Le
« Confucius » de Fei Mu : le fruit de recherches
stylistiques, entre théâtre et cinéma
par Brigitte
Duzan, 03 décembre 2013,
actualisé 7 octobre 2022
Achevé fin
1940, considéré comme perdu pendant une demi-siècle,
puis miraculeusement retrouvé et minutieusement
restauré, le « Confucius » (《孔夫子》)de
Fei Mu (费穆)a,
de par son histoire autant que par son sujet, une
aura quasi mythique qui fait presque oublier ses
qualités – ou ses défauts - intrinsèques.
C’est un
donateur anonyme surgi des nimbes du passé qui en a
un jour, il y a plus d’une dizaine d’années
maintenant, apporté une copie (35 mm) aux Archives
du film de Hong Kong. On sait maintenant qu’il
s’agissait d’un second montage, réalisé après la
guerre, en 1948, pour tenter de donner une nouvelle
vie au film, mais sans l’aval de Fei Mu.
La
restauration a donc été effectuée en deux temps :
une première phase, en 2008, au
laboratoire L’Immagine Ritrovata, à Bologne, a
permis de rassembler les matériaux d’origine et de
les traiter pour atténuer les rayures tout en
restaurant une bonne partie de la bande son. Puis,
dans une seconde phase, en 2010, on a réinséré des
passages du premier montage
Confucius, l’affiche
du film restauré
coupés en 1948 et retrouvés, environ neuf minutes au total.
Le résultat est étonnant. Les bobines n’ont pas été collées
pour ne pas risquer de déchirer le film. La projection se
fait donc bobine par bobine, avec un son aléatoire par
moment : on a l’impression de vivre une cérémonie secrète,
avec quelques initiés privilégiés, hors du temps (1). Malgré
la magie que dégagent ces images miraculées, on reste
incertain, hésitant, perplexe, mais on est longtemps hanté
par une œuvre dont la signification ne se décante et
décrypte que peu à peu.
Un Confucius
frustré dans ses aspirations
Le film de Fei Mu
demande d’abord une certaine connaissance du contexte
historique de la fin de la période des Printemps et Automnes
pendant laquelle il a vécu.
Le contexte
historique
Carte des Etats vers
500 avant Jésus-Christ
Le début du
film se situe aux alentours de l’an 500 avant JC,
dans l’Etat de Lu (鲁国),
l’Etat natal de Confucius, alors que celui-ci a déjà
atteint la cinquantaine. L’Etat de Lu était
l’apanage du duc Ding (鲁定公),
arrivé au pouvoir en 509, mais le pouvoir effectif
était en fait partagé entre trois clans très
puissants, descendants du duc Huan de Lu
(鲁桓公) :
les familles Ji
季,
Meng
孟,
et Shu
叔.
Après avoir
maté une rébellion, le duc et les trois familles
rétablirent l’ordre en 501. Confucius s’était bâti
une certaine notoriété en prônant les valeurs de
droiture et de loyauté pour légitimer un bon
gouvernement ;
c’est ce que
cherchait alors le duc Ding : Confucius fut nommé gouverneur
de la ville de Zhongdu (中都宰),
puis ministre des Travaux publics (司空),
et
enfin, en 497, ministre de la justice (大司寇).
Pendant
cette période, il tenta de réduire la puissance des
trois familles pour rétablir le pouvoir du duc
“comme au temps des Zhou”, cette royauté réduite à
un minuscule bout de territoire, qui n’était déjà
plus qu’un faible souvenir de sa grandeur passée. Et
pour réduire leur puissance, il s’attacha à faire
raser les enceintes de leurs places fortes, en
avançant comme justification que c’étaient des
points stratégiques qui permettaient aux rebelles
récurrents de se fortifier et tenir tête au pouvoir.
Le xingtan du temple
de Confucius à Qufu
Il réussit à faire
raser les fortifications de la ville de Hou (celle du clan
Shu) en 498, puis celles de Bi (du clan Ji) peu après. En
revanche, il ne put faire raser celle de la place forte de
la famille Meng. Non seulement Confucius avait échoué dans
son plan, mais il s’était en outre fait des ennemis dans
tout l’Etat, et s’était en particulier attiré la haine de la
puissante famille Ji.
En outre,
les Etats voisins étaient inquiets de son influence
grandissante sur le duc Ding, surtout l’Etat de Qi.
Le duc de Qi tenta de saboter les réformes
entreprises par Confucius en envoyant au duc Ding un
contingent de jeunes beautés et une centaine de
superbes chevaux pour le détourner des affaires de
l’Etat. En dépit des remontrances de Confucius, le
duc délaissa pendant trois ajours ses obligations
publiques, comme le montre une séquence du film.
Déçu par
l’échec de sa tentative de réforme de la morale
publique, et menacé par ses ennemis, Confucius décida de
partir prêcher sa doctrine dans les Etats voisins. Il resta
absent de chez lui pendant quatorze ans, et revint après
avoir été rejeté de partout, et avoir vu mourir ses
disciples les plus chers. C’est un homme désabusé qui mourut
en 479, à l’âge de 72 ans, après avoir écrit la chronique
des « Printemps et Automnes » (《春秋》)
pour
que la leçon n’en soit pas perdue.
