Né en avril 1959, Fruit Chan est un producteur,
scénariste et réalisateur original, connu d’abord
pour un style réaliste reflétant la vie des couches
les plus modestes de la population, avant de
s’orienter vers le film d’horreur. Arrivé
tardivement dans les rangs d’une deuxième vague du
cinéma de Hong Kong née dans la deuxième moitié des
années 1980, c’est
« Made
in Hong Kong » (《香港制造》)
qui l’a rendu célèbre, en 1997 : le film a remporté
treize prix et six nominations.
Un immigrant passionné de cinéma
Fruit Chan est né en Chine continentale, et a
immigré à Hong Kong avec ses parents en 1969, à
l’âge de dix ans. Enfant, un film soviétique
déclenche sa passion pour le cinéma. Alors qu’il est
encore collégien, il décroche un petit boulot à
mi-temps dans un cinéma qui lui permet de travailler
dans la salle
Fruit Chan
de projection. Le premier film auquel il assiste est
un opéra chinois, réalisé par
John Woo (吴宇森)
en 1976 : « Princess Chang Ping » (《帝女花》),
une expérience qui n’aura pas de suite dans la production de
John Woo, mais qui déjà annonçait certains traits de son
cinéma.
Fruit Chan étudie ensuite l’écriture de scénario et
la mise en scène au Hong Kong Film Culture Centre.
Il commence sa carrière en 1986, comme assistant du
réalisateur David Lai Dai-Wai (黎大煒)
sur le tournage du film « Midnight Girls » (《
午夜丽人》).
Puis il est assistant réalisateur de Jackie Chan,
Kirk Wong (王正权),
Ronny Yu (于仁泰),
Shu Kei (舒琪)
et bien d’autres.
Cinéaste de la Rétrocession
En 1991, la chance lui sourit : la production du
film sur lequel il travaillait est arrêtée. Il en
profite pour tourner lui-même son premier film, dans
le même studio : « Finale in Blood » (《大闹广昌隆》),
avec le grand acteur Andy Lau (刘德华) ;
le film n’est sorti que deux ans plus tard, en 1993,
mais il a été très bien reçu par la critique.
Princess Chang Ping
Made in Hong Kong
1. En 1994, Fruit Chan réussit à réunir 500 000 HK$ et
récupère du matériel laissé par d’autres équipes. C’est avec
ces bouts de pellicules inutilisées qu’il tourne
« Made
in Hong Kong » (《香港制造》),
un film étonnant, produit par Andy Lau, avec des acteurs
inconnus, montrant l’envers du côté glamour de Hong Kong et
considéré comme une illustration de l’atmosphère régnant
dans la ville à la veille de la
Rétrocession du territoire à la Chine,
le 1er juillet 1997.
Made in Hong Kong
Fruit Chan a construit son film autour de quatre
jeunes marginaux, dont l’un, au centre de
l’histoire, est un jeune garçon qui a abandonné ses
études pour se mettre au service du chef d’une
triade. Mais on est aux antipodes des films de
triades. L’esprit est bien plus celui de la Nouvelle
Vague française, dans un style empruntant aussi des
fulgurances à Oshima. La violence est là, mais comme
expression du mal de vivre, et de l’impossibilité de
l’exprimer autrement. L’atmosphère sombre n’est pas
seulement celle de la Rétrocession qui a inspiré
tant d’autres films et œuvres littéraires au même
moment, c’est plus largement l’image des bas-fonds
d’une ville attirante mais dangereuse.
En même temps, c’était un pied de nez au système
statufié du cinéma de Hong Kong : la première
tentative de filmer indépendamment, en dehors des
studios, dans un genre réaliste touchant les
problèmes sociaux et politiques
du moment, et qui répond aux premiers balbutiements du
cinéma indépendant en Chine continentale, au même moment.
Made in Hong Kong
Film coup-de-poing, « Made in Hong Kong » avait tout pour
devenir un film culte, et il l’est devenu. Il a lancé la
carrière de Fruit Chan. C’est le premier volet d’une
trilogie baptisée « Trilogie de 97 » (九七三部曲).
La trilogie de 97
Fruit Chan a en effet poursuivi avec deux films dans le même
esprit que « Made in Hong Kong »
et sortis les deux années suivantes : « The Longest Summer »
(《去年煙花特別多》)
en 1998, et « Little Cheung » (《细路祥》)
en 1999.
