« The
Red Guards of Honghu Lake » : quand le cinéma rencontre et
raconte l’histoire…
par Brigitte Duzan,
07 novembre 2012
« La Garde
rouge du lac Honghu », ou « The Red Guards of Honghu
Lake » (《洪湖赤卫队》),
est d’abord une pièce de théâtre musical d’un genre
promu par les communistes dès Yan’an – le geju
(歌剧).
Créée en 1959, la pièce rencontra tout de suite un
immense succès, tant auprès du public que des élites
du régime, et ce succès lui valut d’être aussitôt
adaptée au cinéma.
Le film
comme la pièce subirent une éclipse pendant la
Révolution culturelle, mais furent exhumées dès les
lendemains de la chute de la Bande des Quatre. Les
deux œuvres reprirent leur parcours triomphal. Ce
succès populaire est dû à un ensemble de facteurs,
dont la musique n’est pas le moindre.
1. Une
pièce de théâtre musical
La
principale raison du succès de la pièce est son
profond enracinement dans la culture populaire.
Le geju
The Red Guards of
Honghu Lake, le film
Le geju (歌剧),
théâtre musical ou théâtre chanté, est une forme de théâtre
populaire qui s’est développé dès les années 1940, à Yan’an.
Il a pour origine une forme d’art populaire très ancien du
nord de la Chine, le yangge (秧歌) ;
alliant chant et danses, c’est une sorte de rituel paysan
vivant et coloré, accompagné d’une musique sonore et très
rythmée (essentiellement suona et tambour)
Exemple de
yangge
Quand Mao arriva à
Yan’an, ce genre populaire lui parut la forme idéale pour
servir de support idéologique, grâce à son ancrage dans les
traditions et la musique rurales. Le geju offrit une
alternative à l’opéra, moins austère, plus vivante et
légère, tout en permettant de créer des livrets aptes à
transmettre un contenu idéologique idoine, ce qui n’était
pas le cas des histoires souvent idéologiquement douteuses
des opéras du répertoire.
Un yangge
nouveau style émergea dès 1943, avec « Frères et sœurs
défrichent les terres
incultes » (《兄妹开荒》),
représenté à Yan’an par l’académie Lu Xun.
Frères et sœurs
défrichent les terres incultes
Mais « Frères et
sœurs défrichent les terres incultes » reste empreint de la
verve populaire de la tradition orale. Le véritable premier
geju est « La fille aux
cheveux blancs » (《白毛女》),
créé en 1945 et adapté au cinéma en 1950.
The Red Guards
of Honghu Lake
La
pièce « La
Garde rouge du lac Honghu » (《洪湖赤卫队》)est une initiative de la Troupe
expérimentale d’opéra du Hubei (湖北省实验歌剧团),
fondée en septembre 1952 ; elle a fait l’objet d’une
première représentation expérimentale à Wuhan en octobre
1956.
Elle est l’œuvre
collective d’une équipe de musiciens et librettistes de la
province : pour la musique Zhu Benhe (朱本和),
Zhang Jing'an (张敬安)
et Shu Fuze (叔负责),
pour le livret les deux premiers et trois autres membres de
la troupe,
Zhang Jing'an étant responsable de l’ensemble, y compris la
direction d’acteurs et la direction musicale. Dans l’esprit
du geju, elle reprend une histoire locale vraie, en
l’illustrant de chants adaptés de chants populaires de la
région.
Le réseau des bases de
Hunan-Hubei Ouest
L’histoire se situe
dans la région de Honghu (洪湖市),
ville-district sous la juridiction de la ville-préfecture de Jingzhou (荆州),
au sud du Hubei. La ville est sur la rive nord-ouest
(gauche) du Yangzi ; de l’autre côté est la province du
Hunan. Son nom dérive du lac voisin, le lac Hong (洪湖),
qui a causé des inondations depuis l’aube des temps, d’où
son nom : le lac qui déborde, inonde (洪hóng inonder
湖hú
lac).
