« Une pluie
sans fin », de Dong Yue : un exercice réussi dans le genre
du film noir chinois
par Brigitte Duzan, 4 juillet 2018
Premier film de
Dong
Yue (董越),
« Une pluie sans fin »
[1] (Bàoxuě
jiāngzhì《暴雪将至》)
a été remarqué en octobre 2017 quand le film est
sorti en première mondiale au festival de Tokyo où
il a obtenu le prix de la meilleure contribution
artistique. Sorti le mois suivant sur les écrans
chinois, il apparaît comme un film particulièrement
réussi qui s’inscrit dans le développement, ces
dernières années, d’un genre nouveau en Chine : le
film noir.
Film noir par son intrigue et son atmosphère, « Une
pluie sans fin » est brillamment construit et
interprété, sur la base d’un fait divers qui s’est
passé dans le Gansu. Le film dépasse cependant le
genre, en offrant une image sombre de la Chine de
1997, sur fond de crise industrielle et des
bouleversements sociaux qu’elle a entraînés. Le film
tire sa profondeur et une grande partie de son
intérêt de tout un réseau de codes et de symboles
liés à cette année dont on peut dire qu’elle
représente un tournant dans l’histoire du pays.
Une pluie sans fin
(affiche chinoise)
Une pluie sans fin
(affiche française)
Dong Yue se place en héritier d’une tradition,
mais en la moulant dans une autre tradition, bien chinoise,
qui est celle de la satire socio-politique subtilement
déguisée.
Un film noir
ü
Un film noir inspiré d’un fait réel
Du film noir,
« Une pluie sans fin » a les ingrédients essentiels. Le terme lui-même
de film noir est né en 1946, sous la plume d'un
critique cinématographique français, par référence à la
Série noire fondée en 1945 par Gallimard, une collection
de romans policiers fondée sur une intrigue dont l’élément
essentiel est un détective privé
[2] ;
mais c’est en général un détective privé cynique et blasé,
embauché pour une enquête dont il peine à comprendre et
dénouer les fils. Cela donnera des interprétations mythiques
dont celle de Humphrey Bogart dans « le Faucon maltais » est
certainement l’une des plus mémorables, et non sans écho
dans le personnage principal du film de Dong Yue.
Dong Yue (à g.)
présentant son film lors
de la première à Pékin
en novembre 2017
avec l’acteur Duan Yihong (au centre)
et l’actrice Jiang
Yiyan (photo china daily)
« Une pluie sans fin »
se rattache par ailleurs à un sous-genre, celui des
cas de tueurs en série, auquel se rattachent un
certain nombre de films noirs récents, comme « Memories
of Murder », le film coréen de
Bong Joon-ho sorti en 2003 auquel est souvent
comparé « Une
pluie sans fin »
[3].
Dong Yue, pour sa part, a expliqué avoir trouvé son
inspiration dans un fait divers qui s’est passé à
Baiyin, dans le Gansu, et que l’on a appelé
« L’affaire de Baiyin » (“白银案”) :
le célèbre cas du tueur en série Gao Chengyong (高承勇).
Arrêté en 2016, il a avoué avoir, entre 1988 et
2002, violé et tué onze femmes dont
les corps ont été retrouvés mutilés, ce qui lui a valu le
surnom de « Jack l’Eventreur chinois »
[4].
L’intrigue d’« Une pluie sans fin » est donc plus ou moins
calquée sur cette histoire.
ü
Une histoire de tueur en série
Le film commence en 2008, lorsqu’un dénommé Yu Guowei (余国伟)
sort de prison, après être resté près de dix ans derrière
les barreaux. Quand on lui demande d’épeler son nom, il
explique : yu
余
comme surnuméraire, guo
国
comme pays, et wei
伟
comme glorieux – voilà donc ce qu’il est : un reste inutile
et sans valeur des gloires passées du pays. Et en effet, il
sort dans un paysage sombre d’usines abandonnées et
dilapidées, dont les vestiges se dressent au milieu de
terrains vagues boueux, envahis par des herbes folles. Un
chômeur parmi des milliers d’autres.
