Réalisateur né en octobre 1963 à Nankin, Zhang Yuan
est l’un des pionniers de la sixième génération des
cinéastes chinois ; ses deux premiers longs métrages
sont considérés comme les films fondateurs de ce
qu’on a appelé
le cinéma indépendant chinois,
né aux lendemains des événements de Tian’anmen, au
début des années 1990.
Au lieu de produire ses films au sein du studio
auquel il avait été affecté à sa sortie de
l’Institut du cinéma de Pékin en 1989, il a décidé
de tourner ses films indépendamment, dans un style
semi-documentaire, et ce jusqu’en 1996 :
« East
Palace, West Palace » (《东宫西宫》)
marque alors un tournant dans sa filmographie.
Suivre le fil de ses réalisations donne l’impression
de feuilleter un livre sur près de trente ans
d’histoire du cinéma chinois, à commencer avec
« Mama » en 1990.
1. Mama : gloire fragile
Zhang Yuan
« Mama » (《妈妈》) a
démarré comme un projet du Children’s Film Studio ; Zhang
Yuan était encore étudiant chef opérateur à l’Institut du
cinéma de Pékin, mais il devait être le chef opérateur du
film. Le scénario était intitulé « L’arbre du soleil » (《太阳树》)
et Zhang Yuan a commencé à travailler sur le sujet avec la
scénariste du film, Qin Yan (秦燕), qui
devait être aussi l’actrice principale.
Mama
Mais, trois mois plus tard, le studio a décidé de
mettre fin au projet car il n’était pas considéré
comme suffisamment rentable. Il a été repris par le
studio de l’Armée, le Studio du 1er août,
avec un réalisateur différent, mais toujours Zhang
Yuan comme chef opérateur. Il fut envoyé faire des
repérages jusqu’à Dunhuang. Mais le projet tomba de
nouveau à l’eau, cette fois en raison des événements
de Tian’anmen, et ce en grande partie parce que le
scénario était adapté d’une nouvelle de Dai Qing (戴晴).
À l’origine ingénieur travaillant sur un système de
missiles pour l’Armée de libération, Dai Qing est
devenu écrivaine de l’armée puis, en 1982, reporter
pour le Guangming Daily (光明日报).
En 1989, elle s’est ouvertement opposée au projet du
Barrage des Trois-Gorges et a même écrit un livre
sur le sujet. Puis, au moment des manifestations sur
la place Tian’anmen, elle s’est jointe à d’autres
manifestants pour appeler le gouvernement à lutter
contre la corruption et
à
engager une réforme démocratique. Quand les étudiants ont
commencé leur grève de la faim, elle a prononcé un discours
pour les encourager à quitter la place afin d’éviter un bain
de sang. Mais elle n’a pas été écoutée. Elle a été arrêtée
le 14 juin et elle est restée en prison jusqu’en janvier
1990, puis en liberté surveillée jusqu’en mai.
Dans
ces conditions, le projet a bien sûr été remisé. Mais Zhang
Yuan s’était déjà trop investi dans sa préparation pour
abandonner. Le film est l’histoire d’une bibliothécaire
élevant un enfant handicapé à Pékin, sans l’aide de son mari
toujours absent. Zhang Yuan avait développé une profonde
empathie avec son sujet, allant jusqu’à interviewer des
mères d’enfants handicapés pour intégrer ensuite les
interviews dans le film et accroître le sentiment de
réalisme.
Il a
donc décidé de continuer. Il a révisé le scénario avec sa
femme, la scénariste Ning Dai (宁岱)
[la sœur de Ning
Ying (宁瀛)],
et avec
Wang Xiaoshuai (王小帅).
Puis il a tourné le film dans son appartement, en noir et
blanc pour l’essentiel, sur un budget de 100 000 yuans
financé par des fonds collectés auprès de sa famille et
d’amis, plus des dons de petites entreprises réunis dans
tout le pays grâce à une lettre de recommandation de
l’Association nationale des enfants handicapés.