Les options
narratives du film
C’est cette
histoire d’échecs et d’humiliations successifs que
retrace le film de Fei Mu, en soulignant les misères
et souffrances endurées, physiques autant que
morales, tout au long de ce lent cheminement sur les
routes de principautés plus ou moins en constant
état de guerre. L’accent est mis sur la dimension
politique de Confucius.
Fei Mu a
construit son film en une suite de scènes, comme au
théâtre, en faisant alterner celles représentant
les acteurs politiques et leurs agissements, et, en
regard, celles montrant, ou évoquant, leurs
répercussions
Présentation des trois
disciples au début du film,
de g. à d. devant
Confucius : Zi Lu, Zi Gong et Yan Hui
sur la vie de Confucius et de
ses disciples. Les principales scènes sont accompagnées
d’intertitres explicatifs indiquant des citations des deux
textes de référence dont s’est inspiré Fei Mu : les
Analectes (《论语》)
et
le chapitre des Maisons héréditaires (世家)
des « Mémoires historiques » (《史记》)
de
Sima Qian (司马迁)
concernant Confucius (2).
La cour de Wei dans le
film
Le film
commence par poser l’environnement politique, avec
une évocation d’une attaque de Qi contre Lu, puis
présente les trois principaux disciples de
Confucius, en soulignant leurs vertus personnelles,
comme indiquées dans les Analectes : Zi Lu (子路),
courageux et combatif, Zi Gong (子贡),
doté d’un esprit vif et de dons d’orateur, et Yan
Hui (顔回),
le
disciple préféré, mort à trente ans, possédant la
vertu humaine du ren (仁).
Les scènes
suivantes évoquent les conflits de Confucius avec
les « traîtres de Lu » (4) au
moment où
Confucius est nommé à différentes charges par le duc de Lu –
scènes construites en alternance avec des séquences montrant
Confucius enseignant à ses disciples, dont la fameuse scène
de l’Autel des abricotiers ou xingtan (杏坛),
souvent illustrée en peinture.
Puis,
après la désillusion finale, devant l’impossibilité
de convertir le duc Ding à ses vues, Fei Mu le
montre partant sur les routes dans un misérable
chariot, suivi de sa cohorte de disciples à pied.
Une carte dessinée dans du sable indique les étapes
de son parcours : les Etats de Wei (衞/卫),
Song (宋),
Chen (陳/陈)
etCai (蔡),
pour finir séparé de ses disciples, comme « un chien
errant ».
Le film
relate alors les diverses étapes d’une sorte de
descente aux enfers, dépeints dans les Analectes
comme les « trois désastres » : Confucius et ses
disciples sont attaqués par des rebelles alors
qu’ils passent par la ville de Kuang (匡),
à la frontière de l’Etat de Wei, vers 496 avant JC ;
vers 492, en chemin vers la capitale de l’Etat de
Song, ils sont à nouveau attaqués par des bandes de
hors-la-loi ; et en 489, dans l’Etat de Chen, ils
sont encerclés comme des éléments dangereusement
subversifs ; à court de provisions, ils seront
sauvés par une intervention de l’armée de Chu (楚国).
Confucius
n’est cependant plus qu’un homme brisé, qui revient
seul chez lui, après quatorze ans d’errances, pour
écrire et laisser à la postérité son témoignage amer
sur
Confucius jouant du
qin pour ses élèves devant l’Autel des abricotiers,
le xingtan
son temps :
les « Printemps et
Automnes ». Il meurt après avoir une dernière fois prononcé une
longue harangue moralisatrice devant un unique petit
disciple.
Un condensé des
recherches stylistiques de Fei Mu en 1940
Le film paraît de
prime abord hiératique et théâtral. C’est exactement l’effet
recherché par Fei Mu. Mais il a aussi glissé des pointes
ironiques de comédie qu’il convient également de remarquer.
Son film est habilement construit sur des oppositions, les
scènes de politique et stratégie militaire alternant avec
celles traitant de la vie de Confucius, le mouvement des
unes étant opposé à la solennité des autres, et les scènes
dramatiques ponctuées de traits satiriques.
Une théâtralité qui
se veut universelle
Composition type avec
ouverture sur l’extérieur,
cadrée dans une porte,
et donnant sur un décor peint
Comme
beaucoup d’autres cinéastes chinois, surtout à son
époque, Fei Mu aura passé une bonne partie de sa
carrière à réfléchir sur les rapports du cinéma avec
le théâtre qui en avait été l’inspiration initiale.
Après
avoir, en 1936, réalisé un film en rupture avec les
influences théâtrales, « Du sang sur la montagne aux
loups » (《狼山喋血记》),
Fei Mu a, l’année suivante, adapté un opéra, « Meurtre
dans l’oratoire » (《斩经堂》), où
il a tenté une fusion de styles : un mélange
de naturalisme et de formalisme jouant sur la
stylisation des rôles dans l’opéra
chinois. Il y fut
aidé par le grand interprète Zhou Xinfang (周信芳) avec lequel il le réalisa, qui insista pour avoir des décors
réalistes, mais en conservant les codes et conventions de
l’opéra.