Flash-back sur ce qui l’a amené à passer dix ans en
prison. Nous sommes en 1997, Yu Guowei arrive sur le
lieu d’un meurtre, une friche au bord d’une usine
qui semble à moitié abandonnée. C’est le quatrième
meurtre d’une femme tuée dans les mêmes conditions
dans ce même endroit, en bordure d’une usine d’un
autre âge, la Fonderie n’°4 où Yu Guowei est le chef
de la sécurité. Son excellent travail lui vaut
d’être nommé « travailleur modèle », récompense
qu’il salue par un discours enflammé et plein
d’optimisme.
Meurtre dans un
terrain vague
Mais c’est un optimisme de façade (et peut-être totalement
imaginaire). Les meurtres lui donnent en fait l’occasion de
sortir de sa routine et peut-être d’être engagé dans la
police. Alors il entreprend une enquête en règle, mais sans
trouver autre chose qu’un suspect possible, un personnage
qu’il prend en chasse mais en vain. Il rencontre en cours de
route une prostituée, Yanzi (燕子),
avec laquelle il sympathise et à laquelle il permet
d’ouvrir un salon de coiffure, le « Petit Hong Kong » (小香港),
ville où elle rêve d’aller vivre, avec lui. Elle lui sert en
fait d’appât pour attirer le meurtrier potentiel.
Sortie de l’usine
Tous les ingrédients du film noir sont réunis. Mais,
à partir de là, la machine dérape, le film
questionne la réalité, on ne sait plus trop où est
le vrai et où est le faux. Un soudain retournement
amène une conclusion peut-être un peu hâtive. Mais
les dernières séquences sont amèrement ironiques. On
reste à se demander si Guowei était vraiment un
travailleur modèle de la sécurité, et ce qui est
réellement arrivé, tout comme le chef des affaires
criminelles qui traitait l’affaire des
meurtres, le vieux Zhang (老张),
qui se retrouve amnésique dans une maison de retraite.
Le genre lui-même du film noir est donc subtilement traité,
en en renversant les codes et les clés. Mais le plus subtil
est dans l’atmosphère sombre créée de bout en bout, qui rend
l’atmosphère d’une époque en jouant sur les symboles
spécifiques liés aux dates choisies : 2008 d’une part, mais
surtout 1997.
La Chine de 1997 et de 2008
L’atmosphère est d’abord celle de la fin des années 1990,
une atmosphère de crise se reflétant dans les esprits.
1997 : crise économique, crise sociale
L’année 1997 est hautement symbolique à plusieurs
égards : c’est l’année de la rétrocession de Hong
Kong à la Chine effectuée le 1er juillet,
mettant fin au bail de 99 ans établi entre l’empire
chinois et l’empire britannique ; c’est l’année de
la mort de Deng Xiaoping, le 19 février ; et c’est
en outre l’année du renforcement des reconversions
industrielles, avec la fermeture des vieilles usines
les plus obsolètes – le tout sur fond de crise
financière asiatique, entraînée par la décision, le
2 juillet, des autorités thaïlandaises de laisser
flotter leur monnaie.
ü
Mort de Deng Xiaoping et reconversion industrielle
Bien qu’ayant officiellement quitté ses fonctions en 1989,
pour les laisser à son protégé Jiang
Zemin,
Deng Xiaoping ne reste pas inactif pour autant. Alors que
l’aile conservatrice du Parti veut revenir à un plus grand
contrôle de l’État sur l’économie, Deng impose la poursuite
de la libéralisation économique.
