|
Zhang Ruifang
张瑞芳
Présentation
par Brigitte Duzan, 26 novembre 2015
Zhang Ruifang a été, avec Bai Yang (白杨),
Shu Xiuwen (舒绣文)
et Qin Yi (秦怡),
l’une des quatre grandes actrices surnommées dans
les années 1940 « les quatre grandes dan » du
théâtre et du cinéma (影剧界四大名旦),
par référence aux rôles féminins de l’opéra chinois.
Une actrice formée au théâtre
Née le 15 juin 1918 à Baoding, dans le Hebei, elle
entre en 1935 à l’Ecole des Beaux-Arts de ce qui
était alors Beiping pour étudier la peinture
occidentale. En 1938, elle est à Chongqing et
devient membre du Parti communiste.
Elle commence sa carrière au cinéma en 1940, dans un
film de Sun Yu (孙瑜)
intitulé, justement, « Baptême du feu » (《火的洗礼》).
Elle y interprète le rôle d’un agent double chinois
travaillant pour le Japon pendant la guerre de
résistance. |
|

Zhang Ruifang à ses
débuts |

Niu’er dans « Sur la
Sungari » |
|
Mais elle s’est consacrée au théâtre pendant tout le
reste de la guerre, dans une troupe de propagande
d’étudiants. En 1942, elle joue le rôle de Chanjuan
(婵娟)
dans la pièce de théâtre huaju « Qu Yuan » (《屈原》)
créée par Guo Moruo (郭沫若),
et remporte un énorme succès.
Son premier grand rôle au cinéma est, en 1947, celui
de Niu’er (妞儿)
dans le film de
Jin Shan (金山)
« Sur la rivière Sungari » (《松花江上》).
|
L’icône Li Shuangshuang
A partir de 1952, elle est l’une des grandes
actrices du studio de Shanghai. En 1956, elle
interprète le rôle de la mère, dans « Mère » (《母亲》)
de Ling Zifeng (凌子风), puis,
l’année suivante, celui de Jin Feng, le Phénix d’or
(金凤),
dans « Le Chant du Phénix » (《凤凰之歌》)
de Zhao Ming (赵明).
|
|

La mère dans le film
de Ling Zifeng |

Le phénix d’or |
|
Ce sont ces rôles qui en font une actrice en vue à la
fin des années 1950, mais, en 1956, elle a aussi
interprété le rôle de Ruijue (瑞珏)
dans le film
« Famille »
(《家》),
réalisé par
Chen Xihe (陈西禾)
d’après le roman éponyme de Ba Jin, rôle qu’elle
avait interprété au théâtre à Chongqing pendant la
guerre.
Cependant, c’est, en 1962, son rôle dans
« Li
Shuangshuang » (《李双双》)
de Lu Ren (鲁韧),
adapté d’une nouvelle de Li Zhun (李准),
qui fait d’elle une grande vedette de cinéma,
couronnée en 1963 du prix des Cent Fleurs de la
meilleure actrice. A travers ce rôle, elle devient
une image-symbole populaire, promue par le pouvoir
et façonnée par la publicité pour le film dans les
journaux.
|
Ainsi, en juin 1962, trois mois avant la sortie du
film, dans son numéro 5/6, la revue de cinéma
Shanghai Cinema (《上海电影》杂志)
publie des photos du film avec une photo de
l’actrice sur la couverture. Elle y apparaît dans
une image traditionnelle, de star féminine. Shanghai
Cinema disparaît en juillet.
Un an plus tard, en juin 1963, la publicité du film
est relayée par une autre revue, Mass Cinema (Dazhong
dianying《大众电影》),
et cette fois la photo de l’actrice est celle qui
l’immortalise dans le rôle de Li |
|

Sur la couverture de
Shanghai Cinema en juin 1962 |
Shuangshuang : dans un mouvement en avant, main en
porte-voix devant la bouche ouverte, sans

Le président Mao
lisant le numéro
de Shanghai Cinemade
juin 1962 |
|
arrière-plan, c’est l’image dynamique de
l’activiste pleine de fougue qui entraîne tout le
monde derrière elle, celle dont le premier ministre
Zhou Enlai aurait dit : si Zhang Ruifang voulait
prendre ma place, je la lui céderais volontiers…
La création de cette image très forte d’une femme
socialiste moderne, posée en exemple identitaire,
passe aussi par les articles sur l’actrice, qui
évacuent tout détail sur sa vie privée qui auraient
brouillé le message, comme son divorce et son second
mariage. Les critiques de l’époque parlant de ses
|
qualités d’actrice soulignent son interprétation naturelle,
très expressive, fruit de sa personnalité
chaleureuse, de son expérience dans la vie et de son
travail au théâtre ; mais ils en viennent
régulièrement à mettre en relief sa conscience
politique et son engagement sans faille à la cause
communiste, et, finalement, sa maîtrise de ses
sentiments plus que leur expression spontanée comme
fondement de son art.
C’est cette image iconique qui est restée associée à
Zhang Ruifang.
Dernier rôle en 1982
Au début de la Révolution culturelle, elle est
pourtant accusée d’être un agent du Guomingdang, et
passe deux ans en prison. Mais elle refait peu à peu
surface. En 1973, elle est élue représentante de
Shanghai au 4ème Congrès national du
Parti. |
|

L’image symbolique de
Li Shuangshuang |

Li Mai dans Le fleuve
impétueux |
|
Elle retrouve Li Zhun au lendemain de la Révolution
culturelle, en 1978, avec le rôle de la réfugiée Li
Mai (李麦)
dans « Le Fleuve impétueux » (《大河奔流》), adapté
par l’auteur de son dernier roman et
coréalisé au studio de Pékin par
Xie Tieli et Chen
Hua’ai (谢铁骊、陈怀皑).
C’est son dernier grand rôle.
|
En 1980, elle est nommée directrice de la Troupe de
théâtre de Shanghai et participe au sein de diverses
délégations à des festivals de cinéma. Mais sa
dernière apparition au cinéma date de 1982, dans le
rôle de la grand-mère Tao (陶奶奶)
dans « La fontaine Jingling » (《泉水叮咚》)
de la réalisatrice Shi Xiaohua (石晓华).
Elle se consacre dès lors à des fonctions
officielles.
En 2000, elle a ouvert une maison de santé pour
personnes âgées « partageant des |
|

La grand-mère Tao, en
1982 |
intérêts communs » dans le district de Changning à Shanghai.
 |
|
En 2007, elle a été décorée du prix du Coq d’or pour
l’ensemble de sa carrière. En novembre 2010, une
manifestation a été organisée à Shanghai pour ses 70
ans de carrière.
Elle est décédée le 28 juin 2012 à Shanghai, à l’âge
de 94 ans.
|
|
|