« Confucius » est à replacer dans la continuité de
ces recherches stylistiques, l’accent étant mis
cette fois sur le style et les conventions du
théâtre, et de l’opéra chinois, comme étant les
mieux à même de traduire le caractère emblématique
d’un personnage dont il s’agissait de rendre la
dignité dans un contexte de chaos politique. Mais le
film est même à replacer au-delà du cadre proprement
chinois, dans la tradition des représentations des
grandes tragédies, tragédies grecques ou tragédies
de Shakespeare, par la stylisation et le symbolisme
sur lequel il s’appuie.
Cadrage de la tête de
Confucius dans l’ouverture d’une fenêtre (avec un
jeu d’ombre portée)
Tragédie et satire
Composition avec
Confucius au centre, éclairé
par la lumière venant
de la fenêtre, et ses disciples
en arrière plan, dans
l’ouverture de la porte,
le corps de Confucius
en épousant la forme
Cependant,
Fei Mu ne s’est pas enfermé dans un style unique et
homogène ; de la même manière qu’il a alterné les
scènes avec et sans Confucius, il a alterné des
scènes dramatiques et d’autres qui présentent des
éléments satiriques,
à la limite parfois du
burlesque.
Il a
intégré parmi les personnages politiques, dans les
différents Etats que travers Confucius, une
diversité de rôles qui rappellent les personnages
types de l’opéra chinois, et qui font figurer aux
côtés des personnages principaux, des rôles de
jing (净)
ou visages peints, où se trouvent des traîtres, et
de chou (丑)
qui sont des personnages comiques.
Le duc Ling de
Wei, par exemple, est un personnage traité sur le mode
ironique, personnage faible se laissant mener par les
caprices de son épouse Nanzi (南子).
Quant à la politique des Etats, elle est, dans l’ensemble,
présentée comme un exercice de rhétorique, voire un jeu de
go, comme le montre expressément une scène.
Stylisation et
symbolisme des images
Comme au théâtre,
le film est divisé en scènes individualisées que Fei Mu est
allé jusqu’à mettre en scène dans des décors de toiles
peintes, contrairement à son adaptation de l’opéra « Meurtre
dans l’oratoire » en 1937 (5). La stylisation extrême permet
de faire ressortir les dialogues, et en particulier les
citations des Analectes qui parsèment le film ; leur
déclamation par Confucius, sur un ton très théâtral, est
parfaitement en ligne avec la stylisation de l’image, les
deux se renforçant.
Le film
débute par deux images symboliques qui définissent
dès le départ la personnalité de Confucius telle
qu’elle est illustrée par Fei Mu. Une première image
du Christ en croix situe Confucius dans une
longue lignée de figures christiques ; ce symbole
est repris de façon liminaire à plusieurs reprises,
par exemple dans la séquence où Confucius et ses
disciples sont encerclés dans l’Etat de Chen et à
court de vivres : l’image des disciples endormis
dans le camp rappelle l’iconographie du Christ au
mont des Oliviers. De la même manière, quand meurt
le disciple préféré, Yan Hui, la caméra filme en
Image christique au
début du film
plan rapproché le
visage de Confucius qui s’écrie : Le Ciel me détruit, Le
Ciel me détruit (天丧予!
天丧予!),
ce qui n’est pas sans rappeler le cri du Christ sur la
croix : Mon dieu, mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné ?
(Eli, Eli Lama Sabacthani ?).
Suivie de l’image de
Bouddha
La seconde
image est celle du Bouddha Sakyamuni, et elle
est suggérée plus tard par l’image de Confucius que
Fei Mu présente assis en position du lotus prêchant
sous un arbre devant l’Autel des abricotiers (le
xingtan
杏坛),
comme le Bouddha sous l’arbre de la Bodhi.
Mais les
tribulations de Confucius suggèrent aussi celles
vécues, à la même époque peu ou prou, par Socrate,
lui aussi acteur politique autant que penseur, et
qui mourra de s’être opposé aux puissants de son
temps.
Répondant au
symbolisme qui structure ainsi la personnalité de Confucius
en la définissant, les images, volontairement dépouillées et
hiératiques, sont composées comme des tableaux où les
personnages ont une place dictée par les éléments
asymétriques du décor. Le travail de composition est
particulièrement sensible dans les scènes d’intérieur, et
tout particulièrement dans celles structurées autour du
personnage de Confucius : il n’est jamais présenté enfermé
dans un lieu clos, mais dans un lieu ouvert sur un espace
indéfini, comme symbolisant l’envol de sa pensée. Il faut
saluer ici le travail du chef opérateur Huang Shaofen
(黄绍芬).
Recherches sur la
musique et choix instrumentaux
La
musique participe de cet aspect de recherche
formelle, elle en est même un aspect important qui
permet d’apprécier la profondeur de la pensée de Fei
Mu lors de la conception de ce film, surtout dans le
contexte de l’époque.
