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Xiang Zi 相梓
Présentation
par Brigitte Duzan, 3 janvier 2020
Scénariste et réalisatrice née en 1987 à Pékin,
Xiang Zi représente une nouvelle génération qui fait
exploser les cadres de référence du cinéma chinois :
plus de grands studios, voire de studio tout court,
une voix personnelle, un style qui n’emprunte à
personne, des petits budgets qui imposent une grande
économie de moyens, y compris dans les choix
stylistiques, justement.
Avec son premier long métrage,
« A Dog Barking
at the Moon » (《再见南屏晚钟》),
Xiang Zi a été primée à la Berlinale en 2019. Elle
est au programme du
Festival du cinéma d’auteur chinois 2020 à
Paris.
Des forêts au cinéma
Elle n’avait pas prévu de faire du cinéma : elle est
sortie en |
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Xiang Zi |
2016 avec un BA en économie de l’Université de sylviculture
de Pékin (北京林业大学).
Mais, après avoir passé des journées entières dans les
arbres, comme aurait dit Duras, tout en écrivant des poèmes
et des nouvelles,
elle a choisi une reconversion radicale : elle est partie à
New York faire des études de cinéma.
C’est du moins ainsi que son parcours est synthétisé dans
ses biographies courantes. Mais cela ne s’est évidemment pas
passé de manière aussi soudaine et abrupte. Elle a commencé
par une sensibilisation au cinéma à Pékin. En septembre
2009, elle a fait un stage d’un mois à l’Institut de cinéma
Li Xianting (栗宪庭电影学校)
à Songzhuang (宋庄),
formation orientée vers la production et en particulier le
contrôle des coûts de production. Elle a eu là pour
professeurs Wang Hongwei (王宏伟),
ex-acteur fétiche des premiers films de
Jia Zhangke, qui était alors directeur du
Festival de cinéma indépendant de Pékin, à Songzhuang (北京独立影像展)
,
ainsi que les cinéastes
Ying Liang (应亮)
et
Yang
Jin (杨瑾).
Xiang Zi à Berlin avec
son mari José Val Bal et l’actrice Nan Ji |
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Au bout du mois, elle a réalisé son premier court
métrage, « The Wanted », suivi d’un deuxième en
2010. C’est alors qu’elle a posé sa candidature à la
New York Film Academy, où elle est arrivée le 1er
janvier 2011.
Après avoir épousé là un camarade de promotion
espagnol, José Val Bal, elle est partie avec lui en
Espagne.
Elle a alors réalisé, en collaboration avec lui, une
série de courts métrages. |
Filmographie 2009-2013
(courts métrages)
2009 The Wanted
2010 9 o’Clock
2011 Boat to Thailand; The Last Zebra in New York;
Paganini for Two;
2012 The Temptation of Vanity
2013 Lycoris Radiata (Manjusaka)
Puis, après une expérience ratée de production d’une série
internet, elle a commencé en 2017 à écrire le scénario de
son premier long métrage :
« A Dog Barking
at the Moon » (《再见南屏晚钟》).
A Dog Barking at the Moon
Après une première version du scénario terminée en
août 2017 une période de réflexion et maturation, et
diverses réécritures, elle a commencé le tournage en
juin 2018 – tournage rapide, achevé en 18 jours. En
effet, elle a financé le film elle-même, grâce à une
sorte de crowdfunding auprès de ses amis et proches,
le sujet ayant rebuté les financiers chinois
potentiels car il excluait quasiment de facto toute
possibilité de sortie en Chine.
Il s’agit en effet d’une histoire familiale dont les
ressorts reposent sur des drames inavoués, car
socialement inavouables. Après des études aux
Etats-Unis, rentrée chez elle voir ses parents alors
qu’elle attend un premier enfant, une jeune femme se
retrouve en butte à l’hostilité hargneuse de sa mère
et à l’indifférence distante de son père. Les
relations familiales déjà tendues se sont exacerbées
quand la mère a découvert que son mari avait des
relations homosexuelles. Prise entre les deux, leur
fille aurait préféré |
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A Dog Barking at the
Moon |
qu’ils divorcent… Elle en est toujours là, des années plus
tard, mais son retour est l’occasion de découvrir bien
d’autres secrets amers, dissimulés dans un non-dit d’autant
plus douloureux.
Partiellement autobiographique, c’est un film douloureux
autant que l’histoire elle-même. Il a été produit en
Espagne, par José Val Bal, remporte des succès mérités à
l’étranger, mais il est toujours irrecevable en Chine,
peut-être plus que jamais. Les dernières images sont d’une
beauté renversante, comme l’image éblouissante d’un bonheur
interdit. On en reste longtemps marqué.
Ce n’est pas l’un des moindres mérites du film que
d’inciter, longuement, à la réflexion.
On se demande ce Xiang Zi va nous offrir maintenant….
A lire en complément
L’interview de Xiang Zi par le Goethe Institut de Berlin au
moment de la Berlinale, en février 1919 (en chinois)
https://www.goethe.de/ins/cn/zh/kul/sup/b19/21503810.html
Elle dit avoir toujours aimé écrire et a décroché en
1998 le 1er prix du concours national
d’écriture pour les écoliers, la Coupe Lei (春蕾杯全国作文竞赛)
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