Mais, si la croissance se poursuit, elle est entravée par
l’incertitude politique et l’isolement international qui a
suivi les événements de Tian’anmen. Surtout, la transition
économique a atteint un stade critique. C’est alors que, au
printemps 1992, à l’âge de 88 ans, Deng Xiaoping entreprend
le fameux « voyage dans le sud » (Nan xun
南巡),
qui l’amène à Canton, Shenzhen et Zhuhai ; à Shanghai il
annonce l’approfondissement des réformes avec le lancement
d’une « économie socialiste de marché ».
Son action entraîne une accélération sans précédent de la
croissance pendant les années 1990, en particulier grâce aux
zones économiques spéciales qui attirent l’investissement.
En même temps, cette croissance est accompagnée d’inflation,
jugulée par des mesures financières, dont la hausse des taux
d’intérêt. Le taux d’inflation baisse de 17 % en 1995 à 8%
au début de 1996.
La mort de Deng
Xiaoping le 19 février 1997 est célébrée comme celle du
grand architecte de l’ouverture, les drapeaux restent en
berne pendant plus d’une semaine, le monde entier lui rend
hommage. Mais, à sa mort, la réforme du secteur industriel
d’Etat et la modernisation du système bancaire restent à
faire ; ce sont des obstacles majeurs à la croissance. Plus
de la moitié des entreprises d’Etat sont obsolètes et font
des pertes
[5].
La poursuite de la croissance oblige le gouvernement à
envisager des réformes de fond, passant par celle des
entreprises d’Etat.
C’est alors, en septembre 1997, que se réunit le 15e
Congrès du Parti communiste. Le secrétaire général et
président Jiang Zemin annonce des plans pour vendre,
fusionner ou carrément fermer la grande majorité des
entreprises d’Etat, dans le but d’accroître « la propriété
non publique » (feigongyou
非公有).
Préparé dès 1996, un plan sur trois ans est adopté au 9ème
Congrès des représentants du peuple, en mars 1998. Le succès
est proclamé en 2000, mais au prix de licenciements sans
précédents. Or les chômeurs n’ont pas de couverture
sociale : c’est un bouleversement social qui a un coût
énorme, en fragilisant les couches les plus démunies de la
population.
C’est cette atmosphère de désastre imminent que rend le
film, et dont Dong Yue fait le cadre de son histoire. C’est
une atmosphère sombre de fin d’un monde qui s’éteint
doucement, liée à une angoisse face à l’avenir accrue encore
par les incertitudes autour de la rétrocession de Hong Kong,
le 1er juillet
ü
Rétrocession de Hong Kong
La rétrocession de
Hong Kong est très mal vécue dans la colonie britannique
elle-même, comme le reflètent les œuvres littéraires aussi
bien que les films de la période, ceux de
Wong Kar-waien particulier. Hong Kong est
la « ville du déjà disparu », selon l’expression d’Ackbar
Abbas
[6].
Nombre de Hong-Kongais émigrent, la plupart voient l’avenir
avec pessimisme.
Mais c’est le cas aussi dans les territoires chinois
limitrophes. Hong Kong représentait pour beaucoup de Chinois
un espace de liberté, un espace sublimé comme c’est le cas
dans le film pour Yanzi qui rêve d’aller y installer un
salon de coiffure.
L’année 1997 est ainsi une année charnière : par la suite, à
partir surtout de 2000, les grandes entreprises d'État
auront été réformées, les usines les moins productives
fermées, de nombreux ouvriers qui pensaient que leur outil
de travail leur appartenait auront dû quitter ces usines où
ils avaient travaillé toute leur vie. 1997 annonce
l’avènement d’une période d’incertitude et d’insécurité.
Ce que Dong Yue a voulu faire, c'est évoquer l'atmosphère de
cette période de transition, juste avant la « tempête
sociale » qui va bouleverser le pays.
2008 : tempêtes de neige
Une neige
hallucinatoire
Cette « tempête sociale » est évoquée en termes
symboliques : par les tempêtes de l’hiver 2008. Cet
hiver 2008 est considéré comme le pire vécu en Chine
en cinquante ans. Mais les fortes tempêtes de neige
ont affecté surtout le sud et le centre de la Chine.