La région autour du
lac fut une importante base communiste appelée Base
révolutionnaire
du Hunan-Hubei Ouest (湘鄂西革命根据地,Xiāng-èxīgèmìng gēnjùdì).
Mais ce n’était en fait qu’un groupe
de bases isolées,
reliées entre elles par des activités de guérilla. Honghu
était l’une de ces bases, et fut l’objet de quatre campagnes
d’encerclement de l’armée du Guomingdang, entre 1930 et
1934. La quatrième et dernière
(洪湖革命根据地第四次反围剿)
fut couronnée de succès.
La pièce se situe
pendant l’été 1930, au début du combat mené par le
Guomingdang pour éliminer la base. Illustrant des actes de
bravoure réalisés dans un parfait esprit de sacrifice, elle
était propre à insuffler l’enthousiasme révolutionnaire.
Un groupe de
Gardes rouges du village de Pengjiadun (彭家墩),
dirigés par la secrétaire de la branche du Parti Han Ying (韩英)
et le chef de
The Red Guards of
Honghu Lake, gravure de sceau
brigade Liu Chuang (刘闯),
quittent le village dans le but d’ouvrir une autre base du
réseau Hunan-Hubei
Maréchal He Long
Ouest. Profitant de leur départ, le
propriétaire foncier et despote local Peng Batian (彭霸天)
attaque le village avec un escadron de l’armée
nationaliste sous les ordres du colonel Feng (冯团长).
Prévenus par un
agent de liaison communiste, le lieutenant Zhang (张副官),
Han Ying et Liu Chuang reviennent les chasser et réussissent
à mettre la main sur les armes de l’armée du Guomingdang.
Peng Batian, furieux, parvient à capturer Han Ying qui est
emprisonnée. Pour tenter de la convaincre de joindre les
rangs du Guomingdang, Peng Batian capture sa mère, mais en
vain. Han Ying est libérée par le lieutenant Zhang, mais au
prix de sa vie. Elle mène ensuite les Gardes à l’assaut de
l’armée nationaliste avec l’appui de la Seconde armée
communiste, sous la direction du général He Long (贺龙)…
Une pièce musicale
reflétant la tradition locale
Pièce ancrée dans
l’histoire locale récente, « La Garde rouge du lac Honghu »
est en outre le reflet de la musique populaire de la région
qui en est l’élément fondamental.
Pour préparer le
travail, l’équipe est allée dans les villages, recueillant
des chants et les adaptant ensuite tout en gardant la
musique d’origine, mais en la mâtinant de musique
occidentale pour lui donner un timbre plus moderne. Zhang
Jing'an a pris tout particulièrement pour base une forme
spécifique de musique populaire du Hubei appelé Huaguxi
(花鼓戏),
ou ‘danse du tambour fleuri’, propre à la région de Tianmian
(天沔花鼓戏),
ainsi que d’autres chants populaires de la région.
En
comparaison avec les autres geju de la période, « La
Garde rouge du lac Honghu » apparaît
plus authentique et plus vivant,
car il va aux sources de la musique populaire locale en
joignant musique et histoire locales. Chaque épisode a son
chant propre, et tous ces chants mis ensemble constituent
une chaîne narrative. On a synthétisé le style de la pièce
en une formule en huit caractères :
中西合璧 zhōngxī hébì 音史结合yīnshǐ
jiéhé
heureuse combinaison de l’Orient et de l’Occident, de la
musique et de l’histoire.
L’exemple le plus
représentatif du travail d’adaptation réalisé est celui du
thème musical de la pièce, le chant le plus célèbre « Les
eaux du lac Hong, vague après vague » (《洪湖水浪打浪》) ;
il s’agit d’une adaptation d’une complainte populaire qui
chantait à l’origine la peine due aux dommages causés par
les débordements récurrents du lac : « d’année en année les
eaux du lac rompent leurs digues… » (“年年洪水冲破堤”).
