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Le
cinéma chinois : repères historiques
par Brigitte Duzan, 22
septembre 2014
I.
1905-1949
I.5
Scénario et théâtre : l'exemple de Yang Hansheng (阳翰笙)
Dramaturge réputé des années de guerre contre le Japon, Yang
Hansheng a également été un grand scénariste, auteur d’une
vingtaine de scénarios, dont une bonne douzaine portés à
l’écran, par les meilleurs réalisateurs de Shanghai, avant
et après la guerre.
Ami et proche des personnalités les plus influentes du monde
de la culture dans la Chine des années 1930 et 1940, et
jusqu’à la veille de la Révolution culturelle, il a lui-même
été l’une des figures de proue du théâtre et du cinéma.
S’il garde aujourd’hui une certaine notoriété, cependant, ce
n’est pas tant pour ses pièces de théâtre, trop marquées par
leur contexte politique, mais pour ses scénarios, et en
particulier ceux écrits après la guerre, dans la brève
période d’épanouissement fulgurant du cinéma de Shanghai
pendant les quelques années avant 1949.
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Yang Hansheng jeune |
Il montre bien les liens étroits entre écriture
dramaturgique et scénaristique en Chine à cette époque, et
de manière plus générale, l’étroite symbiose entre théâtre
et cinéma, par le biais des personnes qui les incarnent.
Militantisme révolutionnaire et fiction
De son vrai nom Ouyang Benyi (欧阳本义),
Yang Hansheng est
né en novembre 1902 dans une famille de petits marchands du
bourg de Luochang (罗场镇),
dans le district de Gaoxian (高县) de
la ville-préfecture de Yibin (宜宾),
au sud-est du Sichuan.
Sous l’égide de Guo Moruo et Zhou Enlai

La maison natale de
Yang Hansheng à Luochang |
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En 1920, il entre au collège à Chengdu. Influencé par les
idées du mouvement du 4 mai, il participe à un mouvement
étudiant, critique le directeur de l’école et s’en fait
exclure. En 1923, il part continuer ses études à Pékin,
puis, à l’automne 1924, entre à l’université de Shanghai
pour étudier la sociologie. Il milite en même temps dans les
rangs de l’organisation de la jeunesse communiste.
En 1925, il devient membre du Parti communiste et secrétaire
de la cellule du
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Parti de l’université. En 1926, il s’engage dans l’activité
révolutionnaire sous la direction de Zhou Enlai. Le 1er août 1927, il participe au
soulèvement de Nanchang (南昌起义),
première opérationmenée
par les Communistes contre le Guomingdang, pour contrer les
purges effectuées dans leurs rangs.
Mais, pour Yang Hansheng, l’engagement sur le front
révolutionnaire passe aussi par la création littéraire.
De la Société Création à l’Union des écrivains de gauche
Fin 1927, à l’invitation de Guo Moruo (郭沫若),
et avec l’appui de Zhou Enlai (周恩来),
il participe au travail de la Société Création (创造社),
relancée en mars 1926 après une interruption de près de deux
ans, avec une orientation moins purement littéraire.Yang
Hansheng collabore
à deux revues qui en sont proches : « Les sables mouvants »
(《流沙》), bihebdomadaire
créé en 1928, et « L’aube » (《日出》), qui
paraît tous les dix jours.
Au début de 1928,
Yang Hansheng
commence à publier des récits de fiction et
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En 1942 avec Guo Moruo
(au centre)
et Zhou Enlai (à dr.),
à Chongqing |
écrit des articles sur le marxisme et l’art révolutionnaire.
Mais, en 1929, la Société Création est sur liste noire, ses
publications sont interdites et le matériel est saisi.

Le journal Les sables
mouvants |
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Pendant l’hiver 1929,Yang
Hansheng
participe à la création de l’Union des écrivains de gauche (中国左翼作家联盟), effective
le 2 mars 1930, où il retrouve nombre des anciens membres de
la Société Création.
Il écrit des articles de théorie comme « Recherches sur le
matérialisme historique » (《唯物史观研究》) ou
« Petit précis de sciences sociales » (《社会科学概论》),
mais aussides
articles de critique littéraire et artistique comme
« Problèmes de vulgarisation de la littérature et de l’art
prolétariens » (《普罗文艺大众化的问题》)
qui exercent une grande influence sur les milieux
intellectuels de gauche. Il y défend avec passion la
« littérature utilitaire » dans le but de promouvoir la
cause révolutionnaire.