2. Produit par Andy Lau comme le film précédent, « The
Longest Summer » - dont le titre chinois
signifie « pléthore de feux d’artifice l’an
dernier » - dépeint les difficultés rencontrées par
un groupe de soldats du Hpng Kong Military Corps
alors qu’ils sont démobilisés, le Corps étant
dissous dans la perspective de
la Rétrocession
de Hong Kong à la Chine.
Le personnage principal est un ancien officier de ce
corps d’armée britannique, démobilisé juste avant le
retour de Hong Kong dans le giron chinois. Dans
l’impossibilité de trouver un autre emploi, il
rejoint alors son frère cadet comme chauffeur du
chef d’une triade. Ses compagnons d’armes,
démobilisés comme lui, sont dans le même cas et ont
tous des problèmes financiers. Amer et dépourvu
d’autre solution, il décide d’organiser le braquage
d’une banque avec son frère et quatre de ces anciens
soldats. Mais le jour dit, ils réalisent qu’ils ne
sont pas les seuls à avoir eu cette idée.
The Longest Summer
Fruit Chan renouvelle le miracle de
« Made in Hong Kong » en dressant
un tableau sans concession de la vie des classes les plus
marginales de la société hongkongaise, avec une nouvelle
fois des acteurs amateurs (au sein desquels on reconnaît Sam
Lee, repris du film précédent, comme un lien entre les
deux), et une superbe séquence avec une foule sous une mer
de parapluies qui semble un hommage au
« Sparrow »
(《文雀》)
de
Johnnie To.
The Longest Summer, trailer
3. « Little Cheung » pose un autre problème
social de Hong Kong, avec toujours autant de
sensibilité et de délicatesse : celui des enfants
des quartiers pauvres et en particulier les enfants
d’immigrés chinois clandestins, chacun luttant pour
survivre dans un monde où l’argent est primordial.
Le petit Cheung du titre est un enfant qui partage
son temps entre l’école et le travail de livraison
qu’il fait en dehors des heures de classe pour aider
son père qui tient un restaurant. Il se lie d’amitié
avec une petite fille qui est une immigrée
clandestine et ne peut pas, elle, aller à l’école
car elle doit travailler toute la journée à faire la
vaisselle dans les tripots des quartiers populaires
pour aider sa mère. Les deux enfants se baladent
dans les rues de Hong Kong en cherchant le frère de
Cheung qui a disparu et en rêvant de lendemains
meilleurs.
Little Cheung
En 2000, le jeune acteur qui interprète Little Cheung a été
primé au festival du Golden Horse qui a également primé le
scénario.
Little Cheung, séquence célèbre (Cheung puni par son père,
obligé de rester debout dans la rue, à moitié nu sous la
pluie, se met à chanter d’une voie éraillée…)
Little Cheung
Cinéaste des bas-fonds
A partir du nouveau millénaire, dans un
contexte de crise du cinéma de
Hong Kong, Fruit Chan poursuit son parcours solitaire
en réalisant une autre trilogie, tournée vers un segment
marginal de la société hongkongaise : la « trilogie des
prostituées » (妓女三部曲)
dont les trois volets sortent à nouveau à une année de
distance : « Durian Durian » (《榴梿飘飘》)
en 2000, « Hollywood Hong Kong » (《香港有个荷里活》)
en 2001 et « Public Toilet » (《人民公厕》)
en 2002.
1. « Durian Durian » se passe dans le
quartier chaud de Mong Kok et dresse le portrait
d’une jeune fille, A Fen (阿芬),
dont la famille est illégale à Hong Kong et dont la
voisine, A Yan (阿燕),
est une prostituée venue du Continent avec un visa
de tourisme de trois mois. Yan reçoit des dizaines
de clients par jour et finalement, au bout des trois
mois, rentre dans sa famille, dans le nord-est de la
Chine, pour investir l’argent qu’elle a économisé.
La jeune Hongkongaise lui envoie un jour un durian
par la poste ; l’odeur très forte du fruit réveille
soudain une foule de souvenirs …
Fen était aussi la petite amie clandestine de Cheung
dans « Little Cheung ». Elle crée donc un lien entre
la trilogie précédente et la nouvelle. « Durian
Durian » a été couronné de nombreux prix, dont les
prix du meilleur film et de la meilleure nouvelle
actrice à Qin Hailu (秦海璐)
aux Hong Kong Film Awards en 2001 ainsi qu’au
festival du Golden Horse.
