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« Caijin », histoire d’une enfant pauvre dans la Chine des années 1990

par Brigitte Duzan, 29 mars 2021 

 

« Caijin » (《孝女彩金》) est un film réalisé par Zhou Yong (周勇) sorti en Chine en septembre 2012.

 

Une histoire vraie

 

Fondé sur une histoire vraie, le film se passe dans les années 1990 dans la ville de Meizhou (梅州), au nord-est du Guangdong, en bordure du Fujian. La ville est considérée comme un noyau de la culture et de la langue hakka, groupe ethnique han qui a migré dans le sud en plusieurs vagues depuis la dynastie des Qin et s’est installé en grande partie dans les zones montagneuses. Comme dans « La Jeune fille Xiao Xiao » (《湘女萧萧》) de Xie Fei (谢飞), le film est scandé par un panoramique récurrent de la montagne. Le fait que nous soyons dans une population hakka n’intervient que vers la fin du film, en apportant un élément narratif supplémentaire [1], mais ce n’est pas le sujet principal.

 

Caijin, affiche pour une avant-première

du film pour la fête des mères

 

Caijin, affiche pour la sortie du film

 

Peng Caijin (彭彩金) [2] est une petite fille qui, une nuit, a été abandonnée bébé à la porte d’un couple qui venait de se marier : le villageois est déjà assez âgé et sa femme est handicapée. Ne pouvant eux-mêmes avoir d’enfants, ils recueillent le bébé avec joie et l’adoptent. Très pauvres, ils vivent pour la petite fille. Or, un jour, en allant vendre son tofu à la ville, le père fait une chute sur un mauvais chemin de montagne : retrouvé inanimé par un voisin, il devient lui aussi handicapé, incapable de travailler. Caijin a neuf ans et cumule dès lors les tâches ménagères et son travail à l’école – qui s’en ressent bien sûr mais sans qu’elle veuille expliquer pourquoi, de peur que les autres enfants ne la méprisent.

 

L’institutrice finit par découvrir la réalité, et mobilise les enfants de la classe qui se portent volontaires pour aller aider Caijin. Le reste de l’histoire tient malheureusement du roman feuilleton, et la fin est un grand geste de solidarité hakka.

 

Le film est très bien joué, en particulier par les jeunes acteurs :

Feng Yingying (冯莹莹) dans le rôle de Peng Caijin (彭彩金),

Sun Jifeng (孙继峰) dans le rôle du père Peng Xiaocheng (彭孝诚),

Liu Chenxia (刘晨霞) dans celui de la mère,

Deng Dingwei (邓丁玮) dans celui du demi-frère de Caijin, etc…

 

Un film classé « éducatif »

 

Refusant d’aller vivre avec sa mère biologique qui avait fait fortune et voulait la reprendre, Caijin s’est occupée de ses parents adoptifs jusqu’à leur mort, en 2006 et 2007 respectivement. Elle est devenue un modèle national de piété filiale [3], promu par le gouvernement. En 2010, par exemple, elle a été l’un des porteurs de la flamme des 16èmes Jeux asiatiques qui se sont tenus à Canton.

 

Premier jour à l’école

 

Nourrir les porcs

 

« Caijin » a été coproduit par le Studio des films pour enfants (中国儿童电影制片厂), le comité du Parti de la municipalité de Meizhou et la municipalité elle-même (梅州市委、市政府). Il est classé dans la catégorie des « films éducatifs offrant une source d’inspiration » (励志教育片). De manière caractéristique, les dialogues sont en putonghua, sans même une trace d’accent, alors que Meizhou (Mòichû) est le centre du hakka standard. En un sens, le film apparaît comme une survivance d’un genre hérité, avec ses codes, de la période maoïste.

 

Quand le film est sorti, en septembre 2012, il est passé pendant trois mois dans les cinémas de Meizhou et de Canton où il a attiré plus d’un million de spectateurs. 

 

Il est à rapprocher du film de 1999 de Zhang Yimou (张艺谋) sur un sujet très proche : « Pas un de moins » (《一个都不能少》).

 
 

Caijin fait aussi les piqûres de son père

 

Caijin, le film sous-titré chinois et anglais

 

 


 


[1] En particulier, dans une séquence après l’accident du père, la mère propose de retirer Caijin de l’école car ils n’ont pas l’argent pour payer les activités extra-scolaires, et après tout, dit-elle, c’est une fille. Le père refuse net, en soulignant l’importance donnée à l’éducation dans la culture hakka. Ce n’est pas pour rien que le film se passe à Meizhou : la ville est réputée pour ses établissements d’enseignement, et en particulier l’université de Jiaying (嘉应大学).
Autre caractéristique : beaucoup d’habitants ont émigré au cours du temps pour aller gagner de l’argent ailleurs, afin d’envoyer de l’argent à leur famille et aider la ville. La fin du film est réaliste, même si elle est traitée dans une esthétique de mélodrame.

[2] Nom donné par ses parents adoptifs : căijīn 彩金 désigne l’argent gagné à une loterie, au lotto ou autre jeu.

[3] D’où le titre du film : Xiaonü Caijin (《孝女彩金》), Caijin, modèle de piété filiale.

 

 

     

 

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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