Le Hunan était au centre de la zone la plus
affectée, du 25 janvier au 6 février, et c’est au
Hunan qu’a été tourné le film.
C’est le sens du titre chinois, qui signifie
« tempête de neige imminente ». Ces tempêtes sont
annoncées à la radio au
début du film. Elles sont préfigurées dans une scène
surréaliste quand, lors de la remise du prix de travailleurs
modèle à Yu Guowei, une machine se dérègle et déverse une
sorte de neige artificielle sur la scène où il débite son
discours triomphaliste.
C’est donc la neige qui est le symbole de
catastrophe annoncée, au début du film. Mais
ensuite, c’est la pluie qui prend le relais,
et non plus tellement de façon symbolique, mais
réellement : il pleut pendant une bonne partie du
film. Et cette pluie qui n’en finit pas (d’où le
titre français), sape le moral, dilue les énergies.
Sur la longue durée, c’est bien pire qu’une tempête
de neige ; cela vient s’ajouter à l’ambiance de
morosité généralisée qui est celle du film.
Dialogue
Réalisation
Point de départ ; un reportage
L’idée de départ de l’intrigue est venue à Dong Yue d’un
fait divers arrivé dans le Gansu. L’idée de départ du
contexte donnant corps à son récit lui a été inspirée par un
reportage qu’il a vu sur internet en 2013 : un reportage,
illustré de photos, sur une petite ville abandonnée du
nord-ouest de la Chine : ses ressources énergétiques étant
épuisées, ses usines avaient été fermées et la plupart des
habitants étaient partis. C’est ce qu’il explique dans
l’interview, jointe au dossier de presse, réalisée pour la
sortie du film en France :
« J'ai été frappé par la tristesse qui se dégageait de ces
images où l’on ne voyait plus que des personnes âgées et des
chiens traînant dans les rues désertes, au milieu de
bâtiments menaçant de s'écrouler. On avait l'impression que
cette région en pleine déliquescence était totalement
oubliée et mise à l'écart »
Le salon de coiffure,
Fenêtre sur cour
On pense bien sûr au documentaire de
Wang Bing (王兵)
« A
l’ouest des rails » (《铁西区》),
sur l’agonie d’un vieux complexe industriel de
Shenyang, au nord-est de la Chine, filmé également à
la fin des années 1990.
Cependant, si le reportage avait été réalisé dans le
nord-ouest de la Chine, et le documentaire de Wang
Bing dans le nord-est,
Dong Yue a tourné le sien dans le sud du Hunan, dans
la ville de Hengyang(衡阳市),
deuxième ville de la province après la capitale.
Pluie, photo et musique
L’atmosphère sombre, d’un monde en déshérence qui
s’attend au pire, est renforcée par la pluie qui
tombe sans arrêt. Elle transforme les terrains
vagues en bourbiers et l’usine en monstre blessé qui
attend sa fin sous un déluge qui n’est même pas
biblique, juste triste et sale. Elle force les
hommes à sortir encapuchonnés, ils en perdent
presque forme humaine. Ce sont des hordes de zombies
que l’on voit sortir de l’usine, dans une sorte de
ballet post-moderne dont a l’impression qu’il est
pris au ralenti.
Un film en bleu et
gris, cerné de noir
Sparrow, scène des
parapluies
Il y a quelque chose de
Johnnie To
là-dedans, celui de « Mad Detective » (《神探》)
avec sa série de meurtres et son flic à la retraite
qui a des hallucinations ; mais aussi, et peut-être
encore mieux, celui du film suivant,
« Sparrow »
(《文雀》),
avec sa fameuse scène des parapluies dans un Hong
Kong nocturne fantomatique, qui rappelle celle de
« Pluie sans fin ».