Durian Durian
Durian Durian, trailer
2. « Hollywood Hong Kong » poursuit la trilogie « des
prostituées » avec cette fois un ton qui tourne à l’humour
noir et une star dans le rôle principal :
Zhou
Xun (周迅).
L’ancienne entrée de
Tai Horn Village en 2008,
avec le Plaza
Hollywood Shopping Centre en arrière-plan
L’histoire se passe dans ce qui était encore au
début des années 2000 une sorte de petit bidonville
à Kowloon, Tai Hom Village (大磡村),
enclavé au milieu de grands immeubles, avec juste
derrière un grand centre commercial nommé Hollywood
Hollywood Hong Kong
Plaza, d’où le
titre du film ; le bidonville a depuis lors été détruit tout
en préservant le site
[1].
Un habitant du quartier qui écume les sites porno
sur internet tombe sur une prostituée venue du
Continent, Dong Dong (东东),
avec laquelle il passe une nuit torride dans les
buissons derrière le Hollywood Plaza. Dong Dong est
ainsi introduite dans la vie d’une famille, un
boucher et ses deux fils qu’elle fait ensuite
chanter en tentant de leur extorquer de l’argent en
prétextant un viol. Le film devient alors un jeu de
dupes où Dong Dong seule arrive à tirer son épingle
du jeu.
3. Sorti en 2002, « Public Toilet » est le
premier film numérique de Fruit Chan, mais ne fait
pas formellement partie de la trilogie, le dernier
volet de celle-ci étant sorti en 2018. L’histoire
est quelque peu différente : c’est celle d’un jeune
Pékinois du nom de Dong Dong (冬冬)
qui est né et a grandi dans des toilettes publiques
et qui, pour tenter de retrouver ses origines, fait
le tour des toilettes publiques du monde entier.
Public Toilet
Public Toilet, trailer
Dumplings
Segment d’un triptyque
En 2004, Fruit Chan participe à un film d’horreur asiatique
– « Three… Extrêmes » (《三更2》)
[2]
- qui confronte trois segments réalisés par trois
réalisateurs d’origines géographiques différentes : Japon,
Corée et Hong Kong.
Dumplings
Le segment de Fruit Chan s’intitule « Dumplings »
(《饺子》).
Le film met en scène une actrice vieillissante,
madame Li (李太),
qui tente de se rajeunir pour ne pas perdre son mari
qui a pris une maîtresse. Elle achète des raviolis (饺子)
à une femme mystérieuse, tante Mei (媚姨),
qui prétend être bien plus âgée qu’elle ne paraît,
grâce à ses raviolis. Or il s’avère que leur farce
est faite avec des fœtus avortés récupérés dans une
clinique proche où la tante Mei elle-même pratique
des avortements clandestins.
Madame Li continue cependant à consommer ces
raviolis, et une poignée de ceux-ci – faits avec un
fœtus avorté de cinq mois – semblent avoir effet
positif sur sa libido, mais en même temps sa peau se
met à dégager une odeur de poisson. Finalement, la
tante Mei doit fuir pour éviter d’être arrêtée.
Madame Li se retrouve enceinte, se fait avorter, et
l’on se demande ce qu’elle va faire du fœtus…
Long métrage
Le scénario de « Dumplings »
est aussitôt élargi pour en faire un long métrage
sélectionné à la Berlinale en février 2005. C’est l’un des
grands films de Catégorie 3 sortis à Hong Kong après
l’instauration de l’Ordonnance de 1988 instaurant un système
de classification des films – les films de catégorie 3 étant
interdits aux moins de 18 ans. Il est produit par
Peter Chanet Eric Tsang
[3] et
le scénario est signé Lillian Lee (李碧华)
[4].
Le long métrage reprend les mêmes personnages que le court
métrage, mais en approfondissant les caractères et en
dramatisant l’intrigue. La tante Mei se procure ses fœtus
dans une clinique de Shenzhen où elle a travaillé dans le
passé, et sa livraison miracle qui provoque une nouvelle
jeunesse chez madame Li est faite avec le fœtus d’une jeune
fille enceinte de cinq mois qui avait été violée par son
père et que Mei a aidée à avorter. Un flashback montre les
conséquences dramatiques de cet avortement de fortune : la
jeune fille meurt d’une hémorragie…. Flashback où l’on
retrouve le Fruit Chan peintre des bas-fonds des trilogies
précédentes, et qui a un rôle important dans le déroulement
de l’intrigue car il amène ensuite le dénouement du film, à
la différence du court métrage.
