Accueil Actualités Réalisation
Scénario
Films Acteurs Photo, Montage
Musique
Repères historiques Ressources documentaires
 
     
     
 

Films

 
 
 
     
 

Adaptations cinématographiques de légendes et contes chinois

La légende du serpent blanc

par Brigitte Duzan, 10 décembre 2017, actualisé 31 octobre 2021

 

1.       La légende

 

Source : une très ancienne légende selon laquelle deux esprits maléfiques, un serpent blanc et un serpent vert (ou poisson bleu), ont été emprisonnés, pour les empêcher de nuire, sous la pagode du Pic du tonnerre, au bord du lac de l’Ouest, à Hangzhou.

 

Résumé de la version la plus courante

 

Un esprit-serpent est sauvé par un homme et fait vœu de lui rendre son bienfait dans une existence ultérieure. Avec un petit serpent vert devenu son compagnon, il médite durant un millier d’années dans une grotte. Les deux serpents, ayant acquis des pouvoirs magiques, prennent la forme de deux jeunes femmes. Le serpent blanc se met alors à la recherche de la réincarnation de son bienfaiteur : il se nomme Xu Xian (许仙), est pauvre, et tient une petite boutique d’apothicaire près de Hangzhou. Les deux femmes vont donc flâner autour du Lac de l’Ouest et finissent par le rencontrer. Pour engager la conversation, comme le jeune homme tient un parapluie, le serpent blanc use de ses pouvoir pour faire pleuvoir ; Xu Xian offre donc de les raccompagner. Le serpent blanc se présente comme Bai (blanc) Suzhen (白素贞), fille d’une famille riche [1], et le serpent vert comme sa servante Xiaoqing (小青) [la petite verte].

 

Xu Xian et Bai Suzhen finissent par se marier, et la pharmacie prospère grâce à la magie du serpent ; un héritier s’annonce, tout va pour le mieux, mais un jour, Xu Xian croise un moine bouddhiste nommé Fahai (法海) qui détecte tout de suite la présence d’un esprit. Il le prévient du danger, mais Xu Xian ne le croit pas. La fête des bateaux dragons approchant, le moine lui donne alors pour sa femme enceinte une fiole de vin soufré, bu traditionnellement ce jour-là pour prévenir les maladies. Xu Xian réussit à en faire boire un peu à Bai Suzhen

 

Le Jingshi tongyan de Feng Menglong

 

Les belles histoires du lac de l’Ouest

malgré sa résistance. La potion dévoilant sa vraie forme, son mari tombe raide mort de frayeur.

  

La Pagode du Pic du tonnerre, peinture

d’un artiste occidental du 18ème sciècle

 

Bai Suzhen part alors sur le mont Kunlun demander à une divinité taoïste une potion magique pour ressusciter son mari, mais, décidé à débarrasser la ville du serpent, le moine enlève Xu Xian et l’enferme dans le temple de la Montagne d’or (金山寺). Bai Suzhen et Xiaoqing essaient de les en faire sortir en inondant le temple, mais l’accouchement se déclenche, ce qui diminue les pouvoirs de Bai Suzhen. L’inondation devient incontrôlable, entraîne la rupture d'un pont et fait des victimes ; Bai Suzhen est punie par les divinités. Affaiblie,

elle est capturée par le moine qui l’emprisonne sous la pagode du Pic du tonnerre (雷峰塔).  

 

[Ajout tardif : plusieurs années plus tard, son fils, que Xiaoqing a ramené à son père, passe avec succès les examens impériaux et délivre sa mère].

 

Voir l’histoire de la légende et son évolution :

http://www.chinese-shortstories.com/Histoire_litteraire_Hist_legende_serpent_blanc.htm

 

Adaptations en opéras

 

- Adaptation en opéra du Sichuan, avec une originalité : le Serpent bleu est un homme jaloux, et la pièce comporte les changements instantanés de maquillages propres à cet opéra (bianlian《变脸》) qui créent des effets de surnaturel et de magie.

 

- Opéra Kunqu : La Pagode du Pic du tonnerre 雷峰塔 première adaptation par Huang Tumi () au début des Qing.

 

- Opéra de Pékin : le Serpent blanc est héroïne lyrique et le Serpent bleu (ou vert) son double martial.

Livret de Tian Han (田汉) de 1952 et création par Mei Lanfang.

Tournée en France de la compagnie nationale de Chine en 2014.

 

2.       Principales adaptations cinématographiques

 

a) Cinéma chinois

(Chine continentale, Hong Kong et Taiwan)

 

1926 et 1927

Premières adaptations de la légende au cinéma, produites par le studio Tianyi (上海天一电影公司) à Shanghai.