En
Chine, à sa sortie en 1990, le film a été jugé beaucoup trop
sombre, trop « négatif », par les autorités : il a tout de
suite été interdit. En revanche, il a été remarqué dans les
divers festivals internationaux où il a été présenté et, en
1991, a même décroché le prix spécial du jury lors de la 13e
édition du festival des Trois Continents à Nantes
[1].
C’est lors de la remise de ce prix que le président du jury
a présenté Zhang Yuan comme « le premier réalisateur et
producteur chinois indépendant », à la plus grande surprise
de l’intéressé lui-même.
En
fait, ce n’était même pas totalement vrai. « Mama » a été
dûment déclaré et enregistré sous un numéro de licence du
studio de Xi’an - numéros qui étaient alors nécessaires
pour obtenir l’autorisation d’acheter de la pellicule. Des
quatre copies du film qui ont été faites, une a été achetée
par les autorités locales de Shenzhen, deux autres par les
autorités provinciales du Hubei et du Jiangsu, et la
dernière par la ville de Shanghai. On ne peut donc pas dire
au sens strict que c’était une production « indépendante ».
Ce qui n’est pas le cas du deuxième film de Zhang Yuan,
achevé en 1993: « Beijing Bastards »
2. Beijing Bastards : naissance du cinéma indépendant
Ne donnant aucune référence de numéro de licence ni
de studio, « Beijing Bastards » (《北京杂种》)
affiche dès le générique qu’il a été fait « hors
système ». Qui plus est, il aborde carrément des
sujets tabous : c’est un tableau très sombre de la
jeunesse de l’époque, interprété par des artistes et
musiciens de rock en mêlant subtilement réalité et
fiction pour brosser une allégorie de la situation
de la Chine post-Tian’anmen, le titre suggérant que
les jeunes se considéraient comme les bâtards du
régime. Zhang Yuan enfonçait le clou en faisant
interpréter le personnage principal par le musicien
de rock Cui Jian (崔健)
dont la musique avait accompagné les manifestations
sur la place Tian’anmen ; il avait même donné un
concert quinze jours avant la tragédie du 4 juin, et
sa chanson « je n’ai rien à moi » (yi wu suoyou
一无所有)
résonnait dans toutes les têtes. Sa musique était
devenue symbole même de rébellion.
Beijing Bastards,
l’affiche avec Cui Jian
Cui
Jian yi wu suoyou
一无所有
(nothing to my name)
Zhang
Yuan a cru bon de souligner que son film se terminait par un
message d’espoir : l’image d’un bébé en pleurs à la fin
symbolisant la renaissance à venir de Pékin et de sa
jeunesse. Il n’en reste pas moins, malgré tout, que
l’atmosphère générale du film est désolée, reflétant le
désespoir des jeunes après Tian’anmen, et qu’aucun studio
n’aurait pu produire un film pareil.
S’il
a pu voir le jour, c’est grâce au Fond Hubert Bals du
festival de Rotterdam et aux trois principales personnalités
qui lui ont apporté leur concours et l’on produit : Cui Jian
qui, outre l’interprétation du rôle principal, a écrit la
musique avec Dou Wei (窦唯)
et He Yong (何勇)
et coécrit le scénario avec le réalisateur et scénariste
Tang Danian (唐大年),
Christopher Doyle qui en a été le chef opérateur, signant
une superbe photographie, et le cinéaste hongkongais Shu Kei
(舒琪)
que Zhang Yuan avait rencontré au festival de Nantes. Malgré
tout, faute de fonds, la postproduction a été interrompue
jusqu’en 1992 et n’a pu être terminée que grâce à l’aide du
ministère français de la Culture, et en l’occurrence à Jack
Lang.
