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John Woo / Wu Yusen 吴宇森
Présentation
par Brigitte
Duzan, 16 avril 2012, actualisé 12
avril 2015
John Woo
est généralement considéré comme le maître du cinéma
d’action de Hong Kong. Il fut aussi un enfant
misérable, et un génie précoce du cinéma. Sa
carrière ne fut pas aussi facile et linéaire que
l’on pourrait le penser, mais son œuvre est devenue
un classique et une référence.
Fils
d’immigrés à Hong Kong
Il
s’appelait Wu Yusen
(吴宇森)
et est né à
Canton le 1er mai 1946. Mais, quand il
n’avait encore que cinq ans, en 1951, ses parents
fuirent à Hong Kong pour échapper aux purges
anti-bourgeoises des premières années du régime
communiste.
Le cinéma
comme refuge |
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John Woo à Cannes, en
2005 |
La famille se
retrouva dans le quartier de Shek Kip Mei, à New Kowloon,
immense bidonville où s’installèrent à l’époque les
immigrants chinois venus du continent, comme eux. Ils furent
totalement ruinés par l’immense incendie qui détruisit le
bidonville en 1953. Qui plus est, le père de Wu Yusen, qui
était enseignant, était atteint de tuberculose et ne pouvait
pas travailler.
L’enfant bénéficia
de l’aide d’une organisation protestante et entra dans une
école luthérienne. Il pensa un temps devenir prêtre, mais, à
défaut, se tourna vers le cinéma comme havre de paix et de
réconfort. L’entrée étant gratuite pour les enfants s’ils
étaient accompagnés par un adulte, sa mère l’emmenait
souvent au cinéma avec elle, et lui instilla l’amour du
septième art. Il a expliqué plus tard :
« Quand j’avais
onze ans, nous étions pauvres, mais ma mère adorait le
cinéma occidental et elle m’emmenait avec elle… J’étais
fasciné par les musicals, je pense que c’est ce qui a exercé
la plus forte influence sur moi… Je rêvais de devenir un
jour cinéaste… »
Les films
de Fred Astaire et les westerns sont autant de films
qui reviennent souvent dans ses souvenirs ; mais
c’est « Butch Cassidy and the Sundance Kid »,
surtout, avec Paul Newmann et Robert Redford en
pilleurs de banques et dévaliseurs de convois, qui
laissa en lui l’impression la plus durable : l’image
des deux hommes s’enfuyant en tirant, un pistolet à
chaque main, est l’une des premières sources
d’inspiration d’une des scènes récurrentes de ses
films.
Par la
suite, il fut fortement impressionné par la Nouvelle
Vague française et par les films de gangster,
surtout ceux de Jean-Pierre Melville : « Le
Samouraï » (1967) est l’un de ses films culte, et
il rêve toujours de faire un remake du « Cercle
rouge » (1970).
Premiers
courts métrages expérimentaux
En
attendant, adolescent, il entre au collège Mateo
Ricci. En |
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Butch Cassidy and the
Sundance Kid |
1968, il emprunte
du matériel et commence à réaliser des courts métrages
expérimentaux en 8 mm avec des amis : le premier, « The Evil
One », a été perdu ; pour le second, « Dead Knot » (《死节》),
il n’était que coréalisateur, mais le troisième, « Accidentally »
(《偶然》)
est véritablement son premier essai au cinéma.
John Woo lui-même
interprète le rôle principal : un jeune adolescent qui tente
de capter l’attention et les faveurs d’une jeune fille, muse
élusive qui se laisse attacher, le temps d’un poème, accepte
des fleurs, mais finit par disparaître… . La musique,
électronique, est signée du musicien britannique Brian
« Lustmord » Williams.
John Woo se
représente ainsi comme un jeune garçon timide et introverti.