Les films
chinois des années 1930 utilisaient tout simplement
des extraits d’enregistrements de musique
occidentale, avec la seule exception de chansons qui
devenaient en général célèbres et servaient à la
popularité du film. Le premier film chinois
comportant une musique originale est le premier film
de
Yuan Muzhi « Scènes
de la vie urbaine » (《都市风光》),
en 1935. Et le premier à comporter une musique
interprétée sur instruments traditionnels chinois
est le film de Fei Mu datant de la même année, « Piété filiale » ou
« Song
of China » (《天伦》).
C’est dire à quel point il était novateur dans ce
domaine.
Pour
« Confucius », sa pensée s’avère bien plus complexe.
D’abord la musique du film est une composition
originale,
Le livre complet sur
le système des sons
signée du compositeur
Qin Pengzhang (秦鹏章) qui
n’avait encore que 21 ans, et qui, pendant les années de
guerre de 1941 à 1945, avait travaillé avec Fei Mu dans la
troupe d’art dramatique de Shanghai. Après des recherches
sur la musique
Qin Penzhang,
spécialiste du pipa
ancienne
chinoise, il a choisi des chants tirés du « Livre
complet sur le système des tons » (《乐律全书》)
du musicien de l’époque Ming Zhu Zaiyu (朱载堉)
auxquels il a ajouté quelques compositions
personnelles qui sont une recréation de musique
ancienne.
La musique
de « Confucius » est, pour une bonne partie, de la
musique interprétée au qin, instrument
traditionnel du lettré, qui était celui de
Confucius. Il est connu pour en avoir joué dans les
circonstances les plus difficiles, pour calmer les
craintes de ses disciples et leur redonner une
certaine sérénité. Le film le montre ainsi à deux
reprises. Ses chants sont extraits de mélodies
communément regroupées sous le label « mélodies du
xingtan », le xingtan (ou Autel des
abricotiers)dépassant le seul autel de Qufu
pour englober de façon générique tous les tertres
sur lesquels Confucius s’arrêtait pour jouer et
enseigner (6).
L’instrument du
film est un instrument traditionnel à cordes de soie qui
confèrent à la musique une tonalité particulière. Les cordes
de soie ont disparu des instruments traditionnels chinois au
moment de la Révolution culturelle, pour être remplacées par
des cordes de métal qui ont une sonorité totalement
différente. Quant aux mélodies, elles ont pour source les
mélodies pour qin du Livre des Odes, le Shijing
(《诗经》),
mises en musique sous la dynastie des Ming par Zhu Zaiyu.
Le reste est de la
musique originale composée par Qin Pengzhang, mais
interprétée par un orchestre mixte, mêlant
instruments traditionnels chinois et instruments
occidentaux, et ce point mérite un commentaire particulier.
En effet, Fei Mu a éliminé deux des instruments les plus
courants parmi les instruments traditionnels chinois : le
pipa (琵琶),
instrument à cordes pincées proche du luth, et l’erhu (二胡),
sorte de violon à deux cordes, qu’il a pourtant utilisés
tous les deux dans la musique de « Song of China ». Ils sont
remplacés dans « Confucius » par des instruments occidentaux
aux sonorités très voisines.
Ainsi, l’erhu
est parfois remplacé par un ensemble à cordes ; mieux :
dans la scène où Confucius, encerclé dans l’Etat de Chen,
dans une situation critique, prend son qin et se met
à chanter tout en jouant, la mélodie du qin est
accompagnée au violoncelle et non à l’erhu. Ce choix
délibéré a valeur symbolique.
Selon
l’ethnomusicologue Tse Chun-yan (7), c’est parce qu’il
s’agit de deux instruments importés en Chine d’Asie centrale
– le pipa (en forme de poire) sans doute pendant la
dynastie des Jin (晋朝
265-420) et l’erhu
sous les Song. Sous les Tang et les Song, les anciennes
mélodies qui avaient été créées par le légendaire empereur
Fu Xi pour « élever la moralité et cultiver les cœurs »
avaient peu ou prou disparu. C’est pourquoi Fei Mu a rejeté
les deux instruments importés qui représentaient une
déchéance des idéaux inscrits dans la musique ancienne.
Son choix
d’instruments occidentaux pour les remplacer est
donc une volonté délibérée, contrairement aux
apparences, de rester fidèle à l’esprit de Confucius
en reprenant la formule des intellectuels du 4 mai :
utiliser les techniques occidentales au service de
la Chine (洋为中用),
en l’occurrence utiliser les instruments occidentaux
au service de la musique chinoise. C’est pourquoi il
a engagé un second musicien aux côtés deQin
Pengzhang (qui, ironiquement, était un spécialiste
du pipa) : Huang Yijun (黄贻钧),
un musicien et chef d’orchestre né en 1915, formé
aussi bien aux instruments traditionnel
qu’occidentaux, qui, à
Musique enregistrée
par Huang Yijun vers 1935
Shanghai, au
milieu des années 1930, a enregistré de la musique sous le
label Pathé.
Au-delà de ces
caractéristiques esthétiques et stylistiques, le film est
cependant aussi marqué par son époque. Fei Mu voyait
Confucius comme une victime de la politique de son temps,
mais son film a aussi été victime des contingences au moment
de sa réalisation, puis de sa sortie.