C’est
un film d’une esthétique un peu brouillonne, un film bâtard
lui aussi, mais qui vibre au rythme de la musique et qui
reste le témoin de la sous-culture d’une époque en faisant
partie de sa mémoire. Il a été présenté au festival de
Locarno, contre l’avis des autorités du cinéma, et, après
avoir menacé Marco Müller qui était alors le directeur du
festival, le gouvernement chinois, furieux, en a retiré le
film qu’il présentait lui-même. Mais les représailles contre
Zhang Yuan ont été plus sérieuses : il a été officiellement
condamné pour « pollution spirituelle » et mis sur liste
noire en avril 1994.
C’était une condamnation aux conséquences gravissimes : non
seulement il ne pouvait plus faire de films en Chine, mais
personne ne pouvait plus travailler avec lui et les studios
avaient interdiction de lui louer des caméras ou tout autre
matériel. Avec lui étaient interdits plusieurs autres
cinéastes, dont
Wang Xiaoshuai (王小帅),
la scénariste Ning Dai (宁岱),
et même
Tian Zhuangzhuang (田壮壮),
dont « Le Cerf-volant bleu » (《蓝风筝》)
présenté à Cannes en 1993 et lauréat du grand prix du
festival de Tokyo avait ulcéré les autorités du cinéma. En
même temps, le gouvernement chinois luttait contre le
développement de ce cinéma « indépendant » en faisant une
promotion accrue de blockbusters et de divertissements
inoffensifs. Cela n’a pas empêché les années 1994-1996
d’être l’âge d’or des films indépendants.
Beijing Bastards
3. Transition documentaire
Malgré son interdiction, Zhang Yuan n’a pas cessé de
tourner, mais il s’est tourné vers le documentaire car les
documentaires n’étaient pas soumis à la censure et
jouissaient d’une certaine liberté – mais avec des limites :
le pionnier de la nouvelle vague du documentaire
indépendant, Wu
Wengang (吴文光),
figurait parmi les cinéastes interdits en 1994. Pour
Zhang Yuan, cependant, c’était en outre un genre
parfaitement adapté aux sujets qu’il voulait traiter – après
tout, « Mama » et « Beijing Bastards » étaient déjà fortement
documentaires.
-
1994 : The Square
The Square
En 1994, il a ainsi tourné – en collaboration avec
Duan Jinchuan (段锦川)
- un documentaire qu’il avait en projet depuis
longtemps, … sur la place Tian’anmen, symboliquement
intitulé « The Square » (《广场》).
Il fallait oser. Le tournage fut camouflé en
programme produit pour la télévision centrale CCTV,
pour rendre compte de la vie quotidienne sur la
place. Mais le regard
dévie et s’intéresse plus à l’arrière-plan qu’au
sujet central que filme la caméra : pendant qu’elle nous
montre des enfants qui jouent paisiblement avec des
cerfs-volants et des personnes âgées qui se lancent des
frisbees, la police et l’armée sont omniprésentes par
derrière. Vers la fin du film, on voit des soldats de
l’Armée de libération aligner des canons pour un hommage à
un chef d’Etat en visite officielle. Lorsque les coups de
canon sont tirés, Zhang Yuan oriente sa caméra vers les
réactions et les visages des citoyens ordinaires présents
sur la place. Le documentaire, l’air de rien, souligne le
contrôle omniprésent exercé par le gouvernement pour
maintenir urbi et orbi la façade d’un pouvoir sans faille.
C’est un film muet, sans dialogues ni musique.
Malgré
l’interdiction du réalisateur, le film a été projeté au
festival de Hawaii où il a été couronné du prix du jury.
-
1996 : Sons
Aussitôt après « The Square », Zhang Yuan a réalisé
un film qui est une nouvelle étape dans
l’utilisation du documentaire au sein de la fiction,
annonçant un style de docu-fiction qui sera
développé entre autres par
Jia Zhangke.