Le cinéma était pour lui un moyen d’explorer les sentiments,
un langage pour s’exprimer. Mais il n’y avait pas d’école de
cinéma à Hong Kong, à l’époque : il vola des livres sur le
cinéma à la bibliothèque, des livres théoriques sur le
montage et la mise en scène. Mais il avait déjà une idée du
metteur en scène comme auteur, révolutionnaire dans le
contexte de l’époque, en Chine comme à Hong Kong.
L’année
suivante, en 1969, il réussit à se faire embaucher
aux studios Cathay. Ce n’était que pour superviser
les scénarios, mais c’était un premier pas. Il avait
vingt-trois ans.
Première
carrière à Hong Kong
En 1971, il
devient assistant réalisateur aux studios des Shaw
Brothers, où il a pour mentor le célèbre réalisateur
de films d’arts martiaux :
Chang Cheh
(张彻).
Premiers
films de kungfu
John
Woo y réalise son premier film en 1974 : « The
Young Dragons » (《铁汉柔情》).
C’est un film de kungfu, où |
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The Young Dragons |
Jackie Chan est
coordinateur des combats, et où John Woo fait preuve de
beaucoup de dynamisme dans

Hand of Death |
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les
mouvements de caméra. Mais les Shaw Brothers
trouvent le film trop violent ; il doit attendre
deux ans avant de sortir. Mais, quand il finit par
sortir, c’est un succès.
Du coup, le
studio Golden Harvest engage le jeune réalisateur
pour lui confier d’autres films d’arts martiaux.
C’est ainsi qu’il réalise « Hand of Death » (《少林门》)
en 1976, à nouveau avec Jackie Chan, cette fois en
tant qu’acteur, mais aussi avec la future superstar
de Hong Kong, Sammo Hung.
Ce film est
un pas de plus dans la carrière de John Woo car il
en a aussi écrit le scénario. Dans une industrie qui
reconnaissait plus l’expérience que le talent, et où
les réalisateurs ne commençaient guère à tourner
leurs propres films avant la quarantaine, John Woo
apparut comme un jeune prodige. |
Comédies
Après
cette phase initiale, en 1977, il réalise une
comédie, avec l’acteur populaire Ricky Hui :
« Money Crazy » (《发钱寒》) ;
grand succès, le film consacre John Woo comme
réalisateur de comédies. Pourtant, l’année
précédente, il avait expérimenté l’adaptation
d’opéra, avec « Princess Chang Ping » (《帝女花》),
puis, en 1978, il se tourne vers le film d’arts
martiaux genre
Chang Cheh : « Last Hurrah for
Chivalry » (《豪侠》).
Mais on lui
demande de faire des comédies, au rythme de
plusieurs par an. Fatigué de ces productions
insipides, au début des années 1980, John Woo
travaille sous un pseudonyme pour le petit studio
Cinema City de Taiwan où il trouve des cinéastes
plus entreprenants et novateurs avec lesquels il se
sent des affinités. Mais ces allers-retours ne le
distraient pas suffisamment de l’ennui qu’il ressent
à Hong Kong, il se met à boire. |
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Money Crazy |

Princess Chang Ping |
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Le seul
film qui fasse exception, dans la grisaille de ces
années 1980 est, en 1983, « Heroes Shed no Tears »
(《英雄无泪》), ni kunfu ni comédie, mais une histoire extrêmement violente de
mercenaires envoyés au Vietnam pour capturer un
mafieux local qui fait du trafic de drogue. John Woo
est très content de son film, mais, jugé à nouveau
trop violent, il est encore remisé, puis coupé,
remonté, au point que John Woo refuse de le
reconnaître pour sien.
Le
réalisateur est à un point de non retour : il est en
désaccord total avec l’équipe de la Golden Harvest ;
ses comédies sont ratées, tout le monde pense qu’il
est fini, et lui qu’il n’arrivera jamais à réaliser
les films qu’il veut faire. Il plie bagage et part
avec femme et enfants à Taiwan, travailler au studio
Cinema City comme administrateur du bureau de
production. |
Il doit encore y
superviser deux comédies, mais, grâce au directeur du
studio, il rencontre
Tsui Hark qui est alors l’une des
chevilles ouvrières du studio taiwanais.