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Publication de nouvelles
Pendant la période 1928-1932, il écrit une dizaine de
nouvelles courtes et huit nouvelles moyennes qui
s’inscrivent dans ce cadre.
Parmi les premières, « La prisonnière » (《女囚》),
écrite sous forme épistolaire, est l’histoire d’une femme
emprisonnée pour ses activités subversives ; « Deux femmes »
(《两个女性》)
aborde le problème des choix que doivent faire de jeunes
intellectuels dans les années 1920, alors que Nationalistes,
Communistes et seigneurs de guerre luttent pour le pouvoir ;
« L’armée des volontaires » (《义勇军》)
a pour thème l’armée de volontaires enrôlés dans la guerre
de résistance contre le Japon.
Parmi les nouvelles moyennes, les plus connues sontcelles
qui forment la trilogie de « La fontaine terrestre » (《地泉三部曲》) :
« En profondeur » (《深入》),
achevée en août 1928, « Conversion » (《转换》),
achevée en juillet 1929, et « Renaissance » (《复兴》),
terminée en juillet 1930. Yang Hansheng y dépeint la
participation des paysans et des travailleurs des villes
dans les soulèvements armés, ainsi que les luttes des
intellectuels.
Pour la publication du roman, Yang Hansheng demanda à
Mao Dun (茅盾)
(1)
d’écrire une préface. Mao Dun tenta de se récuser en disant
que ce ne serait pas une préface mais une critique. Très
bien, répondit Yang Hansheng, la critique est chose
salutaire. Mais elle fut sévère :
《地泉》描写人物运用的是脸谱主义手法;结构故事借助于“方程式”,而且在语言上也是用标语口号的言词去表达感情。因此,从整个作品来讲,《地泉》是不很成功的。
Dans « La fontaine terrestre », les personnages sont décrits
de façon stéréotypée, l’histoire semble se dérouler selon un
ensemble d’équations, et les sentiments sont exprimés en
formules toutes faites. Globalement, le roman n’est pas une
réussite.
Qu Qiubai (瞿秋白)
ne fut pas plus tendre. C’est sans doute l’une des raisons
qui incitèrent
Yang Hansheng à renoncer à la fiction pour se
tourner,d’abord, vers l’écriture de scénarios, puis vers le
théâtre, mode privilégié d’expression en Chine pendant la
guerre.
1930-1945 :scénarios et théâtre
Scénarios des années 1930
En 1932, l’Union des écrivains de gauche crée un groupe de
travail sur le cinéma. En 1933, Yang Hansheng entre au
studio Yihua (艺华影业公司)
à Shanghai, propriété d’un trafiquant de drogue, mais dirigé
par Tian Han (田汉)
qui y attira ses amis.
Yang Hansheng écrit son premier scénario au printemps 1933,
pour le film « Larmes rouges sur la plaque de fer » (《铁板红泪录》),
réalisé par
Hong Shen (洪深) : il raconte
une révolte de paysans du Sichuan contre un tyran local.
C’est le début d’une carrière de scénariste avec les
meilleurs réalisateurs du moment. Et c’est la première fois
qu’il utilise le nom de plume de
Yang Hansheng.
Il continue, toujours à la Yihua,avec les scénarios de
« Raging Waves of China Sea » (《中国海的怒潮》),
réalisé par Yue Feng (岳枫)
en 1933, puis, en 1935,« Refugees » (《逃亡》),
du même réalisateur, et « Sad Song of Life » (《生之哀歌》)
de Hu Rui (胡锐).
Mais, en 1935, les cinéastes de gauche quittent la Yihua qui
a pris une autre orientation.
Yang Hansheng poursuit sa carrière à la Mingxing (明星影片公司),
avec un scénario pour le film de Ying Yunwei (应云卫)
« A la vie à la mort » (《生死同心》).
C’est un sommet de l’art scénaristique de Yang Hansheng : il
dépasse la facture simpliste de ses premiers écrits de
fiction, en développant des thèmes qui vont au-delà de la
seule actualité.
L’histoire de « A la vie à la mort » se passe pendant les
années 1920, les seigneurs de guerre représentant
symboliquement le gouvernement du |
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A la vie à la mort |
Guomingdang et les guerres civiles l’invasion japonaise :
c’est une façon pour Yang Hansheng de faire une critique de
la politique nationaliste à mots couverts.