Le sujet lui a été soufflé par l’un des acteurs
amateurs qui jouait dans « Beijing Bastards » et qui
habitait dans le même immeuble que Zhang Yuan : il
lui a tout simplement suggéré de faire un film sur
la vie de sa famille. Les parents étaient membres
d’une troupe de dance ; le père était alcoolique,
les deux fils étaient au chômage et passablement
alcooliques eux aussi. Zhang Yuan et Ning Dai sont
allés les interviewer longuement, puis leur a fait
rejouer des épisodes de l’histoire qu’ils leur
avaient racontée.
« Sons » (Erzi
《儿子》)
est ainsi une construction en miroir : une famille
met en scène et interprète sa vie telle qu’elle a
été vécue. La parole donnée aux protagonistes
Sons
leur
donnait en même temps la possibilité de s’exprimer en
témoins et acteurs de divers problèmes sociaux ordinairement
passés sous silence.
Zhang
Yuan tournera encore deux autres documentaires :
- un
court métrage en 1998 sur les propriétaires qui refusent de
quitter leur maison quand leur quartier est livré aux
bulldozers - le titre
dingzi hu
(《钉子户》)
étant le terme désignant les maisons isolées qui s’élèvent
comme des clous (dingzi ) au milieu d’un vaste champ
de ruines urbaines ;
- et « Crazy English » (《疯狂英语》)
présenté au festival de Locarno en 1999
parallèlement à son film de fiction « Seventeen
Years » (《过年回家》)
– un documentaire sur le créateur d’une méthode
d’anglais complètement folle, demandant des
récitations en public comme de grands meetings
nationalistes car cette conquête de l’anglais avait
pour but de rendre la nation chinoise plus forte.
Zhang Yuan a dépeint son film comme un mix du
« Triomphe de la volonté » de Leni Riefenstahl et du
« Forrest Gump » de Robert Zemeckis.
Etonnamment, « Crazy English » a marqué le retour
sur les écrans des films de Zhang Yuan, et son
retour à la légitimité et légalité : le film a été
produit en coopération avec le studio de Xi’an qui
figure au générique. Etonnamment, car c’était bien
peu de temps après le film qui avait causé de
nouvelles frictions avec le bureau du cinéma :
Crazy English, le DVD
« East
Palace, West Palace » (《东宫西宫》),
un film qui est à replacer dans le contexte de la recherche
de Zhang Yuan sur la vie des marginaux sociaux, depuis
« Mama ».
4. East Palace, West Palace : apogée d’une époque
« East
Palace, West Palace »est sans doute le film qui a le
plus contribué à la notoriété de Zhang Yuan : c’est le
premier film de Chine continentale à avoir traité
explicitement d’un sujet homosexuel. Le titre se réfère aux
deux parcs près de la Cité interdite, et plus spécifiquement
à leurs toilettes qui étaient connues pour être des lieux de
rencontres pour les homosexuels de Pékin la nuit.
East Palace West
Palace
Le scénario est du grand écrivain
Wang Xiaobo (王小波).
Il l’a adapté d’une nouvelle intitulée « Tendres
sentiments » (《似水柔情》),
écrite sur la base d’une étude sur les homosexuels
chinois réalisée avec son épouse Li Yinhe (李银河)
et publiée début 1992 à Hong Kong : « Leur monde –
perspectives sur la communauté des homosexuels en
Chine » (《他们的世界——中国男同性恋群落透视》).
Le film est un
huis-clos claustrophobique, de nuit, dans un
commissariat où se confrontent un jeune homosexuel
et le policier qui l’a arrêté la nuit dans le parc,
pour « hooliganisme »
[2],
et qui passe la nuit à l’interroger. C’est une
épreuve pour le jeune policier qui se sent peu à peu
attiré par le jeune garçon qui lui raconte sa vie et
cherche à le séduire. Refusant de céder à la
fascination qu’il ressent, il devient violent.
« East
Palace, West Palace »a été tourné au printemps de
1996 et a bénéficié d’une aide française de dernière
minute : coproduit par deux producteurs français, il été
envoyé en France en fraude pour la postproduction. Il est
sorti en première mondiale en novembre 1996 au festival de
Mal del Plata, en Argentine, puis a été présenté en mai 1997
au festival de Cannes dans la section Un Certain
Regard, mais sans Zhang Yuan, interdit de Croisette par
les autorités de Pékin qui lui avaient retiré son passeport.