Le reste du film est une course hallucinante aux fœtus, et
la séquence finale garde une ambiguïté qui fait frémir.
C’est une formidable réussite de Fruit Chan, qui joue des
ingrédients du film d’horreur en livrant un film d’une grand
qualité esthétique, tant du point de vue de l’image que de
l’interprétation, par trois excellents acteurs : Miriam
Yeung dans le rôle de madame Li, Tony Leung Ka-fai dans
celui de son mari, et, dans le rôle de Mei, l’actrice Bai
Ling (白灵),
qui venait de rentrer en Chine après quelques années aux
Etats-Unis et a été primée aux 24èmes Hong Kong Film Awards
en mars 2005.
Chengdu, I Love You…
et après…
« Dumplings » apparaît comme un tournant dans l’œuvre de
Fruit Chan
1. Il lui a fallu cinq ans pour achever son film
suivant, « Chengdu, I Love You » (《成都,我爱你》).
Il s’agit d’un film en deux parties, coréalisé avec
le musicien de rock Cui Jian (崔健)
et sorti à la 66ème Biennale de Venise,
en septembre 2009 : Il a été achevé après le
terrible tremblement de terre du Sichuan, en mai
2008, dont il porte les séquelles, en y mêlant le
souvenir de celui de Tangshan
[5].
Le film raconte deux romances à Chengdu, l’une en
1976, l’autre en 2029. La première partie dépeint
l’histoire d’amour entre un maître de thé et une
serveuse au moment du tremblement de terre
dévastateur de Tangshan ; elle est réalisée par
Fruit Chan. La seconde partie est réalisée par Cui
Jian comme un film de science-fiction empruntant au
film d’arts martiaux ; elle dresse un portrait de
jeunes musiciens de rock qui se rencontrent dans un
bar à Chengdu où une
Chengdu, I Love You
danseuse de samba tente de réaliser deux souhaits :
retrouver l’homme qui l’a sauvée quand elle était enfant,
alors qu’elle était ensevelie dans les ruines d’un
tremblement de terre qui pourrait aussi bien être celui de
Tangshan que celui de Wenchuan, et d’autre part retrouver un
homme pour venger son cousin, le film retrouvant là un thème
des films de wuxia.
« Chengdu, I Love You » apparaît un peu décousu, le lien
entre les deux parties, totalement différentes, n’étant
dévoilé qu’à la toute fin. Il semble avoir été monté dans
l’urgence. En fait, il devait à l’origine être un triptyque,
comme les deux « Three » (《三更》).
Le troisième réalisateur prévu était le Coréen Hur Jin-ho,
avec un épisode se situant dans le présent, c’est-à-dire en
2008. Finalement, cette partie est devenue un film à part
entière, un film coréen sorti sous le titre « A Season of
Good Rain », avec l’actrice chinoise Gao Yuanyuan (高圆圆)
dans le rôle principal.
Chengdu, I Love You, trailer
2. Également sorti en 2009, coproduit avec l’Afrique du sud
et les Etats-Unis, « Don’t Look Up » est un remake d’un film
d’horreur japonais éponyme de Hideo Nakata sorti en 1996,
qui a été réalisé en fait pour tenter de financer le
documentaire sur Joseph Losey que voulait tourner le
réalisateur. Il n’a eu aucun succès au Japon, et on se
demande pourquoi Fruit Chan a voulu en faire un remake. Il
semble s’orienter dès lors vers
le film d’horreur.
3. En 2013, avec l’acteur Simon Yam (任达华)
dont c’était la première réalisation, il participe à
un nouveau triptyque, le premier volet de la série
« Tales from the Dark » (《李碧华鬼魅系列.迷离夜》),
histoires de fantômes adaptées de nouvelles de
Lillian Lee. C’est la dernière partie, « Jing Zhe »
(《惊蛰》),
qui est réalisée par Fruit Chan, avec un titre qui
désigne le « réveil des insectes en hibernation » au
début du printemps, 3ème des 24 périodes
solaires du calendrier chinois. La série apparaît
comme un regard nostalgique sur les grands films
hongkongais dits d’horreur réalisés dans les années
1980 et au début des années 1990, ancrés dans des
archétypes locaux, mêlant croyances traditionnelles
et géographie urbaine. Le segment de Fruit Chan
n’est pas le meilleur, malgré une optique
quasi-documentaire qui rappelle ses premiers films.