Ying Yunwei |
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L’intrigue du scénario est bâtie autour d’une méprise sur
l’identité de deux personnages : Liu Yuanjie (柳元杰),
un instituteur arrêté à la place de Li Tao (李涛),
un révolutionnaire qui s’est échappé de prison. Les deux
personnages sont présentés en miroir, et interprétés tous
les deux par
Yuan Muzhi (袁牧之). C’est l’image de l’identification de l’intellectuel au
révolutionnaire, illustrée par la coopération politique
entre Liu et Li et renforcée par l’histoire d’amour entre
Liu Yuanjieet la bouillante Zhao Yuhua (赵玉华),
interprétée à l’écran par Chen Bo’er (陈波儿),
l’épouse de Yuan Muzhi.
Le scénario, et le film, montrent comment l’intellectuel est
transformé par son alter ego pour devenir intellectuel
révolutionnaire, transformation dont la femme est l’élément
catalyseur.
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A la fin, Li Tao meurt sur le champ de bataille ; il est le
médiateur qui donne sa sanction à l’idéologie
révolutionnaire de Liu. Mais c’est Liu le vrai héros, celui
sans doute auquel s’assimile Yang Hansheng.
Il écrit encore un scénario pour un film réalisé par
Cheng
Bugao (程步高)
à la Mingxing, qui sort en 1936 : « Night Flight » (《夜奔》).
Mais, en décembre 1935 ont lieu des manifestations
étudiantes à Pékin contre les luttes internes, pour
privilégier la guerre contre le Japon, alors que la
politique nationaliste vise au contraire à éradiquer d’abord
les forces communistes. La tension monte. Yang Hansheng est
arrêté par le Guomingdang, avec Tian Han (田汉),
et relâché, mais gardé en résidence surveillée à Nankin. A
la fin de 1936 il écrit la pièce « La veille » (《前夜》),
contre les luttes de factions et l’esprit de capitulation.
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Yang Hansheng (à g.)
avec Guo Moruo (au centre, derrière)
et les actrices
de sa pièce « La veille », fin 1936 |
La politique du Front uni est établie séparément par chaque
camp au début de 1937….
Pendant la guerre : théâtre
L’Incident du Pont Marco Polo, le 7 juillet 1937, marque
l’entrée en guerre officielle du Japon. Le 9 août débute la
bataille de Shanghai, qui est occupée en novembre. Les
cinéastes et écrivains se réfugient à l’intérieur pour mieux
résister.
A l’automne, Yang Hansheng est libre de quitter Nankin et
part à Wuhan où il participe à la guerre de résistance dans
le cadre du Front uni. Avec Tian Han, Hong Shen, et
d’autres, il y organise et développe les activités de
théâtre. Ensemble, ils fondent l’Association théâtrale de
résistance antijaponaise de toute la Chine (中华全国戏剧界抗敌协会)
dans le but de créer des pièces de théâtre antijaponaises
en collaboration avec des dramaturges nationalistes.
Pendant la période de guerre,
Yang Hansheng
écrit sept pièces de théâtre, dont une adaptée d’un
scénario de cinéma et trois sur des sujets historiques sont
les plus célèbres.
1. En1937, il commence par créerla
pièce en cinq actes « La mort de Li Xiucheng » (《李秀成之死》) qui
est sans doute la plus célèbre. Elle se passe pendant la
révolte des Taiping qui sert d’image symbolique à travers
laquelle est évoquée de manière critique la situation de la
Chine sous le gouvernement du Guomingdang. Li Xiucheng est
un courageux général qui s’oppose à la politique désastreuse
du chef de la rébellion.
La pièce reflète les dissensions internes des Taiping. Mais
la symbolique va plus loin, comme l’a expliqué Yang Hansheng
lui-même : « J’ai tenté de rappeler la chute de notre
capitale en 1937 à travers l’évocation du siège de Nankin
sous les Taipings. » Mais en fait, à travers Nankin, Yang
Hansheng voulait évoquer la chute de Ruijin (瑞金)
dans le Jiangxi, première capitale dont les Communistes
furent chassés par les Nationalistes. Quant auxTaipings, ils
sont représentés comme des héros nationaux, à l’instar de
Sun Yatsen.
Tous les symboles furent, semble-t-il, bien perçus : la
pièce reçut une ovation enthousiaste lors de sa
représentation, en 1940 à Shanghai, dans une mise en scène
de Hong Shen (洪深), sous le titre « Li Xiucheng se sacrifie pour le pays »
(《李秀成殉国》).