Cinema City et Tsui
Hark
1. Ils se
trouvent partager tous deux la même perception : que
Hong Kong avait perdu toute valeur morale, et que
les jeunes, en particulier, n’avaient plus foi dans
le gouvernement ni dans l’avenir. Dans ces
circonstances, ils veulent faire un film qui leur
redonnent et la foi et le sens des valeurs. Ce film
est « A Better Tomorrow » (《英雄本色》), sorti en 1986. C’est un tournant dans la carrière de John Woo.
Il s’agit
d’un remake d’un film de wuxia des années 1960,
« True Colours of a Heroe » : l’histoire de deux
frères, Ho et Kit, dont l’un est un criminel et
l’autre (aspirant) policier. Il est marquant à
plusieurs titres : c’est l’un des plus gros succès
de John Woo au box office en Chine (succès qui
incita la Golden Harvest à sortir « Heroes Shed No
Tears », lourdement remanié), c’est le premier film
de John Woo avec Chow Yun-fat qui va devenir son
acteur fétiche, mais |
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A Better Tomorrow |
surtout il définit
un nouveau genre de film de Hong Kong, basé sur une
combinaison de drame émotionnel, d’atmosphère tendue et de
combat au ralenti, outre un look spécifique qui va faire
florès, avec imper et lunettes noires comme celles que porte
Chow Yun-fat dans le film. Enfin, il comporte ce qui va
devenir la marque distinctive du réalisateur : le combat à
coups de révolvers tenus dans chaque main, dans un espace
très réduit, désigné par un nouveau terme créé pour
l’occasion : le « gunfu ».
A un moment où le
cinéma de Hong Kong était encore dominé par les comédies et
les films d’arts martiaux, « A Better Tomorrow » marque
aussi le début d’un nouveau genre : les films dits de « heroic
bloodshed », qui vont se développer à la fin des années
1980 puis dans la décennie suivante ; ils ont pour acteur
emblématique Chow Yun-fat, qui n’était jusqu’alors qu’un
acteur de comédies populaires.
Ce sont de violents
films de gangsters à la Peckinpah dont les personnages sont
tenus par des liens d’honneur et de loyauté ; en ce sens,
ils apparaissent comme appartenant à la même tradition que
celle dépeinte dans les classiques comme « Le roman des
Trois Royaumes ». Ces films se veulent à portée métaphysique
: ils mettent en scène des héros brisés par la vie, en quête
d'une rédemption qu'ils ne trouvent que dans la violence
(1)…
2. Après
« A Better Tomorrow », en 1987, John Woo coréalise
« Just Heroes » (《义胆群英》)
avec
son vieil ami Wu Ma (午马) :
une adaptation du « King Lear » de Shakespeare, et
donc un hommage à Kurosawa (dont « Ran » est une
adaptation de la même pièce). Mais, bien qu’il ait
été un succès au box office, ce film est l’un des
plus faibles du réalisateur. C’est en fait un film
réalisé pour venir en aide à
Chang Cheh qui était
alors dans le besoin.
3. En même
temps, John Woo était soumis à une pression très
forte pour réaliser une suite à « A Better
Tomorrow ». Il finit par se laisser convaincre, et
voilà Mark Gor, le personnage mythique du premier
numéro, interprété par Chow Yun-fat, doté d’un frère
jumeau, Ho tiré de prison pour filer un collègue et
acceptant la mission pour protéger son frère, et une
séquence finale plus sanglante que jamais : nouveau
succès.
Pourtant,
« A
Better Tomorrow 2»
eut quelques problèmes |
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Just Heroes |
après sa sortie :
dans sa version initiale, le film durait trois heures, le
studio demanda des coupes.
Tsui Hark et John Woo en
réalisèrent chacun de son côté, sans arriver à se mettre
d’accord sur celles à conserver. Finalement John Woo a
désavoué le montage final, à l’exception de la dernière
séquence.
4.
