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Zhang Yuan 张元

Présentation

par Brigitte Duzan, 17 septembre 2021

 

Réalisateur né en octobre 1963 à Nankin, Zhang Yuan est l’un des pionniers de la sixième génération des cinéastes chinois ; ses deux premiers longs métrages sont considérés comme les films fondateurs de ce qu’on a appelé le cinéma indépendant chinois, né aux lendemains des événements de Tian’anmen, au début des années 1990.

 

Au lieu de produire ses films au sein du studio auquel il avait été affecté à sa sortie de l’Institut du cinéma de Pékin en 1989, il a décidé de tourner ses films indépendamment, dans un style semi-documentaire, et ce jusqu’en 1996 : « East Palace, West Palace » (《东宫西宫》) marque alors un tournant dans sa filmographie. Suivre le fil de ses réalisations donne l’impression de feuilleter un livre sur près de trente ans d’histoire du cinéma chinois, à commencer avec « Mama » en 1990.

 

1. Mama : gloire fragile

 

Zhang Yuan

 

« Mama » (《妈妈》) a démarré comme un projet du Children’s Film Studio ; Zhang Yuan était encore étudiant chef opérateur à l’Institut du cinéma de Pékin, mais il devait être le chef opérateur du film. Le scénario était intitulé « L’arbre du soleil » (《太阳树》) et Zhang Yuan a commencé à travailler sur le sujet avec la scénariste du film, Qin Yan (秦燕), qui devait être aussi l’actrice principale.

 

Mama

 

Mais, trois mois plus tard, le studio a décidé de mettre fin au projet car il n’était pas considéré comme suffisamment rentable. Il a été repris par le studio de l’Armée, le Studio du 1er août, avec un réalisateur différent, mais toujours Zhang Yuan comme chef opérateur. Il fut envoyé faire des repérages jusqu’à Dunhuang. Mais le projet tomba de nouveau à l’eau, cette fois en raison des événements de Tian’anmen, et ce en grande partie parce que le scénario était adapté d’une nouvelle de Dai Qing (戴晴).

 

À l’origine ingénieur travaillant sur un système de missiles pour l’Armée de libération, Dai Qing est devenu écrivaine de l’armée puis, en 1982, reporter pour le Guangming Daily (光明日报). En 1989, elle s’est ouvertement opposée au projet du Barrage des Trois-Gorges et a même écrit un livre sur le sujet. Puis, au moment des manifestations sur la place Tian’anmen, elle s’est jointe à d’autres manifestants pour appeler le gouvernement à lutter contre la corruption et

à engager une réforme démocratique. Quand les étudiants ont commencé leur grève de la faim, elle a prononcé un discours pour les encourager à quitter la place afin d’éviter un bain de sang. Mais elle n’a pas été écoutée. Elle a été arrêtée le 14 juin et elle est restée en prison jusqu’en janvier 1990, puis en liberté surveillée jusqu’en mai. 

 

Dans ces conditions, le projet a bien sûr été remisé. Mais Zhang Yuan s’était déjà trop investi dans sa préparation pour abandonner. Le film est l’histoire d’une bibliothécaire élevant un enfant handicapé à Pékin, sans l’aide de son mari toujours absent. Zhang Yuan avait développé une profonde empathie avec son sujet, allant jusqu’à interviewer des mères d’enfants handicapés pour intégrer ensuite les interviews dans le film et accroître le sentiment de réalisme.

 

Il a donc décidé de continuer. Il a révisé le scénario avec sa femme, la scénariste Ning Dai (宁岱) [la sœur de Ning Ying (宁瀛)], et avec Wang Xiaoshuai (王小帅). Puis il a tourné le film dans son appartement, en noir et blanc pour l’essentiel, sur un budget de 100 000 yuans financé par des fonds collectés auprès de sa famille et d’amis, plus des dons de petites entreprises réunis dans tout le pays grâce à une lettre de recommandation de l’Association nationale des enfants handicapés.

 

En Chine, à sa sortie en 1990, le film a été jugé beaucoup trop sombre, trop « négatif », par les autorités : il a tout de suite été interdit. En revanche, il a été remarqué dans les divers festivals internationaux où il a été présenté et, en 1991, a même décroché le prix spécial du jury lors de la 13e édition du festival des Trois Continents à Nantes [1]. C’est lors de la remise de ce prix que le président du jury a présenté Zhang Yuan comme « le premier réalisateur et producteur chinois indépendant », à la plus grande surprise de l’intéressé lui-même.

 

En fait, ce n’était même pas totalement vrai. « Mama » a été dûment déclaré et enregistré sous un numéro de licence du studio de Xi’an -  numéros qui étaient alors nécessaires pour obtenir l’autorisation d’acheter de la pellicule.  Des quatre copies du film qui ont été faites, une a été achetée par les autorités locales de Shenzhen, deux autres par les autorités provinciales du Hubei et du Jiangsu, et la dernière par la ville de Shanghai. On ne peut donc pas dire au sens strict que c’était une production « indépendante ». Ce qui n’est pas le cas du deuxième film de Zhang Yuan, achevé en 1993: « Beijing Bastards »

 

2. Beijing Bastards : naissance du cinéma indépendant

 

Ne donnant aucune référence de numéro de licence ni de studio, « Beijing Bastards » (《北京杂种》) affiche dès le générique qu’il a été fait « hors système ». Qui plus est, il aborde carrément des sujets tabous : c’est un tableau très sombre de la jeunesse de l’époque, interprété par des artistes et musiciens de rock en mêlant subtilement réalité et fiction pour brosser une allégorie de la situation de la Chine post-Tian’anmen, le titre suggérant que les jeunes se considéraient comme les bâtards du régime. Zhang Yuan enfonçait le clou en faisant interpréter le personnage principal par le musicien de rock Cui Jian (崔健) dont la musique avait accompagné les manifestations sur la place Tian’anmen ; il avait même donné un concert quinze jours avant la tragédie du 4 juin, et sa chanson « je n’ai rien à moi » (yi wu suoyou 一无所有) résonnait dans toutes les têtes. Sa musique était devenue symbole même de rébellion.