1926 The Legend of the Righteous Demon White Snake (《义妖白蛇传》), premier film dont le titre renvoie à la version de la légende éditée en 1772.

1927 The Sacrificial Pagoda (仕林祭塔), avec Hu Die (胡蝶) dans le rôle de la Dame blanche Bai Niangzi.

 

1939

The Legend of the White Snake 白蛇传 : adaptation réalisée par Yang Xiaozhong (杨小仲) au studio Huaxin (华新影业公司) à Shanghai, avec Chen Yanyan (陈燕燕) dans le rôle de la Dame Blanche Bai Niangzi (白娘子).

Le scénario part de la recherche de Bai Niangzi par son fils, mais l’histoire est légèrement différente de la légende, traitée dans une approche plus réaliste : Bai Niangzi a été accusée à tort d’être un esprit maléfique.

 

Le Serpent blanc, film 1939

 

The Legend of the White Snake, 1939

 

1955

Le Pont cassé (《断桥》) : adaptation en opéra kunqu interprétée par Mei Lanfang (梅兰芳) et tournée aux studios de Pékin.

 

1962

Madam White Snake (白蛇传), film hongkongais de la Shaw Brothers réalisé par Yue Feng (岳枫), avec Linda Lin Dai (林黛) dans le rôle du Serpent blanc.

 

Il s’agit d’une adaptation en opéra huangmeixi qui est le second d’une série de films de ce genre réalisés en mandarin à Hong Kong après le succès rencontré par ces films en Chine continentale à partir de 1955. Le premier film de la série était « The Kingdom and the Beauty » (《江山美人》) en 1959, également avec Lin Dai dans le rôle principal et le chant célèbre « Heavenly Maiden Spreading Flowers » (Tiannü sanhua天女散花). « Madam White Snake » comporte dix-huit chants du même genre, influencés par les films huangmeixi du Continent, Le thème du film s’exprime dans la ligne principale de l’un des chants : pour être heureux il faut aller dans le monde des humains (“yao kuaile dao renjian 要快乐到人间).

 

Madam White Snake 1962

 

Madam White Snake (extrait, 8:04)

 

1969 

Black Bull and White Snake (《黑牛与百蛇》), film taïwanais réalisé par Lin Fu-ti (林福地), avec Chiang Ching (江青) dans le role du Serpent blanc et Tien Yeh (田野) dans celui de son mari.

 

Le film ne s’inspire de la légende que par la référence au Serpent blanc ; il se passe au début de la République de Chine, et il est bien plus inspiré par les films d’arts martiaux, chinois et japonais.

 

Black Bull and White Snake

 

1975

Snake Woman’s Marriage (Baishe danao tiangong白蛇大鬧天宮ou Xin Baishezhuan新白蛇传), film taïwanais réalisé par Sun Yang le genre comédie kungfu et produit par une compagnie de Hong Kong, avec Chia Ling dans le role principal.

 

On assiste à une humanisation progressive du Serpent blanc avec association du comique, de l’érotique et d’éléments d’arts martiaux, selon le schéma thématique du film : le lettré devenu héros martial sauve la belle, et la belle en retour sauve le héros hero (yingxiong jiumei, meijiu yingxiong 英雄救美,美救英雄).

 

1980

White Snake (白蛇传) réalisé par Fu Chaowu (傅超武) au studio de Shanghai.

Adaptation en opéra de Pékin selon le livret du grand dramaturge Tian Han (田汉) publié en 1952, avec Li Bingshu (李炳淑) dans le rôle du Serpent blanc.

Filmé par Huang Shaofen (黄绍芬), grand chef opérateur qui avait signé, en 1954, la photographie du film de Sang Hu (桑弧) sur une autre grande légende adaptée en opéra, celle de « Liang Shanbo et Zhu Yingtai » (《梁山伯与祝英台》).

 

White Snake, 1980, extrait (17’22) https://v.qq.com/x/page/a0337kgdj8v.html

 

Green Snake, 1993

 

1993

Green Snake 青蛇 film hongkongais de Tsui Hark (徐克) avec Maggie Cheung dans le rôle du Serpent vert et Joey Wong dans celui du Serpent blanc qui sont ici deux sœurs.

Scénario de Tsui Hark et Lillian Lee (李碧华), adapté du roman de cette dernière publié en 1993 et inspiré par la légende, mais contée du point de vue du Serpent vert.

 

Le film baigne dans une atmosphère d’érotisme diffus, le serpent blanc voulant goûter aux joies de l’amour, le serpent vert, jalouse, voulant tout partager avec elle, et le moine Fahai faisant tous ses efforts pour ne pas succomber à leurs charmes.