Tsui Hark collabore
encore l’année suivante avec John Woo pour « The
Killer » (《喋血双雄》) :
l’histoire d’un assassin au grand cœur qui prend
pitié des victimes blessées accidentellement, allant
jusqu’à tenter de sauver une petite fille en
risquant sa propre vie. Le film se termine par un
combat sanglant dans une église qui dut être coupé
lors de sa sortie aux Etats-Unis.
Le film fut
un échec à Hong Kong, où la campagne promotionnelle
l’avait annoncé comme une comédie ! Mais il fit
connaître John Woo dans le monde entier. « The
Killer » fut l’un des plus grands succès rencontré
aux Etats-Unis par un film de Hong Kong après
« Enter the Dragon » avec Bruce Lee.
Rupture
avec Tsui Hark et échecs à Hong Kong |
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The Killer |
1. Après
une série de disputes avec
Tsui Hark sur une
autre suite à donner à « A Better Tomorrow », John
Woo le laisse réaliser le film seul. Le bruit se
répandit alors qu’il était impossible de travailler
avec lui, et la vieille garde des réalisateurs de
Hong Kong lui reprocha même d’avoir causé la ruine
du cinéma d’action traditionnel.
Se
retrouvant isolé, John Woo crée alors son propre
studio de production avec un nouveau partenaire,
Terence Chang. S’appuyant sur cette nouvelle
société, John Woo retravaille le scénario
initialement prévu pour « A Better Tomorrow 3 » et
réalise en 1989 « Bullet in the Head » (《喋血街头》),
dont le titre chinois est un rappel de celui de
« The Killer » et qu’il considère comme l’un de ses
films les plus personnels. C’est l’histoire de trois
amis partis au Vietnam après un accident où deux
d’entre eux ont tué un homme ; elle se déroule sur
fond de guerre et de trafic de drogue, et de
trahisons réciproques. |
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Bullet in the Head |
Le film fut
un nouvel échec à Hong Kong, où les scènes d’émeute,
arrivant après les événements de Tian’anmen, furent
mal reçues. Le film fut finalement caviardé, et il
ne reste que quelques copies de la version initiale.
2. Fatigué
de ce genre de film et de problème, John Woo revient
vers la comédie pour son film suivant, en 1991 : « Once
a Thief » (《纵横四海》),
avec Chow Yun-fat et Tony Leung dans les rôles de
deux gangsters d’élite amoureux de la même femme qui
est le troisième membre de leur gang, interprétée
par Cherie Cheung.
Le film
fait suffisamment de recettes pour financer « Hard
Boiled » (《辣手神探》),
en 1992, resté célèbre pour une scène de carnage
dans un hôpital où s’est réfugiée une bande de
dangereux malfaiteurs, le policier interprété par
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Hard Boiled |
Chow Yun-fat
berçant un bébé tout en tirant, et s’esquivant en sautant
par une fenêtre avec l’enfant dans les bras…
Nouvel échec à Hong
Kong. John Woo part aux Etats-Unis.
Carrière aux
Etats-Unis
John Woo s’installe
à Los Angeles en 1993 et tourne un premier film avec
Jean-Claude Van Damme : « Hard Target ».
Films
Mais, comme tout
réalisateur étranger arrivant à Hollywood, il découvre la
dure réalité des studios, en particulier le double souci de
respecter les délais de tournage et de limiter la violence
pour obtenir un bon « rating ». Or, malgré ses coupes, le
film n’ayant pas obtenu la classification ‘grand public’, le
studio reprit les choses en main pour en sortir une version
expurgée.
Le système
américain n’était pas la panacée escomptée, mais la
situation à Hong Kong était bien pire, à la veille de la
rétrocession (2). Il fallut cependant trois ans à John Woo
pour repartir et réaliser un nouveau film, « Broken
Arrow », avec John Travolta et Christian Slater.