Par mesure de rétorsion, Pékin a bloqué aux frontières la
copie de la comédie « Keep Cool » (《有话好好说》)
de
Zhang Yimou, qui devait concourir en
compétition officielle.
Une
version théâtrale a été créée au festival d’automne à Paris
en 1996, avec le même acteur, Hu Jun (胡军),
dans le rôle du policier.
C’est
l’apogée de la période « indépendante » de Zhang Yuan. Avec
« Crazy English », à partir de 1999, il rentre dans le rang
et retrouve le chemin des studios et des écrans.
5. D’un siècle à l’autre, d’un film à l’autre
De
1999 à 2008, de « Seventeen Years » à « Dada’s Dance », ce
sont six longs métrages sur dix ans, par un réalisateur qui
a peu à peu perdu son image de « mauvais garçon » et de
rebelle du cinéma.
- Sorti en 1999, « Seventeen Years » (《过年回家》)
est un film remarquablement interprété par Li
Bingbing (李冰冰)
dont c’étaient les débuts d’actrice. Elle interprète
le rôle d’une gardienne de prison qui se prend de
sympathie pour l’une de ses détenues, qui a
accidentellement tué sa belle-sœur pour une querelle
stupide. Au bout de 17 ans de prison, elle est
sélectionnée pour pouvoir rentrer passer les fêtes
du Nouvel An chez elle. Sa gardienne offre de
l’accompagner, mais quand elles arrivent, elles
voient que le quartier a été détruit et les parents
ont déménagé sans laisser d’adresse. Elles
entreprennent toutes les deux de les retrouver.
Inspiré d’un fait divers vu à la télévision, le
scénario a été coécrit avec les grands écrivains
Yu Hua (余华)
et
Zhu Wen (朱文).
Le film a valu à Zhang Yuan d’être primé à la
Biennale de Venise en septembre 1999.
Seventeen Years
Le début des années 2000 a ensuite été l’une des périodes
les plus productives pour Zhang Yuan. Il a d’abord réalisé
un court métrage documentaire sur la danseuse transsexuelle
Jin Xing, avec des séquences d’archives sur des interviews
données avant son intervention chirurgicale : Jin Xing
xiao jie (《金星小姐》).
Puis
Zhang Yuan
a tourné pas moins de trois films quasiment en même temps :
- « I Love You » (《我爱你》)
sorti en Chine en octobre 2002, adapté d’un roman du
« hooligan des lettres chinoises »,
Wang Shuo (王朔),
passablement assagi lui aussi. C’est la première
adaptation littéraire de Zhang Yuan, son premier
succès commercial aussi.
- « Jiang Jie » (《江姐》)
ou sœur Jiang, opéra moderne de 1964 adapté d’un
roman de 1961, et filmé par Zhang Yuan à
l’invitation du German World Art Festival dans le
Grand Théâtre de Cologne avec la grande chanteuse
d’opéra de Pékin Zhang Huoding (张火丁)
dans le rôle-titre.
- « Green Tea » (《绿茶》),
adapté d’un roman de Jin Renshun (金仁顺),
tourné pendant l’été 2002, avec pour chef opérateur
Christopher Doyle (qui venait de signer la
photographie de
« In
the Mood for Love »),
et avec
Green Tea
Zhao Wei (赵薇)
et
Jiang Wen (姜文)
dans les rôles principaux. Classé « comédie romantique »
mais bordant sur le fantastique, le film est sorti en août
2003 et reste un agréable divertissement qui vaut
essentiellement par sa photographie et son interprétation.