2. En 1938, ensuite, à la demande des acteurs Zhao Dan (赵丹),
Tao Jin (陶金)
et autres, Yang Hansheng adapte en une pièce en 4 actes le
scénario du film « Tempête sur la frontière » ou
« Storm on the Border » (《塞上风云》),
film réalisé par Ying Yunwei (应云卫)
en 1940, avec Li Lili (黎莉莉)
et Shu Xiuwen (舒绣文).
La pièce, comme le scénario, est une histoire d’amour
contrarié entre un Chinois et une jeune Mongole qui
symbolise les antagonismes entre les deux peuples, sur fond
d’intrigues d’espions japonais. Les amoureux finissent par
résoudre leurs différends et unissent leurs énergies pour
s’opposer à leur ennemi commun. La pièce fait partie d’une
série d’œuvres écrites pour inciter le peuple chinois à
s’unir contre l’agresseur.
3. En 1941, avec ses amis le metteur en scène Ying Yunwei
etle dramaturge Chen Baichen (陈白尘),
Yang Hansheng crée la Société
chinoise du théâtre et des arts (中华剧艺社)
où il attire de nombreux acteurs. En septembre, avec la
troupe, il crée la pièce en six actes « Printemps et
Automnes du Royaume céleste » (《天国春秋》),
autre pièce symbolique sur le royaume des Taipings, mise en
scène par Ying Yunwei.
4. En 1942, il écrit une autre pièce historique, en cinq
actes, « Héros du maquis » (《草莽英雄》)
qui décrit la lutte des communistes du Sichuan à la veille
de la révolution de 1911. Mais cette pièce est interdite, de
publication et de représentation. Elle ne pourra être
représentée qu’à l’automne 1945.
5. En 1943, Yang Hansheng écrit alors une comédie satirique,
« L’homme au double visage » (《两面人》),
qui
est
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Printemps et Automnes
du Royaume céleste |
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représentée à partir de mars, à Chongqing et ailleurs. Il
s’agit d’une satire des politiques ambiguës du Guomingdang à
l’égard des Japonais.
Yang Hansheng s’attache à montrer les manipulations du
propriétaire d’une plantation de thé afin de se concilier
les différentes parties auxquelles il a affaire dans une
Chine divisée entre les diverses factions en guerre. Mais
ses manipulations deviennent apparentes pour tout le
monde, et il est forcé de prendre position. Là encore, la
pièce est symbolique : la plantation de thé est un
microcosme à l’image de la Chine entière.
6. En 1944, sa pièce en cinq actes « Le chant des
hibiscus » (《槿花之歌》)
est un chant patriotique dans une langue poétique.
1945-1949 : retour à l’écriture de scénarios
En juin 1946, Yang Hansheng revient à Shanghai et rejoint le
studio Kunlun (昆仑影片公司)
qui vient d’être créé, le mois précédent, et dont le premier
film, « Huit mille lis de nuages et de lune » (《八千里路云和月》),
sort en février 1947.
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Yang Hansheng délaisse les sujets historiques pour se
concentrer sur la satire sociale. Il écrit alors l’un de ses
meilleurs scénarios, qui en est un excellent exemple, celui
de « Dix mille foyers de lumière » (《万家灯火》)
réalisé par Shen Fu (沈浮) en
1948. Yang Hansheng y décrit la misère dans laquelle se
débat une famille et les conflits entre générations qu’elle
envenime, dans une Shanghai où la crise économique de
l’après-guerre rend la survie matérielle problématique. Le
film est considéré comme un chef d’œuvre du cinéma réaliste
de l’après-guerre.
Le second scénario dont Yang Hansheng se voit confier la
réalisation pendant cette période est celui de
« San Mao
le petit vagabond » (《三毛流浪记》),
adapté de la célèbre bande dessinée de Zhang Leping (张乐平).
Il écrit le scénario au début de 1948, et le tournage
commence à l’automne, mais doit être suspendu en raison des
menaces du Guomigdang. Il reprend
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Dix mille foyers de
lumières |
un
an plus tard, et le film sort pour les fêtes de la
libération de Shangha. Le film est un petit

Yang Hansheng (2ème à
partir de la dr.)
avec l’équipe de Dix
mille foyers de lumière, 1948 |
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chef-d’œuvre, le dernier film réalisé avant l’avènement du
régime communiste. C’est aussi un sommet de la carrière de
scénariste de Yang Hansheng.