Face/Off |
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Modeste
succès, le film permet cependant à John Woo de faire
approuver son scénario suivant par la Paramount :
« Face/Off ». Cette fois-ci, il remet plusieurs
fois le scénario sur le tapis, jusqu’à obtenir ce
qu’il veut. Il dispose également d’un budget
conséquent et de plus de liberté dans les conditions
de tournage. L’histoire, complexe, est celle d’un
policier et d’un terroriste (John Travolta et
Nicolas Cage) qui se livrent à un jeu de chat et de
souris après avoir échangé leurs apparences
réciproques grâce à une intervention de chirurgie
esthétique.
Quand le
film sort, en 1997, c’est un succès économique et
critique. John Woo est considéré comme le premier
réalisateur asiatique à avoir réussi financièrement
sur le marché américain. Le film a même été couronné
de deux prix aux MTV Movie awards : "Best On-Screen
Duo" et "Best Action Sequence". |
Télévision
John Woo se tourne
ensuite vers la télévision, comme réalisateur et producteur
exécutif. Puis, après trois ans de tractations et
négociations, il réalise « Mission Impossible 2 », produit
par Tom Cruise. C’est la suite du film éponyme de Brian de
Palma, lui-même inspiré d’une série télévisée très
populaire. Sorti en 2000, le film profite d’une saison
estivale terne pour faire 200 millions de dollars au box
office américain, mais les critiques ne sont pas
enthousiastes.
En 2003, John Woo
revient vers la télévision, mais réalise encore deux films :
« Windtalkers » et « Paycheck ». Le premier a pour héros les
Indiens Navajos chargés des transmissions au sein de l'armée
américaine pendant la Seconde Guerre mondiale. Le second est
un semi échec.
Après avoir produit
un jeu vidéo (« Stranglehold », suite de « Hard Boiled ») et
un film d’animation, suite d’un anime japonais de 2004, John
Woo rentre à Hong Kong.
Retour à Hong Kong
De retour à
Hong Kong, il tourne son grand film épique basé sur
un épisode du « Roman des Trois Royaumes » :
« Red
Cliff » (《赤壁》),
film en mandarin, adapté d’un des grands classiques
chinois, destiné au marché de Chine continentale. Le
film est en deux parties, de chacune 140 minutes ;
la première partie est sortie en Asie en juillet
2008, la seconde en janvier 2009 – mais c’est une
version unique, réduite à 2 heures ½, qui est sortie
en Occident.
Bénéficiant
d’un scénario qui fait la part belle à l’imagination
et à l’humour, d’une pléiade d’excellents acteurs et
d’une superbe photographie, produit par John Woo,
Terence Chang et Han Sanping, le film a battu en
Chine le record de recettes instauré par « Avatar ».
John Woo a
depuis lors annoncé un projet de film sur l’année
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Red Cliff |
1949 qu’il a
abandonné, mais a, à la place, produit et coréalisé un
wuxiapian qui revisite la tradition tout à la traitant
de manière originale et satirique :
« Reign
of
Assassins » (《剑雨》), sorti en 2010.
Le film est sorti
en première mondiale à la Biennale de Venise où John Woo a
été couronné du Lion d’or pour l’ensemble de sa carrière,
récompense fort méritée au vu de l’importance de son œuvre
et de l’influence qu’elle continue d’exercer.
Importance et
influence de l’œuvre de John Woo
Novateur dès ses
premiers films, John Woo n’a pas cessé de créer des codes et
des modes qui ont été copiés dans le monde entier.
1. A la fin
des années 1980, « A Better Tomorrow » a lancé la
mode du « heroic bloodshed » que tout le monde s’est
empressé d’imiter, signant l’éclipse du film
d’action traditionnel, au grand dam des cinéastes de
Hong Kong ; seules des stars comme Jackie Chan ou
Sammo Hung purent résister et réussir des films à
contre-courant.
Aux
Etats-Unis, l’influence a été différente : là,
l’image du tueur sans âme, agissant sans remords,
type Rambo (Sylvester
Stallone), a cédé la place à celle du tueur rongé
par sa conscience ou entraîné dans des situations
qu’il ne maîtrise pas, comme le personnage de Bruce
Willis dans « Die Hard », en 1988.