Un film marqué
aussi par les contraintes du moment
« Confucius » est
la première production de la Minhua (民华影业),
créée à Shanghai en 1939 par Jin Xinmin (金信民),
un homme d’affaires. C’était l’époque de « l’île orpheline »
(“孤岛”时期),
où la concession internationale offrait encore une zone de
relative liberté hors occupation japonaise.
Le fruit d’une
collaboration étroite avec ses frères
Selon les souvenirs
de la fille du réalisateur, Barbara Fei ou Fei Mingyi (费明仪)
(8), « Confucius » a été soigneusement préparé par Fei Mu
avec ses frères cadets dont il était très proche : Fei Yimin
(费彝民),
Fei Kuizhuang ou Kang, et Fei Xudong ou Luyi (费鲁伊).
Leur père était
mort jeune d’une crise cardiaque ; en tant que frère aîné,
Feu Mu s’occupa des études et du mariage de ses frères à la
place de son père. Les quatre frères étaient donc très unis.
Pendant les
premières années de la guerre sino-japonaise, le cinéma
était florissant à Shanghai, mais la grande majorité des
films produits étaient des films commerciaux populaires. Fei
Mu, son second frère et ses amis décidèrent de prendre une
approche différente. Leur grande chance fut de trouver deux
hommes d’affaires, Jin Xinmin et Tong Zhenmin, prêts à
investir des sommes considérables pour créer une nouvelle
société de production, la Minhua, dont « Confucius » fut le
premier projet. Dans le contexte politique de l’époque, il
fallait du courage pour investir dans un tel projet. Fei Mu
et ses frères étaient guidés par la pensée de Confucius :
« On ne peut pas priver l’homme le plus humble de sa libre
volonté ».
Fei Mu se mit au
travail et les documents s’amoncelèrent sur son bureau ; le
plancher et son lit étaient couverts de notes éparses.
Lorsque son second frère Yimin rentrait de son bureau le
soir, son principal souci était d’aller voir où son frère
aîné en était de son scénario. Quant au troisième frère,
Kuizhuang, il était un excellent architecte. Il se lança
dans des recherches sur l’architecture, les vêtements et les
accessoires reflétant l’époque et dessina lui-même des
esquisses des principales scènes ; le peintre et dessinateur
Dong Tianye (董天野)
réalisa ensuite sur la base de ces esquisses une série de 24
gravures en noir et blanc, qui furent incluses dans la
Brochure spéciale de Confucius éditée lors de la sortie du
film sous le titre « 24 scènes de Confucius ».
C’est le troisième
frère et son épouse Zhang Yuquan qui ont conçu le graphisme
de la couverture, avec la silhouette de Confucius debout sur
le côté droit. Ils ont été félicités pour cette couverture,
qui montre le personnage dans l’attitude de grand éducateur
que Fei Mu voulait souligner, digne, mais accablé par le
poids des soucis que suscitaient en lui le pays et son
peuple.
Un tournage
difficile, et un bref succès sans lendemain
Le
tournage commença en mars 1940, avec un budget
initial de 30 000 dollars-argent, ce qui
représentait déjà une fourchette haute pour un
budget de film à l’époque. En août, Fei Mu en était
déjà à 80 000, et quand il termina, le budget avait
explosé : 160 000 dollars ! Il avait passé toute
l’année en tournage, ce qui était aussi exceptionnel
pour l’époque.
Fei Mu sur le tournage
de Confucius,
avec son chef
opérateur Huang Shaofen
Encore
avait-il été obligé de terminer vite, ce qui peut
expliquer une fin un peu grossière par rapport au
reste du film. Les contraintes budgétaires peuvent
aussi être la raison de décors quelque peu sommaires
dans les dernières scènes.
« Confucius » sortit le
19 décembre 1940 au Grand Théâtre Jincheng (金城大戏院),
et la sortie fut promue par une campagne de presse
dans les principaux journaux de Shanghai. La Minhua
édita même une brochure spéciale pour l’occasion,
avec illustrations et couverture en couleur. Elle
organisa un concours d’essais sur le film, et
proposa des billets à tarif réduit
pour les groupes. Les articles et critiques parus dans la
presse furent ensuite publiés dans un numéro spécial du
journal de la compagnie.
Le film continua
au théâtre Jincheng jusqu’aux fêtes du Nouvel An, puis,
après un hiatus d’une dizaine de jours, fut repris dans un
autre cinéma. Mais, en dépit de l’attention que lui
portèrent les intellectuels, le film n’eut pas un grand
succès et fut retiré au bout d’une semaine. Il n’était tout
simplement pas dans l’air du temps : le film qui venait de
remporter un immense succès, à sa sortie en février 1939,
était « Mulan s’engage dans l’armée »
(《木兰从军》)
de
Bu Wancang (卜万苍).
La mode était au drame en costume.
En 1941, Fei Mu va
passer à un film d’extraits d’opéra, puis un film « en
costume », se passant pendant la révolte des Taiping et
célébrant les valeurs de résistance à l’ennemi, mais il
cessera provisoirement de tourner quand, fin 1941, les
Japonais auront envahi la totalité de la ville et
demanderont aux cinéastes de collaborer avec eux.