Dans la
pièce, ce chant est devenu une balade révolutionnaire d’un
style narratif doux et mélodieux chantant les progrès
réalisés grâce au Parti (1).
Version
concert
Mais
elle n’a pas cessé d’évoluer et fait aujourd’hui partie du
répertoire populaire moderne, régulièrement reprise lors de
manifestations officielles du régime ou lors des fêtes de
fin d’année.
Adaptation pour la soirée du Nouvel An 2012 de la télévision
du Hubei :
2. Du
théâtre au cinéma
Succès immédiat de
la pièce
La
pièce a été l’un des grands succès de l’année 1959 : elle
fit partie des œuvres créées pour célébrer le dixième
anniversaire de la fondation de la République populaire.
Elle reçut un accueil enthousiaste auprès du public : la musique et
l’histoire étaient ancrées dans la vie et l’art locaux, mais
les interprètes aussi étaient de la région de Honghu, en
particulier l’actrice qui interprétait le rôle principal de
Han Ying, Wang Yuzhen (王玉珍),
qui avait commencé à chanter dans une troupe locale en 1949,
à l’âge de quatorze ans, et était formée au répertoire des
chants et balades populaires (民歌民谣).
En outre, Zhang
Jing'an emmena ses interprètes vivre à Honghu où ils purent
écouter de la bouche de vétérans de l’armée le récit
d’anecdotes ayant trait à l’épisode qu’ils devaient jouer.
Wang Yuzhen a expliqué qu’elle
n’aimait pas beaucoup le texte de la pièce, au départ, mais
qu’elle se rendit compte en écoutant les gens du village
qu’il ne s’agissait pas seulement de slogans creux et elle
avait su ensuite lui donner vie.
La
musique, surtout, fut déterminante : on raconte que, à la
sortie du théâtre, les gens, dans la rue, chantaient « Les
eaux du lac, vague après vague » en rentrant chez eux. Le
jeu et le chant se sont d’ailleurs améliorés encore au fil
des représentations, dans les usines, les villages, à
l’armée…
Succès
aussi auprès des dirigeants
Puis,
le 5 janvier 1960, la pièce fut jouée à Zhongnanhai (中南海),
le siège du gouvernement, devant le gotha des dirigeants de
l’époque, dont le premier ministre Zhou Enlai (周恩来),
le maréchal Chen Yi (陈毅),
ministre des Affaires étrangères, l’ancien gouverneur du
Hubei et ministre des Finances Li Xiannian (李先念),
etc… Zhou
Enlai se montra particulièrement enthousiaste et monta sur
la scène pour entonner le chant final avec les chanteurs
(2). Il resta ensuite à bavarder avec eux.
Il y avait là aussi
le maréchal He Long (贺龙元帅).
Né dans une famille pauvre du Hunan, sans éducation, il
avait commencé sa vie comme hors-la-loi, avait rejoint les
forces du Guomingdang, mais s’était ensuite rallié aux
communistes ; il avait joué un rôle important dans
l’organisation de la base autour du lac Hong, mais, à la
mi-1933, lors de la 4ème campagne d’encerclement,
il l’avait évacuée pour aller établir une autre base dans le
nord-est du Guizhou. Il avait ensuite rejoint la Longue
Marche en 1935, avec une troupe baptisée Seconde Armée,
constituée en regroupant les restes de la Sixième et la
sienne.
Une bonne
partie de la pièce était en son honneur. Si son nom n’est
cité que vers la fin du film, quand il arrive avec son armée
pour porter main forte aux gardes de Honghu dans leur combat
contre Peng Batian et les nationalistes, son ombre plane sur
tout le film. Il faut dire en effet que Han Ying n’était
autre que … sa sœur.