Tales from the Dark 1
4. L’année suivante, Fruit Chan renouvelle le genre en
adoptant le ton de la comédie satirique. « The MidnightAfter », sorti avec un titre chinois à rallonge qui
est un résumé de l’histoire :
《那夜凌晨,我坐上了旺角开往大埔的红VAN》c’est-à-dire
« Cette nuit-là, aux premières lueurs de l’aube, j’ai pris
un minibus rouge à Mong Kok en direction de Tai Po ».
Le scénario est adapté d’un roman initialement publié sur
internet, sous forme de feuilleton, entre février et juillet
2012 par un jeune écrivain hongkongais qui avait alors 25
ans et écrivait sous le pseudonyme ‘Mr Pizza’. Le roman a
finalement été publié en version papier en juillet 2012, et
le film est sorti en février 2014 à la 64ème
Berlinale.
Il y a 17 personnes à bord de ce minibus, mais,
après être passé dans un tunnel, il semble circuler
dans un monde étrange d’où toute circulation a
disparu. Les passagers commencent à tomber malades…
le film a été salué par les uns comme un retour de
Fruit Chan au style incisif de ses débuts, par
d’autres comme une persistance dans ses errances
sans unité stylistique.
5. « The Midnight After »
a été suivi en 2016 de « Kill Time » (《谋杀似水年华》),
un mélange de romance et de film noir à suspense. Il
s’agit d’une coproduction sino-hongkongaise avec des
acteurs chinois et hongkongais, sortie en février
2016 en Chine continentale.
Dans un contexte de crise du cinéma hongkongais,
Fruit Chan s’est vu obligé de sacrifier aux sirènes
du marché chinois comme ses confrères, mais il est
revenu vers ses débuts avec son film suivant.
Kill Time
6. Sorti en octobre 2018 au 31ème
Festival international du cinéma de Tokyo, « Three
Husbands » (《三夫》)
était en effet annoncé comme un ultime volet de la
« trilogie des prostituées » du début des années
2000, faisant suite à « Durian Durian » et
« Hollywood Hong Kong », en passant sous silence
« Public Toilet ».
Le personnage central du film est une femme qui vit
sur un bateau dans les docks de Hong Kong comme les
prostituées d’antan dans la région de Suzhou, en
mettant tout son cœur dans son métier, ou du moins
tout son corps, dans une frénésie apparemment
insatiable qui frise l’instabilité mentale.
Répondant aux deux premiers volets de la trilogie au
début du millénaire, Fruit Chan prend ce même thème
comme symbole satirique de la société hongkongaise
près
Three Husbands
de vingt ans après la Rétrocession : la société apparaît au
bord de la folie, voire de l’autisme, entre humour absurde
et joyeuse vulgarité. Le rôle principal est interprété par
l’actrice chinoise Zeng Meihuizi (曾美慧孜)
qui a commencé dans « Summer Palace » (《颐和园》)
de Lou Ye
(娄烨)
en 2006 et que l’on a retrouvée dans « Le Lac des oies
sauvages » (《南方车站的聚会》)
de
Diao Yinan (刁亦男)
en sélection officielle au 72ème
festival de Cannesen mai 2019.
Three Husbands, trailer
Fruit Chan semble tourner en rond, mais peut-être est-ce à
cause de son sujet même. On préfère cependant en revenir à
ses débuts, dans un élan nostalgique vers le passé.
Débuts de scénariste
Avant de se lancer dans son premier film, en 1997, Fruit
Chan a de nombreuses années été assistant réalisateur, mais
aussi scénariste. Il a été, en particulier, le scénariste du
superbe film de Yonfan
(杨凡)
sorti en 1995 : « Buggis Street » (《妖街皇后》),
dont l’une des forces tient justement à la qualité du
scénario et des dialogues.
C’est aussi la force des films de ses deux trilogies, dont
il a également écrit les scénarios, ainsi que des films
adaptés des nouvelles de Lillian Lee, sur des scénarios
écrits en collaboration avec elle.
[2]Il
s’agit de la séquelle d’un premier film conçu selon
la même idée
et sorti
en 2002,
avec le troisième segment réalisé par
Peter Chan :
« Going Home » (回家).
[3]
Acteur, réalisateur, producteur de
cinéma et de télévision et animateur d’émissions de
variétés.