Un Confucius en
chair et en os
« Confucius »
était un film sur la recherche de valeurs nationales propres
à redonner force et vitalité à une Chine écrasée par
l’occupation japonaise. Mais il était trop austère pour le
public moyen.
Pourtant, Fei Mu a
justement cherché à donner visage humain au penseur, en en
faisant un homme vaincu par la politique de son temps, mais
à l’esprit indomptable refusant de se plier et céder sur ses
principes. Son Confucius est un homme déçu dans ses
aspirations, meurtri dans sa chair, arrivé au soir de sa vie
après avoir perdu les êtres qui lui étaient le plus cher, et
qui, à l’approche de sa mort, reconnaissant que sa vie avait
été un échec, tente de fixer sur le papier les enseignements
qu’il en a tirés et juge important de transmettre aux
générations futures.
Ce sont ces
générations futures qui allaient pourtant détourner son
message en faisant de lui le saint qu’il n’était pas. Fei
Mu, lui, nous le transmet dans toute sa superbe ambivalence,
sur fond de chaos politique comme celui qui régnait de son
temps.
Visions de
Confucius : de Lu Xun à Fei Mu et aujourd’hui
Au début de
son film, Fei Mu pose Confucius en parallèle avec
les fondateurs de deux traditions de pensée
religieuse qui sont aussi des enseignements moraux :
Jésus et le Buddha Sakyamuni. Le message fondamental
du film tient dans la vision particulière de Fei
Mu : Confucius a échoué en politique, son succès
tient à sa valeur d’éducateur.
Cette
vision était contraire à celle des intellectuels du
4 mai et du mouvement de la Nouvelle Culture qui,
dans les années 1920, s’étaient soulevés contre
Confucius en considérant qu’il était l’un des
éléments de la culture traditionnelle chinoise qui
bloquait toute possibilité de modernisation du pays,
et que sa pensée était incompatible avec la vie
moderne.
C’était en
particulier la position de
Lu Xun (鲁迅),
mais sa vision personnelle, exposée dans son article
« Confucius dans la Chine moderne » (《在现代中国的孔夫子》),
était plus
Les Analectes relues
par Yu Dan
complexe :
s’élevant contre l’image du sage élevé sur un piédestal pour
les besoins du pouvoir, il y voyait une gloire posthume
artificielle. Pour lui, Confucius avait conçu des politiques
et des règles pour gouverner un pays en soumettant le
peuple. C’est cette position qui vaudra à Confucius d’être
condamné par beaucoup, et Mao en particulier.
Yu Dan en conférence :
les Analectes sont une potion salvatrice“救命药”
Dans son
essai « Confucius et son temps » (《孔夫子及其时代》),
Fei Mu affirme au contraire la valeur et la
signification de l’enseignement de Confucius dans
une optique universelle, comme l’enseignement de
Jésus, mais le replace également dans le contexte
chinois en soulignant son importance dans la
consolidation d’une conscience nationale,
particulièrement significative dans les périodes de
crise nationale.
Aujourd’hui, l’enseignement de Confucius a subi un
nouvel avatar, après une série d’ouvrages et de
conférences, en particulier la relecture populaire
des Analectes par Yu Dan (于丹)
fin 2006 (9) et la proposition par Gang Yang (甘阳)
en 2007 d’un « socialisme confucéen » mêlant
l’héritage de Confucius, de Mao et de Deng Xiaoping
(10)… L’enseignement et la pensée de Confucius ont
été érigés en élément fondamental du soft power de
la Chine.
La
redécouverte et la restauration du film de Fei Mu
ont relancé les recherches et débats sur la personne
et l’héritage de Confucius. Lors d’un colloque
organisé par le Hong Kong Film Archive à l’occasion
de la sortie du film restauré, divers chercheurs et
spécialistes étaient invités, dont le professeur Li
Ling (李零)
de l’université de Pékin, auteur, en 2007 également,
d’une autre lecture des Analectes intitulée « Chien
errant » (Sangjia gou《丧家狗》),
ou « chien sans famille, abandonné », expression
utilisée par Confucius lui-même pour se définir :
La lecture des
Analectes
par le professeur Li
Ling
cette relecture
recoupe et actualise la vision de Fei Mu en mettant l’accent
sur l’homme, avec ses mérites, mais aussi ses défauts et ses
échecs, les uns humains, les autres politiques. C’est une
mise en perspective du long processus de politisation,
commencé sous les Han, qui a mené de Confucius au
confucianisme.
Différences entre
le film de Fei Mu et le film de Hu Mei
1. La différence
qui frappe le plus entre les deux films vient des moyens –
financiers et techniques - déployés pour les réaliser :
-
Fei Mu
tournant en période de guerre, avec un budget – bien
qu’environ vingt fois le budget moyen d’un film de l’époque
- ne lui permettant pas de scènes de combats, ou très peu ;
-
Hu Mei,
elle, disposant d’un budget de 150 millions de RMB, et tous
les moyens modernes de numérisation de l’image et d’effets
spéciaux, permettant en particulier la multiplication des
soldats dans les scènes de combat. Du coup, sans même parler
des armures, légèrement déplacées, ces armées de combattants
paraissent étrangement démesurées quand on songe à la
population des Etats en cause : quelque 500 millions
d’habitants tout au plus.