Après la représentation de Zhongnanhai, pour fêter le succès
de la pièce, He Long invita toute la troupe le 9 janvier
dans un restaurant pékinois. Ils eurent la surprise de
découvrir qu’il avait aussi invité Mei Lanfang, Lao She et
d’autres personnalités du monde littéraire et artistique,
ainsi que des hauts militaires et dirigeants. Prenant la
parole au début du repas, il fit l’éloge de la pièce, en
rappelant le sacrifice des Gardes rouges du lac Honghu pour
la révolution, ce qui était aussi un hommage déguisé rendu à
sa sœur, et proposa de porter la pièce à l’écran.
C’était logique :
le cinéma était considéré comme le plus puissant moyen de
diffusion idéologique et quelques pièces du nouveau
répertoire avaient déjà été adaptées, « La fille aux cheveux
blancs » étant un modèle en la matière.
Adaptation au
cinéma
L’adaptation
cinématographique fut produite conjointement par le studio
de Pékin et celui de Wuhan, et la réalisation confiée à
Xie Tian (谢添),
en collaboration avec deux autres réalisateurs restés
mineurs dans l’histoire du cinéma : Chen Fangqian (陈方千), avec lequel Xie Tian venait de collaborer pour les trois films réalisés
l’année précédente, et un troisième nommé Xu Feng (徐枫).
Les acteurs étaient
au départ ceux de la pièce, mais, au début du tournage, Wang
Yuzhen fut remplacée : on ne la trouvait pas assez belle.
Quand Zhou Enlai l’apprit, il se mit en colère : « Le rôle
de Han Ying est celui d’une héroïne, on n’a pas besoin d’une
starlette. » Son avis fut déterminant, Wang Yuzhen était
désormais l’incarnation du personnage de Han Ying. Elle
avait le même âge : vingt cinq ans.
Le film se présente
comme un véritable film musical, où le
Xie Tian jeune
chant est
remarquablement bien intégré dans l’ensemble ; il n’y a pas
de démarcation nette entre le chant et le dialogue parlé,
et cela tient sans doute à la tradition de l’opéra ; c’est
véritablement un opéra moderne, filmé à un rythme rapide,
sans hiatus, mais capable de moments d’émotion vraie.
Contexte historique
du tournage
La pièce avait été
conçue dans l’atmosphère d’enthousiasme des débuts du Grand
Bond en avant ; le film fut tourné dans une époque de crise
économique et politique. Le tournage eut lieu en effet en
1960, c’est-à-dire pendant les « trois années de calamités
naturelles », autrement dit la grande famine provoquée par
le Grand Bond en avant (3). La nourriture était encore
insuffisante et rationnée et cela eut des conséquences
inattendues pour le réalisateur (4).
Wang Yuzhen dans
Honghu Lake
L’acteur Xia Kuibin
(夏奎斌),
qui joue le rôle de Liu Chuang (刘闯),
avait perdu vingt kilos ; il n’en pesait plus que soixante
et avait la peau sur les os et le visage émacié. Pour lui
donner l’air valeureux que nécessitait le rôle, Xie Tian le
fit jouer avec des boules de coton dans la bouche pour lui
arrondir les joues, ce qui lui provoqua des irritations et
même des ampoules sur la langue… On ne peut s’empêcher d’y
penser quand on le voit chanter, la bouche légèrement
crispée.
Quant à Wang
Yuzhen, elle faisait de l’œdème à cause du manque de
nourriture, quand on la touchait, le doigt laissait des
traces sur sa peau. Or Xie Tian avait besoin qu’elle ait
l’air amaigrie pour la séquence où elle est emprisonnée ; il
lui faisait donc manger tous les jours un bol de soja pour
éviter que son œdème s’aggrave.
Sortie sur les
écrans
Le film sortit
début 1961. Les fêtes du Nouvel An prirent cette année-là un
éclat particulier, avec une cinquantaine de films projetés
dans les
cinémas de la capitale, clubs et centres culturels divers ;
il y en avait la moitié de nouveaux, dont « La Garde rouge du
lac Honghu ».