Trailer
Zhang Yuan a ensuite adapté un autre roman,
partiellement autobiographique, de Wang Shuo :
- « Little Red Flowers » (《看上去很美》)
est l’histoire d’un enfant de quatre ans placé par
ses parents dans un pensionnat où il a du mal à
s’adapter et se conformer aux règles, ratant
éternellement les « petites fleurs rouges » qui
récompensent les enfants sages et disciplinés. On
sent le réalisateur en symbiose avec son sujet, avec
un regard un rien nostalgique d’ancien enfant
terrible sur l’enfance qu’il a vécue, comme Wang
Shuo.
Coproduction sino-italienne (produit entre autres
par Marco Müller), le film est sorti au festival de
Berlin en février 2006, puis en Chine en mars et en
France en décembre.
Zhang Yuan a terminé la décennie avec un film sorti
en 2008 qui n’a pas la qualité des précédents. C’est
un léger trou
Little Red Flowers
d’air dans une filmographie menée tambour battant. Il faut
attendre 2013 pour voir Zhang Yuan repartir en campagne avec
un véritable retour aux sources.
2012 : retour aux sources
Beijing Flickers
Avec « Beijing Flickers » (《有种》),
Zhang Yuan revient, vingt ans plus tard, à la veine
de « Beijing Bastards » dont le nouveau film est
quasiment une actualisation, indiquée dans le titre
chinois : on est passé de zazhong
杂种
à youzhong
有种
, vingt ans plus tard la Chine est encore pleine de
jeunes marginaux qui ressemblent à leurs aînés.
Signes des temps, la musique
pop a remplacé le rock et la
chanteuse est trans, il manque cependant Cui Jian pour
électriser l’atmosphère. Elle est plus sombre que jamais,
mais avec élégance. « Beijing Flickers », c’est une culture
esthétisante du désespoir.
Zhang Yuan est passé lui-même derrière la caméra et s’est
entouré d’un trio de nouveaux scénaristes. Le film est sorti
au festival de Toronto en septembre 2012 avant de faire le
tour des festivals, dont ceux de Venise et de Busan en
octobre.
Beijing Flickers, trailer
Zhang Yuan est ensuite revenu vers le style « comédie
romantique » dans l’air du temps dans les années 2010, avec
« Boss, I Love You » (《老板,
我爱你》)
en 2014.
Mais on a perdu Zhang Yuan quelque part dans les méandres de
l’histoire du cinéma…
2006 :
Little Red Flowers
(Kan shang qu hen mei
《看上去很美》)
2008 : Dada's Dance (Dádá
《达达》)
2012 : Beijing Flickers (
Yǒu Zhǒng
《有种》)
2014 : Boss, I Love You
《老板,
我爱你》
Documentaires
1994 : The
Square (Guang Chang
《广场》)
1998 : Demolition and Relocation, court métrage (dingzi
hu
《钉子户》)
1999 : Crazy
English (Fengkuang yingyu
《疯狂英语》)
2000 : Miss Jin Xing,
court métrage
《金星小姐》
Bibliographie
- Speaking in Images, Interviews with Contemporary Chinese
Filmmakers, Michael Berry, Columbia University Press, 2005.
Part I : Voices from China, Zhang Yuan: Working up a
Sweat In a CelluloidSauna pp. 142-161.
- The Urban Generation, Chinese Cinema and Society at the
Turn of the 21st > Century, Zhang Zhen ed, Duke
University Press, 2007.
III. The Production of Desire and Identities, Zhang
Yuan’s Imaginary Cities and the Theatricalization of the
Chinese “Bastards”, by Berenice Reynaud, pp. 264-294.
[1]Edition
très riche qui – pour replacer le film de Zhang Yuan
dans le contexte - comportait par ailleurs en
compétition, côté chinois, « Poussières dans le
vent » de
Hou Hsiao-hsien,« Une
belle journée d’été »
d’Edward
Yanget
« Rouge » de
Stanley Kwan.
[2]
L’homosexualité a été officiellement
dépénalisée en Chine en 1997 ; elle a cessé d’être
considérée comme une maladie mentale, à traiter
comme telle, en 2001.