« Sparrow »
date d’ailleurs de 2008, comme si les intempéries étaient
bien générales en Chine cette année-là.
La photo
est bien sûr primordiale pour créer l’atmosphère.
Elle est signée Cai Tao(蔡涛)
qui en est encore à ses débuts. Il était en 2015 le
chef opérateur du documentaire « 22 » (《二十二》)
sorti en août 2017 en Chine, sur les dernières
survivantes des « femmes de confort » chinoises
forcées à se prostituer pour l’armée japonaise. Puis
il a travaillé sur deux séries télévisées avant
d’être choisi pour être le directeur de la photo de
« Pluie sans fin ».
Parapluies aussi dans
Pluie sans fin
Il a fait ici un superbe travail en jouant sur les teintes
froides, du bleu au gris en passant par des beiges éteints
virant au marron et au noir, avec des ciels où le soleil,
quand il semble sur le point d’apparaître, semble filtré par
une poussière ambiante, comme celle qui enveloppe les objets
vétustes abandonnés dans un grenier. Même les couleurs de
l’hôtel de passe où travaille Yanzi sont teintées de roses
pâles, comme délavés eux aussi. Ce monde post-industriel est
presque monochrome, mais c’est dans le presque que réside
toute la subtilité.
Destruction de
l’usine, fin de partie
A la fin, on assiste à la destruction programmée de
l’usine : l’ensemble des anciens ouvriers est là,
pour assister à ce dernier spectacle comme on
assiste à des funérailles. Ils sont filmés comme un
chœur dans une tragédie grecque, mais un chœur
mutique et figé comme des figurines moulées dans la
glaise. Fin de partie, comme dit Beckett.
Comme
l’a dit le critique de Variety : le film
« sends a strong visual message that the dreams and
self-perceptions
of many
inhabitants of this old gray town are being washed away by
the tide of change. [7]»
La musique
apporte à tout cela une note glacée, et hallucinée,
supplémentaire, entre solos de violoncelle grinçants
et bruits sourds de machines résonnant dans un vide
comme interstellaire. Elle est de Dingke (丁可),
auteur-compositeur né en 1986 en Chine et maintenant
vivant en France, spécialiste de musique de film,
mais aussi de compositions pour le théâtre et la
danse contemporaine.
Les acteurs ne
sont pas des stars adulées, mais ils sont bien dans la peau
de leur personnage
[7].
Le vieux policier Lao Zhang a les traits fatigués du vétéran
Du Yuan (杜源).
Né en 1957, c’est un ancien élève de l’Institut d’art
dramatique de Pékin (promotion 1982) qui a surtout tourné
pour la télévision, mais c’est un superbe acteur. Très
hiératique, il semble ici devoir faire un effort particulier
pour articuler une phrase entière, attendant surtout,
dit-il, sa retraite pour aller cultiver son jardin. On pense
à Candide.
Jiang Yiyan dans le
rôle de Yanzi
L’actrice (et chanteuse) Jiang Yiyan (江一燕),
née en 1983, a commencé par des études de danse
avant d’apprendre le métier d’acteur à l’Institut du
cinéma de Pékin. Elle a commencé à jouer alors
qu’elle était encore lycéenne, mais son premier
grand rôle a été celui de Jiang Xiangjun (江香君)
dans le film de
Lu Chuan (陆川)
« The
City of Life and Death » (《南京! 南京!》),
sorti en 2009.
Quant à
Duan Yihong (段奕宏),
né en 1973, il est lui aussi sorti de l’Institut
central d’art dramatique. Il a débuté au théâtre en
1998, puis au cinéma en 2006 dans le film de
Lou Ye (娄烨)
« Une jeunesse chinoise » (ou « Summer Palace »
《颐和园》).
En 2014, il a obtenu le prix du meilleur acteur au
festival de cinéma international de Shanghai pour
son rôle dans « The
Dead End » (《烈日灼心》)
de
Cao Baoping (曹保平),
réalisateur qui se trouve être producteur exécutif
d’« Une pluie sans fin ».