L’exploitation du
film dans les mois suivants intervint dans le contexte du
redressement économique lancé pour stopper le désastre du
Grand Bond, redressement qui devait aussi toucher le cinéma.
La revue Cinéma populaire créa un concours auprès de ses
lecteurs pour sélectionner les meilleurs films de l’année,
récompensés par les prix des Cent Fleurs. Les premiers prix
furent décernés en grande pompe en mai 1962, en
présence de hauts dirigeants, dont Zhou Enlai et Chen Yi, le
palmarès étant annoncé par Guo Moruo. « La
Han Ying et Liu Chuang
Garde rouge du
lac Honghu » obtint le prix de la meilleure musique.
Le succès du film
encouragea l’équipe à s’inspirer de sa mise en scène pour
faire de nouvelles révisions à la pièce dont le succès dura
jusqu’à la veille de la Révolution culturelle : elle eut au
total quelque 800 représentations.
Cela aurait pu être
un modèle intéressant à développer, mais l’histoire prit
ensuite un chemin différent.
3. Interdiction et
résurgence
Le film, comme la
pièce, disparurent pendant la Révolution culturelle, comme
tant d’autres, mais pour des raisons bien particulières.
Problèmes
politiques
En avant, allons
liquider l’ennemi
Non seulement la
pièce était en grande partie en l’honneur du maréchal He
Long, mais c’était lui qui, en outre, avait le premier lancé
l’idée de l’adapter au cinéma ; cela eut des conséquences
désastreuses pour le film, comme pour la pièce.
En effet, après la
Longue Marche, He Long mena des actions d’envergure dans le
Nord-Ouest, et, en 1945, était à la tête d’un contingent de
quelque 170 000 soldats qui fut placé sous les ordres du
général Peng Dehuai (彭德怀)dont He Long devint le
commandant en second. Lorsque, en 1959, Peng
Dehuai s’opposa à Mao à la conférence de Lushan en demandant
que l’on mette fin au Grand Bond en avant dont il avait
constaté de visu les conséquences désastreuses, He Long lui
accorda au départ son soutien. Il mit près d’un an à se
ranger à la ligne générale alors que Mao l’avait nommé chef
du comité chargé de statuer sur l’affaire.
En décembre 1966,
il fut dénoncé par Jiang Qing, accusé de droitisme et
factionnalisme anti-Parti, et taxé de « banditisme ». Il
était alors le second plus haut dignitaire de la Commission
des Affaires militaires, et le premier à être éliminé. Il
fut soumis à un traitement inhumain pendant les deux années
et demie qui lui restaient à vivre, privé des médicaments
dont il avait besoin pour son diabète. Hospitalisé en 1969
pour sévère malnutrition, il mourut d’une injection de
glucose qui compliqua ses problèmes de diabète.
Il ne fut
réhabilité qu’à la fin des années 1970, et le film, comme la
pièce, dut attendre sa
La partition d’un
autre célèbre chant du film :
« Malheureux du
monde, vous serez libérés »
réhabilitation pour pouvoir être
exhumé des archives.
Réhabilitation
La polémique fit
rage dès la fin de 1976. Le général Luo Ruiqing (罗瑞卿),
autre membre de « la clique de Peng Dehuai » mais qui avait
été réhabilité par Mao lui-même dès 1975, fut de ceux qui
défendirent le film en soulignant le rôle de He Long dans la
révolution aux côtés de Mao ; son ami le général Liao
Hansheng (廖汉生)
alla finalement chercher une copie du film et ils le
regardèrent avec des membres de la troupe. Le film leur
parut toujours aussi émouvant. Et à la fin ils entonnèrent
ensemble le chant « Les eaux du lac Hong, vague après
vague… ». (5)
Représentation de la
pièce au
Grand Théâtre de Pékin,
octobre 2012
Le renouveau
d’enthousiasme pour le film accéléra le processus de
réhabilitation du maréchal He Long.Finalement, le film
fut parmi les premiers à être à nouveau autorisés après la
Révolution culturelle, et certains cinémas le projetèrent 24
heures sur 24.
