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Xu Xin 徐辛
Présentation
par Brigitte Duzan,
5 décembre 2011,
actualisé 26 mars 2017
Xu Xin (徐辛)
est né en 1966, à Taizhou, dans le Jiangsu (江苏泰州).
Il a fait
des études de peinture à l’école des Beaux-Arts de
Nankin et s’est d’abord consacré à la photographie.
Après avoir obtenu son diplôme, en 1991, et
participé à un certain nombre d’expositions, il a
créé en 2000 son propre studio de production et
réalisé son premier documentaire en 2002.
Ses sujets
sont des petites gens, des faibles et des marginaux
sociaux. Il a dit que, pour lui, faire des
documentaires était un moyen de participer à la
marche de l’histoire. Mais c’est aussi un moyen de
lutter contre l’oubli et de préserver le souvenir du
passé, un passé souvent méconnu et douloureux.
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Xu Xin |
Outre un court
métrage de 18 minutes en 2004, « Carriage » (《车厢》),
ses quatre principaux longs métrages documentaires
participent de ce double objectif :
2002 : « Peau de
cheval » (《马皮》).
Peau de cheval |
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Il s’agit
d’un documentaire sur des pratiques rituelles plus
ou moins superstitieuses, et assez spectaculaires,
qui ont lieu lors de grandes réunions populaires
dans un temple du village de Maoshan, près de sa
ville natale de Taizhou (泰州茅山镇).
Les pratiquants utilisent de la peau de cheval pour
former des sortes de piques pointues dont ils se
percent les joues, et défilent ainsi dans les rues.
Xu Xin filme le rituel d’un regard neutre, sans
juger, mais s’intéresse beaucoup plus aux relations
qu’entretiennent entre eux les gens qui y
participent, ce qui sera ensuite l’une des
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caractéristiques
essentielle de ses documentaires, le suivant en particulier
dont le sujet est très proche.
2005 : « L’église
de Fangshan » (《房山教堂》).
L’église
de Fangshan est une église chrétienne qui a été
construite dans la petite ville du même nom, au nord
du Jiangsu, grâce à des fonds envoyés de Taiwan. Xu
Xin filme la communauté des fidèles qui viennent là
prier et chanter. La séquence initiale donne le
ton : c’est un montage d’une série de gros plans sur
des visages recueillis, en noir et blanc, émettant
un long murmure continu de prières qui vont se
fondre dans le paysage.
Xu Xin
montre la petite église et sa
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L’église de Fangshan,
lecture |
congrégation,
d’humbles disciples à la vie sans surprise, avec les petites
querelles habituelles de clocher, justement ; il suit un
couple chez eux, exceptionnellement, les filme lisant des
histoires de la Bible, en tête à tête, jusqu’à ce que le
mari meure et que son épouse le pleure avec dévotion ; mais
le grand moment est la cérémonie dominicale, église au
complet, après quoi tout le monde se disperse à vélo pour
regagner ses pénates, et la caméra s’attarde, monte le long
de la nef, jusque sous la voûte, vide…
2006 : « Les
troupes à la torche » (《火把剧团》).
Les troupes à la
torche |
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« Les
troupes à la torche » sont des troupes d’opéra du
Sichuan (川剧班子)
qui, interdites pendant la Révolution culturelle, se
produisaient la nuit, à la lumière de torches, d’où
leur nom. Aujourd’hui, et depuis les années 1990,
elles sont en train de disparaître, avec les maisons
de thé où elles se produisaient. Xu Xin est allé à
Chengdu en filmer deux survivants : Li Baoting (李保亭),
qui a appris le métier dès l’âge de huit ans, et
Wang Bin (王斌)
– chaque représentation nécessite une dizaine
d’acteurs, le prix du billet est de trois yuans, et
cela comprend un yuan
pour le thé…
Difficile de survivre dans ces conditions. |
Xu Xin rend un
hommage attristé à des artistes dont l’art se meurt, et
transmet leur amertume par une petite phrase qui apparaît
sur les affiches : « Quand les troupes d’opéra mettent la
clé sous la porte, c’est une humiliation pour les acteurs »
(“剧团关门,演员可耻”).
2010 :
« Karamay »
(《克拉玛依》).
C’est « Karamay »
qui a rendu Xu Xin célèbre, ce formidable documentaire sur
l’incendie tragique de la salle des fêtes de la ville du
même nom qui a coûté la vie à près de trois cents enfants,
et dont la mémoire a été très vite occultée par des
autorités soucieuses de ne pas se voir impliquées dans
l’affaire.
Un scandale
à méditer, et un documentaire de six heures qui a
fait le
tour du monde en glanant partout
l’admiration, mais toujours interdit en Chine.
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« Karamay », affiche |
2011 :
« Pathway »
(《道路》).
« Pathway
», affiche |
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C’est en juin
2011 que Xu Xin a annoncé sur son blog la sortie de ce
nouveau documentaire. C’est le portrait de toute une
génération, à travers celui, emblématique, d’un vieil homme
qui raconte calmement cinquante ans de sa vie devant la
caméra, de son entrée au Parti, en 1941, aux lendemains de
la Révolution culturelle.
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Il n’est pas seulement question de la campagne
anti-droitière, c’est toute l’absurdité d’une époque qui
transparaît à travers le récit qui nous est conté.
2017 :
«
A Yangtze Landscape » (《长江》)
Xu Xin
poursuit sa réflexion sur l’histoire, et la violence
de l’histoire, en remontant le cours du Yangtsé, de
son embouchure à Shanghai, jusqu’à sa source au
Qinghai, au mont Tanggula (各拉丹东),
en passant par Nankin, Wuhan, le barrage des
Trois-Gorges, Chongqing, Yibin.
Le style
est résolument non narratif, privilégiant l’image,
accompagnée et soulignée par |
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A Yangtze Landscape |
une musique
expérimentale contrastant avec les bruits enregistrés pour
créer une atmosphère au-delà du réel. Xu
Xin poursuit ses recherches dans le sens d’un documentaire
avant-gardiste qui va au-delà du concept de « caméra stylo »
intronisé par Alexandre Astruc.
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