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Hasi
Chaolu 哈斯朝鲁
Présentation
par Brigitte Duzan, 23 mai 2020
Hasi
Chaolu est un scénariste et réalisateur chinois
originaire de Mongolie intérieure dont les premiers
films, dans les années 2010, témoignent d’un talent
original.
Les films
des années 2000
Né en
1966, Hasi Chaolu a fait des études de littérature
chinoise à l’université de Mongolie intérieure dont
il est sorti diplômé en 1989. Il est alors entré au
studio de Mongolie intérieure comme scénariste et
monteur, puis a réalisé des films pour la télévision
avant de passer au cinéma. Il s’est longtemps
proclamé « réalisateur amateur » parce qu’il n’a pas
étudié à l’Institut du cinéma de Pékin.
Il tourne
son premier long métrage en 2000, « L’histoire
de Zhula »
(《珠拉的故事》),
un drame humain traité avec |
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![](files/cineastes_Hasi_Chaolu.jpg)
Hasi Chaolu |
sensibilité. Le
berger mongol Gala (嘎拉)
perd un jour
sa femme et son
fils dans l’incendie criminel de leur maison ; alors qu’il
cherche le coupable, il rencontre Zhula qui vit seule avec
son fils depuis que son mari l’a quittée ; un amour très
simple unit bientôt les deux solitaires, mais leur bonheur
ne dure pas longtemps car le mari de Zhula revient de la
ville et veut reprendre son fils…
![](files/cineastes_Hasi_Chaolu_L_histoire_de_Zhula.jpg)
L’histoire de Zhula |
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![](files/cineastes_Hasi_Chaolu_Stirring_Trip_to_Motuo.JPG)
Stirring Trip to Motuo |
Après un film en
coréalisation, Hasi Chaolu
réalise un deuxième film qui sort en 2004, intitulé en
anglais « Stirring Trip to Motuo » (《心跳墨脱》).
Cette fois, le sujet est tibétain : Motuo est un village
isolé où un ouvrier à la retraite a fondé une école…
Le film suivant,
sorti en 2006,
est unanimement
considéré comme une réussite : c’est
« Le
vieux barbier » (《剃头匠》)
qui dépeint, dans un style où le documentaire se mêle à la
fiction, la vie des vieux hutong de Pékin en train de
disparaître.
![](files/cineastes_Hasi_Chaolu_Le_vieux_barbier.JPG)
Le vieux barbier
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![](files/cineastes_Hasi_Chaolu_Urtin_Duu.jpg)
Urtin Duu |
Deux ans plus
tard, Hasi Chaolu traite un aspect spécifique de la culture
mongole en en faisant un hommage personnel à un chant
traditionnel devenu « héritage oral intangible » :
« Urtin
Duu » (《长调》).
C’est un retour aux sources traité, ici aussi, avec une
touche d’authenticité et sans excès mélodramatiques.
Trailer
Avec ces quatre
films, et surtout les deux derniers, Hasi Chaolu s’est posé
en réalisateur sensible et plein de talent, en marge des
courants et des tendances.
Tournant en 2010
Depuis le début
des années 2010, cependant, Hasi Chaolu fait partie des
réalisateurs qui, travaillant dans les « studios de
minorités » comme le studio de Mongolie intérieure,
réalisent des films influencés par l’idéologie et la
politique cinématographique du gouvernement central qui les
finance. Il n’avait guère le choix. C’est l’époque où le
gouvernement a exercé une influence croissante sur le cinéma
chinois devenu « industrie cinématographique », avec une
double orientation, idéologique et commerciale.
Films
biographiques
Les années
2010-2012 sont pour Hasi Chaolu deux années de transition
marquées par la réalisation de films biographiques (传记电影)
destinés à rendre hommage à des héros du travail, dont le
premier, en 2010, « Instant de frayeur » (《惊魂时刻》)
qui revient sur une prise d’otages dans une usine de
Zhengzhou en décembre 1996, et l’action courageuse de la
policière du Bureau de la sécurité de la ville chargée de
résoudre l’incident. C’est l’un des films réalisés pour la
célébration de l’anniversaire de la fondation du Parti.
Autre exemple : le
documentaire sorti en février 2012, « Supervision de la
vie » (《生命监管》),
en hommage à l’action du camarade Ding’an (丁安同志),
« loyal gardien de la sécurité » (“安全发展忠诚卫士”)
dans le secteur minier. Ding’an était secrétaire du Parti
affecté à la supervision de la sécurité des mines de charbon
de l’est du Henan. Il est mort d’une crise cardiaque lors
d’une opération de sauvetage.