 

 

Green Snake, 1993, chinois mandarin, sous-titres anglais

 

2011

The Sorcerer and the White Snake白蛇传说之法海film hongkongais de Ching Siu-tung (程小东) où le moine Fahai est le personnage principal.

Film d’action dans le genre fantastique, réalisé par un grand chorégraphe de films d’arts martiaux, avec une pléthore d’effets spéciaux (en 3D), mais peu convaincant.

 

Tout l’accent est mis sur les deux rôles masculins principaux, Fahai et son disciple. Fahai est ici un moine pourchasseur de fantômes dont il est obsédé ; il est interprété par Jet Li (李连杰) tandis que son disciple est interprété par Wen Zhang (文章), l’acteur qui incarnait son fils autiste dans le film de Xue Xiaolu (薛晓路) « Océan Paradis » (《海洋天堂》) sorti l’année précédente au festival de Shanghai, interprétation couronnée du prix des médias.  

 

The Sorcerer and the White Snake, 2011

 

Le film, sous-titres chinois

 

b) Cinéma japonais

 

Legend of the White Snake, Japon 1956

 

1956

The Legend of the White Snake (Byaku fujin no yoren白夫人の妖恋) ou L’étrange amour de la dame blanche, de Shiro Toyoda avec, dans le rôle principal, l’actrice japonaise née en Mandchourie Yamaguchi Yoshiko (ou Li Xianglan 李香兰).

Coproduit par la Toho et la Shaw Brothers. Premier film de la Toho avec effets spéciaux en couleur.

 

 

The Legend of the White Snake, 1956, bande annonce

 

1958

The Tale of the White Serpent白蛇傳 : film d’animation du studio Toei réalisé par Taiji Yabushita (et Kazuhiko Okabe, directeur artistique), premier long métrage d’animation en couleur réalisé au Japon qui a exercé une grande influence sur le réalisateur Miyazaki Hayao en particulier qui lui a rendu hommage.

L’une des rares représentations de Xiaoqing en petit poisson métamorphosé en petite fille.

 (avec adjonction d’un panda et d’un renard, animaux de compagnie de Xu Xian)

 

Les premières minutes du film racontent comment un jeune garçon, Xu Xian, ayant acheté un petit reptile blanc, a dû le relâcher dans la campagne, ses parents refusant de l’accueillir chez eux. Le film commence des années plus tard. Lors d’un orage, l’animal se transforme en une belle princesse aux pouvoirs magiques nommée Bai Niang, accompagnée de son poisson de compagnie transformé en servante. Amoureuse de Xu Xian, Bai Niang rêve de le revoir. Tout va bien jusqu’à ce que le moine Fa Hai entreprenne d’éradiquer le serpent.

 

Réalisé en dessins sur celluloïd, le film joue avec délicatesse et humour sur toute l’imagerie des contes animaliers et de la légende du Serpent blanc, mais en terminant sur une séquence de mélo classique avec un Fa Hai bénissant béatement l’union du serpent et de son amour terrestre.

 

The Tale of the White Serpent, 1958, en chinois, sous-titres chinois (30’17)

https://www.bilibili.com/s/video/BV1oC4y1p7LL

 

c) Cinéma coréen

 

1960

Madam White Snake Baeksa Buin 백사 부인, de Shin Sang-ok

Avec la grande actrice Choi Eun-hee, épouse et muse du réalisateur.

(rétrospective au festival des 3-Continents 2017, reprise au musée Guimet décembre 2017)

 

Shin Sang-ok reprend la légende en y ajoutant des éléments personnels, dont l’intervention de Guanyin, le boddhisattva de la compassion, qui, touchée par la force de l’amour humain, décide de sauver le couple. On retrouve aussi dans ce film un trait récurrent du cinéma de Shin Sang-ok : la peinture du désir, et la contrainte des traditions sociales ; ici, comme dans nombre de ses films, un haut fonctionnaire tente d’user de sa position pour forcer le Serpent blanc à lui céder.

 

Le Serpent blanc, la scène de la séduction, par Shin Sang-ok

 

Madam White Snake, 1960, en vo avec sous-titres anglais

 


  

A lire en complément

 

- L'origine et le style de la légende du Pic du Tonnerre dans la version des Belles histoires du lac de l'Ouest, André Levy, Bulletin de l'École française d'Extrême-Orient, 1967, n° 53-2, pp. 517-535.

A lire en ligne : http://www.persee.fr/doc/befeo_0336-1519_1967_num_53_2_5056

 


 

[1] Aussi appelée Bai Niangzi (白娘子), la dame Blanche.

 

 

     

 

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



Qui sommes-nous ? - Objectifs et mode d’emploi - Contactez-nous - Liens

 

© ChineseMovies.com.fr. Tous droits réservés.

Conception et réalisation : ZHANG Xiaoqiu