La popularité de la
pièce comme du film n’a pas fléchi. Une adaptation en
feuilleton télévisé en 28 épisodes a été réalisée en 2010.
La pièce fait l’objet de fréquentes mises en scène, la
dernière en date ayant eu lieu en octobre 2012 au
National
Centre for Performing Arts de Pékin, dans une mise en scène
moderne qui reste cependant fidèle à l’esprit de celle de
Tie Xian.
Notes
(1) Les paroles du
chant :
洪湖水呀浪呀嘛浪打浪啊les eaux du lac
Hong ya vague ah vague après vague ah
洪湖岸边是呀嘛是家乡啊 le bord du lac ya
c’est notre coin de terre ah
清早船儿去呀去撒网 à l’aube les bateaux ya jettent leurs filets ah
晚上回来鱼满舱啊啊~
le soir reviennent
les cales pleines de poissons ahah
四处野鸭和菱藕 partout canards sauvages, châtaignes d’eau, pousses de lotus
秋收满帆稻谷香la moisson d’automne gonfle les voiles d’une senteur de riz
人人都说天堂美 tout le monde dit que c’est le paradis
怎比我洪湖鱼米乡啊啊~
c’est pour moi le
pays de cocagne ahah
洪湖水呀长呀嘛长又长啊 grand est le lac
Hong ya grand ya grand oh si grand ah
太阳一出闪呀嘛闪金光啊 les feux du soleil
ya le teintent de reflets d’or ah
共产党的恩情 l’amour du Parti
比那东海深 est plus profond que la mer de l’est
渔民的光景 la vie du petit
peuple
一年更比一年强啊。 meilleure de jour
en jour ah.
(2)
D’après l’actrice Wang Yuzhen,
c’est resté un des ses airs favoris et il a ensuite continué
à le chanter, même pendant la Révolution culturelle ; il
n’était plus possible de le chanter en public, mais il le
fredonnait pour lui.
(3) Sur
la grande famine causée par le Grand Bond en avant, voir
(4) Et
encore Honghu et sa région n’avaient pas souffert comme le
reste de la province des conséquences dramatiques du Grand
Bond en avant. En effet, la région avait été gravement
inondée en 1954, si bien que, lorsque Mao ordonna qu’y soit
appliqué son mot d’ordre de collectivisation, le secrétaire
local du Parti communiste, Li Jinyu (李金玉),
s’y opposa, appliquant à la place une politique libérale qui
permit à l’économie locale de reprendre et prospérer. Le
même Li Jinyu eut ensuite une action opposée à la politique
maoïste pendant le Grand Bond en avant, ce qui permit à la
région sous son administration de ne pas souffrir de la
famine dans les mêmes proportions que le reste de la
province, et du pays. Au pire de la famine, il refusa même
les réquisitions qu’on voulait lui imposer. Il le paya
évidemment ensuite. Il fut arrêté dès octobre 1964 avec les
autres cadres locaux du Parti, subit près d’un an de procès
public et fut condamné à quinze ans de travaux forcés.
(5) Le
général Luo Ruiqing mourut peu de temps après, le 3 août
1978, dans un hôpital en Allemagne. En mars 1966, pour
échapper à ses persécuteurs, il avait tenté de se suicider
en se jetant d’un troisième étage et s’était cassé les deux
jambes. Mal soigné, il dut être ensuite amputé de la jambe
gauche, en 1969, mais continua à subir de fréquentes
hospitalisations.
Le film
Recherche effectuée
pour le CDCC,
pour la séance du 8
novembre 2012 du cycle ‘De l’écrit à l’écran’,