
2008 “New China”
《新中国》(5mn19s)
: pas du tout harmonieuse, la nouvelle Chine de Sun Xun !
Notez le slogan final : « In magician we trust ».
http://back.shanghartgallery.com/videos/13248.swf
Il s’agit là d’un
cinéma d’avant-garde, expérimental. Sun Xun a su créer un
style, un univers et un ton très particuliers, centrés sur
la critique de l’histoire et la satire politique. Tous ces
films sont en fait des variations sur quelques thèmes de
base. Et ils sont le résultat de travaux préparatoires longs
et précis.
Travaux
préparatoires pour les films Lie et Coal Spell
http://www.shanghartgallery.com/galleryimage/image/24729/pdfview
Depuis 2008
Il a poursuivi sur
la même thématique depuis lors, en variant les modes
d’expression à un rythme effréné.
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Tale of Tales, 2014 :
l’Apocalypse |
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En 2010, il
présente la vidéo de 10 mn « Clown’s Revolution », au
Festival d’animation de Hollande, ses clowns étant des
poètes à la
Yang Fudong (杨福东),
à la poursuite, toujours, d’une réalité utopique.
http://back.shanghartgallery.com/videos/25859.swf
En octobre
2012, une nouvelle vidéo, « Some Actions Which
Haven’t Been Defined Yet in the Revolution » (《魔术师党与死乌鸦》),
a été projetée à la Onscreen Biennal de UCLA. Ce
sont des gravures sur bois animées, utilisant des
images pulsées donnant un effet hallucinatoire, et
créant une atmosphère angoissante.
En 2013,
il crée la vidéo d’un peu plus de 9mn « Magician
Party and Dead Crow » (《魔术师党与死乌鸦》)
qui poursuit le thème récurrent dans son œuvre
depuis |
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Time Vivarium |
2005. En 2014, il
donne deux expositions très colorées sur le thème de
l’histoire : « Time Vivarium »

Time Vivarium |
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(《时间公园》)
à New York et « Palimpsestes » à ShanghArt
Singapour.
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Palimpsestes |
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En 2015, il
présente un nouveau court métrage d’animation au festival de
Hollande : « Republic of Jing Bang ». Et d’avril à juin de
la même année, il travaille sur « The Script », un projet de
théâtre en résidence à Hangzhou.
http://www.shanghartgallery.com/galleryarchive/exhibition.htm?exbId=9022
En mai 2016, il
expose au Festival du court métrage d’Oberhausen, en
Allemagne, les œuvres picturales réalisées pour son nouveau
film : « The Secondary Republic » (《第二共和国》)
et, fin novembre, à Miami, sa nouvelle œuvre monumentale,
« Reconstruction of the Universe ».
The Secondary
Republic
http://www.shanghartgallery.com/galleryarchive/exhibition.htm?exbId=10388
Reconstruction of
the Universe
http://www.art-ba-ba.com/main/main.art?threadId=93876&forumId=8
Liste des œuvres,
expositions et projets depuis 2002 sur le site de la galerie
ShanghArt
http://www.shanghartgallery.com/galleryarchive/artist.htm?artistId=59§ion=bio
站台中国,
une galerie pékinoise située à Dashanzi, au nord de
la capitale, dans cette fameuse friche industrielle
transformée en vitrine moderniste de l’art
contemporain, l’espace 798 ou
798 艺术工厂.
Jin Shan
est un artiste multidisciplinaire, musicien et
compositeur, mais aussi lui-même auteur de films
vidéos assez provocateurs, dont l’un des plus
célèbres est « Water Division ».
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