Le documentaire
est en fait une réponse aux nombreuses critiques qui
s’élèvent contre le manque de sécurité dans les mines de
charbon chinoises, et en particulier dans les nombreuses
mines illégales. C’est justement ce qui a inspiré
d’excellents films, comme, parmi les plus récents,
« People
Mountain People Sea » (《人山人海》)
de
Cai Shangcun (蔡尚君),
couronné l’année précédente, en 2011, du Lion d’argent à la
Biennale de Venise.
Produits et
financés dans le cadre de projets similaires à valeur
didactique et commerciale, les films suivants de Hasi Chaolu
ont de ce fait perdu la qualité esthétique de ses premiers
films. Ils entrent dans la catégorie dite des « films de
mélodie principale » (主旋律电影),
disons des
films qui ont un thème principal dont le gouvernement donne
le la.
Films « de mélodie
principale »
![](files/cineastes_Hasi_Chaolu_Thangka.JPG)
Thangka |
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En mai
2012, « Thangka » (《唐卡》)
raconte l’histoire d’un jeune garçon handicapé,
Gaga, qui, privé d’avant-bras, peint des thangkas.
Il est censé être la réincarnation d’un grand
peintre et a été amené à Lhassa pour apprendre la
peinture. Le film est aussi une réflexion sur la
tradition
face à la modernité, représentée par le fils du
maître, jaloux de Gaga, qui peint des thangkas dans
le style de Picasso.
Le film a
un fort contenu documentaire, montrant la vie des
jeunes apprentis dans les écoles. Le jeune qui
interprète le rôle principal de Gaga était lui-même
dans une école de thangka depuis sept ans quand il a
été recruté pour jouer dans le film. L’intention
initiale était de diffuser le film à l’étranger. Il
a été sélectionné au festival de Cannes.
Après une
série télévisée, Hais Chaolu est revenu au cinéma
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avec un film
visant à promouvoir une image de la vitalité de la culture
mongole.
Sorti sur
les écrans chinois fin avril 2018, « Gengis Khan »
(《战神纪》littéralement
« chronique du dieu de la guerre) est le premier
film commercial à gros budget réalisé par Hasi
Chaolu. Il a été produit par Jean-Jacques Annaud,
parallèlement à la préparation du projet de
coproduction franco-chinoise du
« Dernier loup »
(《狼图腾》).
C’est en fait une superproduction alignant douze
sociétés de production sous la houlette de China
Film. Il a été le film de clôture du 8ème
festival de cinéma international de Pékin le 2 avril
2018.
Contrairement aux films réalisés jusque-là sur le
sujet du grand conquérant mongol, « Gengis Khan »
traite de la jeunesse de Temujin. Mais il le fait
dans une approche fantastique, avec des éléments de
magie noire, en représentant à la fin le jeune
Temujin sous les traits de la réincarnation du dieu
de la guerre, luttant contre une gigantesque
créature démoniaque sous un ciel de tempête.
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![](files/cineastes_Hasi_Chaolu_Gengis_Khan.JPG)
Gengis Khan |
![](files/cineastes_Hasi_Chaolu_Le_dieu_de_la_guerre.JPG)
Le dieu de la guerre,
bataille finale |
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Hasi
Chaolu a défendu cette approche en soutenant que les
éléments de fantastique du film ont leurs racines
dans la culture et la religion mongoles, le scénario
étant fondé sur les traditions et légendes mongoles.
Il part d’un épisode crucial de la vie du jeune
khan : l’enlèvement de sa fiancée par une tribu
ennemie alors qu’ils allaient se marier, lui-même
étant chassé de la prairie de son enfance et devant
se réfugier dans les forêts avec les gens de sa
tribu ; c’est alors qu’il réalise qu’il lui faut
être fort pour défendre sa terre et les siens, et
qu’il a pour cela besoin de sceller des alliances.
Le film a
suscité de vives controverses, l’une étant le choix
des acteurs : trois des cinq principaux personnages
mongols sont interprétés par des Han, y compris le
jeune Gengis Khan, interprété par l’acteur
hongkongais William Chan. Hasi Chaolu a répondu
qu’en 2007, dans le film russe « Mongol », Gengis
Khan est interprété par l’acteur japonais Tadanobu
Asano, et que le personnage a même été auparavant
incarné |
par des acteurs
américains et russes. Hasi Chaolu prétend que le film
n’aurait pas obtenu le visa de censure si l’interprétation
avait posé un problème. Il a cependant avoué avoir d’abord
voulu un acteur d’origine mongole pour interpréter le rôle,
mais les investisseurs ont refusé, pour des questions de
rentabilité.
Trailer
Filmographie
(principaux films de fiction, hors
télévision)
2000 L’histoire de
Zhula
《珠拉的故事》
2003 Stirring
Trip to Motuo
《心跳墨脱》
2006
Le vieux barbier
《剃头匠》
2007 Urtin
Duu
《长调》
2012 Thangka
《唐卡》
2018 Gengis
Khan
《战神纪》
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