Duan Yihong dans le
rôle de Yu Guowei
Ce n’est pas la seule référence cinématographique à laquelle
on pense après avoir vu le film.
Références cinématographiques
Dong Yue lui-même a dit avoir été influencé par les grands
classiques du film noir comme « Conversation secrète » de
Francis Ford Coppola (The Conversation, 1974), ou
« Sueurs froides » (Vertigo, 1958) de Hitchcock, pour
leur réflexion sur l’homme, et l’importance des facteurs
psychologiques. Une autre référence souvent citée est
« Fargo » des frères Coen (1996), dont le monde a, dans
l’ensemble, beaucoup en commun avec celui de Dong Yue.
Côté chinois, le film noir est encore dans les limbes, mais
« Une pluie fine » a des prédécesseurs qui sont autant de
précurseurs dans le genre en Chine. Outre le film de Cao
Baoping déjà cité, voire le « Hide and Seek » (《捉迷藏》)
de Liu
Jie (刘杰),
sorti en 2016 mais passé un peu inaperçu, les deux plus
importants qui passeront à la postérité sont : « The Coffin
in the Mountain » (Binguan
《殯棺》)
de Xin
Yukun (忻钰坤)
sorti en 2014 et
« Black
Coal, Thin Ice » (《白日焰火》)
de
Diao Yinan (刁亦男),
Ours d’or de la Berlinale la même année.
Comparé à ces précurseurs, « Une pluie sans fin » se
distingue cependant par une réflexion sur l’histoire qui lui
donne toute sa profondeur, en allant au-delà de la seule
intrigue bien ficelée de film noir. Pour un premier film, il
est donc prometteur, bien qu’accusant quelques faiblesses
dans le scénario à la fin.
Une pluie sans fin, bande annonce
[1]
Titre français choisi par le distributeur, Wild
Bunch, pour sa sortie en France le 25 juillet 2018.
[2]
L’origine du genre est littéraire, et il a gardé le
lien avec la littérature : ainsi, le premier
classique du genre, « Le Faucon maltais » (The
Maltese Falcon) de John Huston, en 1941, est
adapté d’un roman policier de Dashiell Hammett, et,
aux débuts du néo-noir, en 1973, « Le Privé » (The
Long Goodbye) de Robert Altman, est adapté d’un
roman de Raymong Chandler. Ce lien avec la
littérature est d’ailleurs quelque part dans la
démarche de Dong Yue:
quand on lui demande ce qui l’a poussé à passer à la
réalisation, il dit que c’est le désir d’écrire
pour percer à jour la réalité.
Dans ces romans comme dans les films,
le personnage du détective est fondamental (Sam
Spade chez Hammett ou Philip Marlowe chez Chandler).
C’est le cas dans le film de Dong Yue, mais en
jouant habilement sur les codes du genre.
[3]
L’intrigue a des points communs :
elle est construite autour des personnages de deux
inspecteurs de police aux méthodes radicalement
opposées (l'un est de la campagne, l'autre de la
ville) mais qui s’allient pour piéger un dangereux
violeur et tueur en série.
Dans le même genre, on pourrait citer
aussi un autre film coréen récent : « The Chaser »,
premier film de Na Hong-jin, sorti en 2008, inspiré
de l’histoire vraie d’un tueur en série : ici, un
ancien détective devenu proxénète reprend du service
quand deux de ses filles disparaissent.
- Fig 11.1, p. 309 Amélioration du taux de rendement
du capital (1982-2008) : période de croissance
rapide 1992-2000, avec pic en 2000.
- Fig 11.2 p. 309 Part des entreprises d’Etat dans
la production, l’emploi et le capital de la totalité
de l’industrie (1978-2010), avec nombre d’employés
en chute libre à partir de 1997 (licenciements)