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Le 19ème
Festival de cinéma de Shanghai aux couleurs du Tibet
par Brigitte Duzan, 18 juin 2016
La 19ème édition du festival de cinéma
international de Shanghai, qui a lieu cette année du
11 au 19 juin, comporte dans ses principales
compétitions une proportion étonnante de films
chinois tournés au Tibet, ou en zone tibétaine, avec
des acteurs tibétains et en langue tibétaine, mais
par des réalisateurs han.
C’est le cas de deux des trois films de fiction qui
figurent parmi les quatorze films en compétition
pour le prix principal, le Gobelet d’or ; mais il y
a aussi un documentaire sur le Tibet dans la section
documentaire de cette compétition. Par ailleurs, et
sans doute en raison même de cette situation
inédite, le réalisateur tibétain
Pema
Tseden
est membre du jury.
Les deux films chinois en compétition réalisés sur
des sujets tibétains sont de deux réalisateurs
chinois connus :
Liu Jie (刘杰)
et
Zhang Yang (张扬). |
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L’affiche de la 19ème
édition du festival |
Delan (Liu Jie) |
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Celui de
Liu Jie, « Delan »
(《德兰》),
a été tourné dans les zones tibétaines du nord du
Yunnan, province où Liu Jie a réalisé son film
précédent,
« Deep in the Clouds » (《碧罗雪山》),
de même que le film qui l’a rendu célèbre,
« Le dernier voyage du juge
Feng » (《马背上的法庭》).
L’un était en pays lisu, l’autre en pays
mosuo, deux des nombreuses ethnies minoritaires
de la province.
Le scénario de « Delan » met en scène un jeune
Chinois nommé Xiao Wang (小王)
dont le père est mort et dont il reprend le métier :
prêteur. Xiao Wang part donc faire la tournée des
villages tibétains où son père a des prêts en cours,
pour collecter les intérêts et les remboursements.
Dans l’un de ces villages, il tombe amoureux d’une
jeune Tibétaine nommée Delan, qui s’avère être
mariée et avoir une vie sentimentale compliquée…
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C’est un scénario qui prête à controverse, avec cette
histoire de Chinois han prêtant de l’argent à des
Tibétains, mais elle se passe en fait dans les années 1980,
ce qui contribue à enlever de sa sensibilité au sujet.
Le film de
Zhang Yang,
par ailleurs, « Soul on a String » (《皮绳上的魂》),
est adapté d’une nouvelle de l’écrivain tibétain
Tashi Dawa (扎西达娃)
:
« Tibet, une âme ligotée » (《西藏,系在皮绳结上的魂》).
Ce récit, publié en 1986, s’inscrit dans le
mouvement de réalisme magique qui s’est développé en
Chine dans les années 1980 et a pris une coloration
spécifique au Tibet, en particulier sous la plume de
Tashi Dawa. C’est cependant un style qu’il a
délaissé depuis de nombreuses années.
Le scénario conte l’histoire d’un chasseur cruel,
Tabei, qui, dans une forêt dense, tue un jour un
cerf. Or celui-ci avait dans la bouche une perle
dzi, perle protectrice de la tradition tibétaine.
Tabei est foudroyé par un éclair, mais ressuscité
par un lama pour qu’il puisse accomplir la mission
qui est désormais la sienne ; escorter la pierre
jusqu’à la terre sacrée de la paume de
Padmasambhava… Sur quoi il rencontre une |
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Soul on a String
(Zhang Yang) |
jolie bergère et un elfe muet, et se fait prendre en chasse
par des tueurs payés pour mettre la main sur la pierre…
On est curieux de voir comment un tel scénario sera mis en
scène.
Zhang Yang l’avait terminé
en 2007, mais il a entre temps passé l’année 2013 au Tibet
pour tourner « Path of the Soul » (《冈仁波齐》)
qui est une sorte de docu-fiction préparatoire.
Cock and Bull (Cao
Baoping) |
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Par ailleurs, un troisième film chinois est en
compétition pour le Gobelet d’or, et c’est un film
de
Cao Baoping (曹保平) :
« Cock
and Bull »
(《追凶者也》).
C’est un film policier dans la même veine que son
précédent, « The Dead End » (《烈日灼心》).
Dans une petite ville, un chauffeur de moto-taxi a
été assassiné et le réparateur de motos de la ville
est aussitôt soupçonné. Comme la police ne semble
avoir aucun indice, il prend l’affaire en mains pour
prouver son innocence, ce qui l’amène à retrouver le
voleur de la moto, mais à réaliser en même temps que
ce n’est pas lui qui a tué son propriétaire.
L’affaire, évidemment, se corse, avec un troisième
personnage…
Le rôle principal est interprété par
Liu Ye (刘烨),
et l’on fait confiance à
Cao Baoping pour la
mise en scène. Le film est |
a priori au moins intéressant que les succédanés de films
tibétains par ailleurs en compétition. Et nous passerons
sous silence le documentaire, « Roof of the World » (《第三极》),
d’un certain Zeng Hairuo (曾海若)
dont la marque de fabrique est le feuilleton documentaire
pour la télévision.
Voir par ailleurs les
films de
la compétition Nouveaux talents d’Asie
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