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Après 1949
Années 1950 : travail culturel
Pendant la préparation du film, les menaces du Guomingdang
se multipliant, craignant pour sa sécurité, Yang Hansheng
est parti à Hong Kong, laissant Chen Baichen terminer les
dernières révisions du scénario. Il revient à Pékin en mars
1949, pour participer à la fin du tournage du film, mais
aussi aux diverses assemblées qui jalonnent cette période :
il est, entre autres, nommé délégué à l’assemblée nationale
des travailleurs de la culture qui se réunit en juillet, et
président de l’association nationale du cinéma… Le nouveau
régime le couvre de postes honorifiques.
De 1950 à 1954, il est directeur adjoint du bureau de Zhou
Enlai dont il a été proche pendant toute la guerre, ainsi
que de Guo Moruo (郭沫若).
A la fin de la décennie, il est secrétaire du Parti de la
Fédération nationale des arts et des lettres de Chine, et à
ce titre proche de Zhou Yang (周扬)
qui en est le vice-président.
Ce travail officiel l’empêche de beaucoup écrire. Il
recommence à partir de 1960.
1960-1964 : théâtre et cinéma
1. En 1960, il écrit une pièce en quatre actes sur la
réforme agraire, San renxing (《三人行》),
qui obtient le prix du ministère de la culture. C’est le
moment où, les difficultés s’aggravant dans les campagnes en
raison des excès du Grand Bond en avant, on rappelle au
public les progrès accomplis grâce à la réforme agraire, et
la nécessité des sacrifices qui ont dû être faits.
En 1963-1964, peu de dramaturges se risquent à publier et
mettre en scène de nouvelles œuvres, mais l’atmosphère
étantrelativement détendue, on ressort des pièces anciennes
qui trouvent une nouvelle signification.
C’est le cas de « La mort de Li Xiucheng », mise en scène en
février 1963 au China Youth Art Theatre. La pièce, en
défense du Front uni, était en ligne avec la politique de
l’époque qui appelait à la collaboration de tous contre
l’ennemi commun. Le sujet est toujours d’actualité. En
outre, Li Xiucheng était un courageux général des Taiping
qui avait risqué sa vie en s’opposant au chef des Taiping,
lequel refusait d’écouter les conseils de son entourage et
s’entêtait dans une politique qui menait droit à la défaite.
On pouvait y voir une allusion à l’attitude de Peng Dehuai
vis-à-vis de Mao…
2. En 1963, Yang Hansheng revient vers le cinéma et écrit le
scénario du film « Jiangnan dans le Nord » (《北国江南》),
réalisé par Shen Fu, qui est critiqué par Jiang Qing, Kang
Sheng et autres. Dans les années 1930, Tian Han, Xia Yan et
Yang Hansheng, entre autres, avaient traité de haut la jeune
actrice qu’était alors Jiang Qing, ne la jugeant pas digne
de tenir les premiers rôles qu’elle réclamait ; elle se
venge trente ans plus tard.
Yang Hansheng est
critiqué dans le cadre du mouvement de rectification du
Parti de 1964-65, mouvement étendu au cinéma, sous la
supervision du département central de la propagande.
« Jiangnan dans le Nord » est l’un des principaux
films attaqués, avec
« La boutique de la famille Lin » (《林家铺子》)
et
« Février printemps précoce »
(《早春二月》).
Le mouvement reste cependant limité, sans
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Jiangnan dans le Nord |
donner lieu à campagne massive… Ce n’est qu’attendre pour
mieux sauter.
Révolution culturelle

Yang Hansheng âgé |
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Malgré
son passé de communiste convaincu et militant,
Yang Hansheng est la cible d’attaques répétées en février et
mars 1966. Tian Han, Xia Yan, Zhou Yang et lui-même sont
désignés collectivement comme « les quatre vilains ».
Yang Hansheng passe neuf ans en prison. Il est réhabilité en
février 1979 et reprend ses fonctions honorifiques.
Il recommence à écrire, aussi, des essais, ses souvenirs...
En mai 1983, il revient dans sa région natale, et écrit
« Visite au pays » (《探望故园》)
et « Retour à Yibin » (《重回宜宾》). Il
s’éteint enjuin 1993.
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Note
(1) sur Mao Dun (茅盾), voir : www.chinese-shortstories.com/Auteurs_de_a_z_Mao_Dun.htm
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