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Zhang Miaoyan 章淼焱
Né en 1964
Présentation
par Brigitte
Duzan, 21 août 2013, actualisé 8 octobre 2016
Né en 1964,
en Mandchourie, Zhang Miaoyan (章淼焱)
a vécu toute son enfance pendant la Révolution
culturelle.
Dans les
années 1980, c’est grâce à une bourse d’études qu’il
peut partir étudier aux Etats-Unis, à l’université
Berkeley. Il y découvre le cinéma, et passe une
grande partie de son temps à regarder des films.
De retour
en Chine, il écrit des nouvelles, sur des sujets
contemporains plus ou moins sensibles, qui ne
trouvent pas d’éditeur. Ce seront les sujets de ses
films quand il décidera de se lancer dans le cinéma.
2006 :
Premier film |
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Zhang Miaoyan |
Pendant l’été 2006,
il emprunte de quoi réaliser son
premier long métrage : « Xiaolin Xiaoli » (《小林小丽》),
qu’il
tourne en quatre semaines.
Xiaolin Xiaoli |
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Basé sur des faits réels, « Xiaolin Xiaoli » est
l’histoire d’un jeune paysan de 26 ans, Xiaolin,
venu en ville travailler sur des chantiers. Obsédé
par une libido débordante, il n’a cependant pas
assez d’argent pour pouvoir se payer les services de
prostituées et vit dans une frustration permanente.
La jeune Xiaoli, elle, est mariée, mais son mari est
parti travailler à Shanghai pour tenter de
rembourser ses dettes. Elle lui écrit des lettres
pleines d’amour, mais d’une infinie tristesse,
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n’ayant guère d’espoir que les choses puissent s’améliorer
pour eux.
Sa situation économique se détériorant, Xiaoli en
vient à se prostituer. Xiaolin devient l’un des ses
clients, et se libère sur elle de toute sa
frustration. Les cris de la jeune femme retentissent
comme des symboles de la douleur de toutes ces
femmes chinoises réduites aux mêmes extrémités… D’un
réalisme sans fard, le film montre le dur processus
de déchéance morale, physique et sociale où sont
entraînés ses deux personnages emblématiques. |
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Xiaolin Xiaoli |
Le film
est sorti en première mondiale à Pusan en 2007, puis primé
au festival
Black Movie à Genève et au festival de Tiburon en 2008.
Zhang Miaoyan a acquis là une première notoriété.
2011 :
Black Blood
Black Blood |
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Second film
de Zhang Miaoyan,
« Black
Blood » (《黑血》)
est un film en noir et
blanc d’une esthétique exigeante et d’une grande
originalité formelle qui a connu un succès
inattendu dans les festivals internationaux, à
défaut de pouvoir être diffusé en Chine.
Présenté à Cannes dans la
programmation indépendante de l’Acid, il a été
coproduit par Guillaume de Seille et la société
Arizona Films, avec l’aide à la
post-production du Fonds
Hubert Bals.
Esquissant plutôt que racontant la vie d’un couple
de paysans pauvres des confins du désert de Gobi
gagnés par la fièvre de l’enrichissement facile
grâce à la vente de leur sang, le film a pour toile
de fond l’épidémie dramatique de Sida des années
1990 en Chine. Le noir et blanc de l’image, la
sobriété des dialogues, le réalisme des situations
et la véracité des personnages en font une antithèse
du film de |
Gu
Changwei (顾长卫)
« Love
for Live » (《最爱》)
sur le même sujet.
« Black
Blood » »
sort grandi de la confrontation des deux films.
2015 : A Corner of
Heaven
Après
« Black
Blood »,
Zhang Miaoyan a pu prétendre à un budget plus
conséquent. Son troisième film, « A Corner of
Heaven » (《天堂角落》),
comme le précédent une coproduction Rice Production/
Arizona Films, a bénéficié d’un budget de 120 000 $,
et d’une aide du fonds Hubert Bals du festival de
Rotterdam où le film est sorti en janvier 2015.
Dès
l’abord, le scénario est extrêmement intéressant.
C’est l’histoire d’un jeune |
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A Corner of Heaven |
garçon de treize
ans qui part à la recherche de sa mère qui a disparu en
confiant sa petite sœur à son grand-père. Sa quête le
conduit sur les bords d’un fleuve Jaune complètement
pollué ; il rencontre un garçon qui le convertit à la drogue
et l’introduit dans un gang de voleurs. Un jour qu’il tente,
désespéré, de gagner ce qui lui semble être la promesse d’un
« coin de paradis », il s’engage dans un tunnel où il est
happé par un train et échappe de justesse à la mort, mais
perd le seul espoir qu’il avait de retrouver sa mère : un
bout de lettre. Le choc est salutaire : il recouvre ses
esprits.
Il revient alors
au village, mais pour découvrir que le grand-père a vendu sa
sœur. Il part alors à sa recherche, le long du même fleuve
Jaune…
Ce troisième film
continue dans la même esthétique de noir et blanc, et de
lenteur délibérée, que le précédent. La comparaison avec
Bela Tarr avancée pour Black Blood est ici encore plus
nette ; Zhang Miaoyan semble, comme son maître hongrois,
dépouiller le drame pour en faire la trame de son film, mais
en le réduisant à une métaphore : une fable visuellement
superbe, mais effrayante, d’un pays aux esprits aussi
pollués que la nature, et l’histoire de la perte d’innocence
et d’avenir non seulement de l’enfant, mais de toute sa
génération. Le dénouement sans appel ne laisse aucun espoir.
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