Les armées
paupérisées de Fei Mu semblent bien mieux correspondre à
celles de l’époque de Confucius. Mais le film de Hu Mei
apparaît dès l’abord comme un divertissement tourné vers le
grand public.
2. Les différences
d’approche dans la conception du scénario accentuent ce
caractère. Comme les deux films ont les mêmes sources,
essentiellement les Analectes et les Mémoires historiques,
on retrouve grosso modo les mêmes scènes dans les deux
films. Mais les divergences de perspective sont
fondamentales :
- Pour Fei Mu,
Confucius est avant tout un grand éducateur ; son film
comporte donc un grand nombre de scènes d’enseignement,
dans différents endroits, y compris une scène d’enseignement
des règles du tir à l’arc. Dans toutes ces scènes, Confucius
fait preuve d’une grande patience, et d’une diversité
d’approches dans son rapport à ses disciples, procédant par
questions et réponses comme Socrate.
Mettant au
contraire l’accent sur les aspects politiques de la vie de
Confucius, le film de Hu Mei n’a aucune scène le montrant en
train d’enseigner, et quand il montre des disciples dans la
maison de Confucius, ils sont assis derrière des bureaux,
occupés sagement à lire ou recopier des classiques, comme
des étudiants aujourd’hui dans une salle de bibliothèque
universitaire.
- Les disciples,
dans le film de Fei Mu, sont réduits à quelques-uns, mais
ils sont bien caractérisés, et ils jouent des rôles
importants dans certaines séquences. Leur interaction avec
le maître permet à celui-ci de se défaire parfois de ses
dehors austères, permettant des touches d’humour venant
alléger le sérieux du scénario.
Dans le film de Hu
Mei, ils sont trop nombreux pour être distingués. Hu Mei et
ses scénaristes se permettent même une infidélité à
l’histoire pour dramatiser une séquence : Yan Hui n’est pas
mort noyé en tentant de sauver des rouleaux de bambous ; il
est mort de maladie et de pauvreté.
- Cette
dramatisation se retrouve au niveau du choix des principaux
acteurs, et en particulier celui qui interprète Confucius :
Chow Yun-fat, acteur de Hong Kong qu’on n’aurait guère
imaginé dans le rôle. Il joue certes un personnage paisible
et raffiné, mais son air de douce assurance, un rien
goguenarde par moments, en fait un personnage à la Zhuge
Liang, droit sorti de chez John Woo, bien plutôt que le
penseur des Analectes, rongé par le doute et déçu dans ses
aspirations.
En regard, l’acteur
de Fei Mu, Tang Huaiqiu (唐槐秋),
grand acteur de théâtre, livre une interprétation
intériorisée, toute en retenue.
On pourrait faire
une analyse semblable de la fameuse scène « Confucius
rencontre Nan Zi », traitée de manière bien plus sobre et
factuelle dans le film de Fei Mu (où elle se présente, selon
les rites, derrière un rideau) que dans celui de Hu Mei, où
la scène semble être tirée d’un feuilleton télévisé, avec
Nan Zi faisant assaut de citations face à Confucius.
- Les divergences
concernent aussi le portrait du Confucius politique.
Fei Mu passe très vite sur son temps au service du duc de
Lu ; on le voit juste de dos, approchant le duc qui annonce
sa nomination. Séquence qui se reproduit trois fois, tout
aussi brièvement, pour chacune des promotions de Confucius,
comme une mention symbolique.
Hu Mei, au
contraire, montre Confucius se prosternant longuement à
l’entrée de la résidence, ce qui peut être conforme aux
rites des Zhou, mais dénote surtout une conception
diamétralement opposée du caractère de Confucius.
- Dans le même
ordre d’idée, Fei Mu montre Confucius donnant de lui-même sa
démission quand il se rend compte que ses préceptes ne sont
ni entendus ni suivis, et partant alors pour propager sa
doctrine. Chez Hu Mei, il est contraint à se démettre
de ses fonctions, et exilé par Ji Sun (季孫),
chef du clan au pouvoir ; Confucius quitte alors l’Etat de
Lu, pour n’y revenir que lorsqu’il y est rappelé par Ji Sun.
Chez Fei Mu,
Confucius est en position d’égalité avec les puissants chefs
d’Etat de son temps ; chez Hu Mei, il est en position de
subordination, et en quête de reconnaissance. Qui plus est,
il est farouchement loyal au duc de Lu et à son Etat
d’origine, au point de décliner les offres du duc de Wei. Le
film de Hu Mei en fait ainsi un patriote, attaché à un
concept de « nation » qui n’avait pas cours à l’époque des
Printemps et Automnes. On voit ici apparaître une
interprétation faisant du penseur le digne représentant du
soft power de la Chine actuelle.