2. Outre
les motivations et les caractères des personnages,
le « look Chow Yun-fat » dans « A Better
Tomorrow », lunettes noires et trenchcoat, a aussi
influencé directement les modes vestimentaires.
Après « A Better Tomorrow 2 », |
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The Matrix |
on retrouve
des lunettes noires, costumes noirs et cravates
riquiqui dans les films de Quentin Tarantino
« Reservoirs Dogs » et « Pulp Fiction » (3). Dans
« True Romance », dont Tarantino a écrit le
scénario, deux personnages regardent d’ailleurs « A
Better Tomorrow 2 » à la télévision. On retrouve
aussi le « look Chow Yun-fat » dans «The Matrix »
des frères Wachowski, avec
Keanu
Reeves, en 1999.
3. Quant
aux « signatures » de John Woo dans les scènes
d’action, elles sont devenus des clichés du genre,
en particulier les tueurs tenant deux pistolets dans
les mains et le fameux « Mexican standoff » où deux
personnages se tiennent en joue dans une situation
totalement bloquée – la scène a été utilisée avant
John Woo, ce n’est pas lui qui l’a inventée, mais
c’est lui qui l’a popularisée.
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Reservoirs Dogs
Le Mexican standoff |
4. Enfin, on a
aussi beaucoup copié les techniques de montage auxquelles a
recours John Woo : arrêt sur image et surtout ralentis,
utilisés pour accentuer la dramatisation des scènes d’action
tout comme la stylisation de l’action.
Au-delà de ces
procédés, John Woo a surtout su créer dans ses films des
personnages vivants, aux émotions réelles, avec lesquels les
spectateurs peuvent s’assimiler. C’est peut-être là le plus
important de la signature John Woo : l’émotion dans le film
d’action.
2014 :
Echec de la première partie de « The Crossing »
En juillet
2013, John Woo a commencé le tournage d’un film en
deux parties, dont la première est sortie sur les
écrans chinois en octobre 2014, au moment de la fête
nationale :
« The
Crossing »
(《太平轮》),
initialement promu comme le « Titanic » chinois.
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Reservoirs Dogs
La pub Ray Ban |

The Crossing, 1ère
partie |
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Le scénario
est en fait basé sur un accident dramatique
intervenu au large de Shanghai en janvier 1949 : le
naufrage du Taiping, navire qui transportait à
Taiwan des réfugiés qui fuyaient devant l’avance des
forces communistes. Il transportait mille cinq cents
personnes quand il heurta un cargo et coula,
laissant une cinquantaine de survivants.
Le film
raconte l’histoire de plusieurs couples dont le
destin s’est achevé à bord du Taiping. Mais la
première partie n’a pas rencontré le succès
escompté. Les diverses lignes narratives dispersent
l’attention, et nuisent à l’homogénéité du film tout
comme à la profondeur des caractères. Qui plus est,
défaut courant aujourd’hui, la recherche du
spectaculaire dans les scènes de guerre va à
l’encontre de l’intensité dramatique. |
Pour la seconde
partie, le vice-président de la société de
production, Le
Vision, a annoncé qu’ils ont fait appel à
Tsui
Hark pour tenter de corriger les défauts du
premier volet en faisant un nouveau montage. La sortie de
« The Crossing 2 » est annoncée pour l’été 2015.
Notes
(1) C’est le titre
d’un livre récent sur John Woo : « John Woo : la violenza
como redenzione », par Marco Bertolino/Ettore Ridola, Le
Mani-Microart's, août 2010, 160 p.
(2) La rétrocession
par la couronne britannique de Hong Kong à la Chine eut lieu
en 1997, mais suscita un climat délétère dans la colonie au
cours des années précédentes, les habitants craignant la
perte de leurs libertés et une crise socio-économique après
la reprise en main par le régime communiste.
(3) D’ailleurs
l’affiche de « Reservoir Dogs » est utilisée pour la
publicité des lunettes Ray Ban.
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