Note sur les
principaux acteurs
Confucius
est interprété par Tang Huaiqiu (唐槐秋),
un personnage qui était devenu célèbre dans le
milieu du théâtre, à la tête d’une troupe qu’il
avait créée en 1927 avec le dramaturge Tian Han ; il
y fit jouer sa fille,
Tang Ruoqing (唐若青),
celle-là même qui interprète le rôle de
l’impératrice Cixi dans le film de
Zhu Shilin (朱石麟)
« L’histoire
secrète de la cour des Qing » (《清宫秘史》).
Zhu Shilin et Tang Huaiqiu avaient pour ami commun
le dramaturge et scénariste Ouyang Yuqian (欧阳予倩).
C’est par ailleurs avec le dramaturge Yao Ke (姚克),
dont la pièce « Discorde
à la cour des Qing »
Tang Huaiqiu en
Confucius
(《清宫怨》)
avait inspiré le scénario de Zhu Shilin, que Fei Mu créera
une troupe de théâtre en 1941….
Zhang Yi en Zi Lu
Dans le
rôle de Zi Lu, Zhang Yi (张翼)
était un acteur de cinéma né en 1909 à Shanghai ; il
avait commencé sa carrière d’acteur en 1925, et
était devenu célèbre comme acteur de films de
wuxia à la fin de la décennie, avant d’entrer en
1934 à la Lianhua.
Le rôle de
Nanzi (南子),
le seul rôle féminin à part celui de la fille de
Confucius, est interprété par l’actrice Murong
Wan’er
(慕容婉儿),
née en 1920, qui a joué entre autres aux côtés de
Zhou Xuan (周璇)
dans la
« Romance de la Chambre de l’Ouest » ou Xixiangji
(《西厢记》)
de Zhang
Shichuan (张石川),
en 1940 aussi. Elle a épousé
Shu Shi (舒适)
en 1942, et a ensuite fait du théâtre pendant le
reste de la guerre.
L’actrice Murong
Wan’er en Nanzi
Confucius 《孔夫子》, le
film entier, surtitrage anglais
Notes
(1) Le Hong Kong
Film Archive a édité un DVD en janvier 2012.
(2) La biographie
de Confucius figure au chapitre 47 des Maisons héréditaires
(孔子世家),
en hommage à un personnage qui n’avait pas appartenu à une
de ces maisons et n’avait jamais exercé de fonction
officielle – sauf brièvement à Lu, mais qui, selon Sima Qian, avait régné par la pensée.
(3) Quand Zi Lu se
présenta à Confucius, celui-ci lui demanda ce qu’il aimait
le plus, et Zi Lu répondit : « Ma longue épée ». Après avoir
reçu l’enseignement de Confucius, il devint un remarquable
administrateur, et fut nommé magistrat du district de Pu (蒲县).
Le film souligne son caractère de bravoure impulsive, ne
serait-ce que par le choix de l’acteur.
(4) Les
« traîtres » comme Yang Huo (陽貨/阳货)
et Shao Zhengmao (少正卯)
que Fei Mu montre s’amusant à lancer des flèches sur le
cadavre d’un pendu. Le premier essaiera de le rallier à lui,
mais en vain : Lunyu XVII.1
http://wengu.tartarie.com/wg/wengu.php?l=Lunyu&lang=fr&no=448
Quant au second,
Confucius le fera exécuter quand il sera ministre de la
justice, pour l’exemple. Au bout de trois mois, est-il dit
dans les Analectes, les bouchers avaient cessé d’augmenter
leurs prix, et personne ne songeait plus à empocher ce qui
avait été égaré dans la rue. Fei Mu ne va pas si loin : il
montre juste Zi Lu décochant une flèche d’avertissement sur
leur char.
(5) C’est cet
aspect qui a inspiré à la chercheuse de Hong Kong Wong Ain-ling son
rapprochement souvent cité du film de Fei Mu avec, entre
autres, « Perceval le Gallois » d’Eric Rohmer – voir son
essai sur le film :
(7) Western
Instruments, Chinese Sounds : the Film Music of Confucius,
in :
Fei Mu’s Confucius,
Edited by Wong Ain-ling,Hong Kong Film
Archive, avril 2010; pp 197-193.
(8) Souvenirs
recueillis dans l’ouvrage édité par le Hong Kong Film
Archive pour la sortie du film restauré (voir bibliographie
ci-dessous).
(9) Professeur au
département cinéma et télévision de l’Université normale de
Pékin, Yu Dan a réalisé une série d’émissions sur CCTV fin
2006 ; la publication de leur transcription est devenue un
best-seller : « Les Analectes relus par Yu Dan » (《于丹《论语》心得》).
(10) Proposition
émise dans un article publié dans le magazine Dushu (读书)
en 2007, visant à unifier trois traditions de pensée afin de
créer une force unique légitimant l’action gouvernementale :
« La voie de la Chine : trente ans et soixante ans » (《中国道路:三十年与六十年》)
Bibliographie
- Fei Mu’s
Confucius,
Edited by Wong Ain-ling,Hong Kong Film
Archive, avril 2010, bilingual Chinese/English.