 

Beijing Bastards, l’affiche avec Cui Jian

 

Cui Jian  yi wu suoyou 一无所有 (nothing to my name)

 

Zhang Yuan a cru bon de souligner que son film se terminait par un message d’espoir : l’image d’un bébé en pleurs à la fin symbolisant la renaissance à venir de Pékin et de sa jeunesse. Il n’en reste pas moins, malgré tout, que l’atmosphère générale du film est désolée, reflétant le désespoir des jeunes après Tian’anmen, et qu’aucun studio n’aurait pu produire un film pareil.

 

S’il a pu voir le jour, c’est grâce au Fond Hubert Bals du festival de Rotterdam et aux trois principales personnalités qui lui ont apporté leur concours et l’on produit : Cui Jian qui, outre l’interprétation du rôle principal, a écrit la musique avec Dou Wei (窦唯) et He Yong (何勇) et coécrit le scénario avec le réalisateur et scénariste Tang Danian (唐大年), Christopher Doyle qui en a été le chef opérateur, signant une superbe photographie, et le cinéaste hongkongais Shu Kei (舒琪) que Zhang Yuan avait rencontré au festival de Nantes. Malgré tout, faute de fonds, la postproduction a été interrompue jusqu’en 1992 et n’a pu être terminée que grâce à l’aide du ministère français de la Culture, et en l’occurrence à Jack Lang.

 

C’est un film d’une esthétique un peu brouillonne, un film bâtard lui aussi, mais qui vibre au rythme de la musique et qui reste le témoin de la sous-culture d’une époque en faisant partie de sa mémoire. Il a été présenté au festival de Locarno, contre l’avis des autorités du cinéma, et, après avoir menacé Marco Müller qui était alors le directeur du festival, le gouvernement chinois, furieux, en a retiré le film qu’il présentait lui-même. Mais les représailles contre Zhang Yuan ont été plus sérieuses : il a été officiellement condamné pour « pollution spirituelle » et mis sur liste noire en avril 1994.

 

C’était une condamnation aux conséquences gravissimes : non seulement il ne pouvait plus faire de films en Chine, mais personne ne pouvait plus travailler avec lui et les studios avaient interdiction de lui louer des caméras ou tout autre matériel. Avec lui étaient interdits plusieurs autres cinéastes, dont Wang Xiaoshuai (王小帅), la scénariste Ning Dai (宁岱), et même Tian Zhuangzhuang (田壮壮), dont « Le Cerf-volant bleu » (《蓝风筝》) présenté à Cannes en 1993 et lauréat du grand prix du festival de Tokyo avait ulcéré les autorités du cinéma. En même temps, le gouvernement chinois luttait contre le développement de ce cinéma « indépendant » en faisant une promotion accrue de blockbusters et de divertissements inoffensifs. Cela n’a pas empêché les années 1994-1996 d’être l’âge d’or des films indépendants.

 

Beijing Bastards

 

3. Transition documentaire

 

Malgré son interdiction, Zhang Yuan n’a pas cessé de tourner, mais il s’est tourné vers le documentaire car les documentaires n’étaient pas soumis à la censure et jouissaient d’une certaine liberté – mais avec des limites : le pionnier de la nouvelle vague du documentaire indépendant, Wu Wengang (吴文光), figurait parmi les cinéastes interdits en 1994. Pour Zhang Yuan, cependant, c’était en outre un genre parfaitement adapté aux sujets qu’il voulait traiter – après tout, « Mama » et « Beijing Bastards » étaient déjà fortement documentaires.

 

- 1994 : The Square

 

The Square

 

En 1994, il a ainsi tourné – en collaboration avec Duan Jinchuan (段锦川) -  un documentaire qu’il avait en projet depuis longtemps, … sur la place Tian’anmen, symboliquement intitulé « The Square » (《广场》). Il fallait oser. Le tournage fut camouflé en programme produit pour la télévision centrale CCTV, pour rendre compte de la vie quotidienne sur la place. Mais le regard 

dévie et s’intéresse plus à l’arrière-plan qu’au sujet central que filme la caméra : pendant qu’elle nous montre des enfants qui jouent paisiblement avec des cerfs-volants et des personnes âgées qui se lancent des frisbees, la police et l’armée sont omniprésentes par derrière. Vers la fin du film, on voit des soldats de l’Armée de libération aligner des canons pour un hommage à un chef d’Etat en visite officielle. Lorsque les coups de canon sont tirés, Zhang Yuan oriente sa caméra vers les réactions et les visages des citoyens ordinaires présents sur la place. Le documentaire, l’air de rien, souligne le contrôle omniprésent exercé par le gouvernement pour maintenir urbi et orbi la façade d’un pouvoir sans faille. C’est un film muet, sans dialogues ni musique. 

Malgré l’interdiction du réalisateur, le film a été projeté au festival de Hawaii où il a été couronné du prix du jury.

 

- 1996 : Sons

 

Aussitôt après « The Square », Zhang Yuan a réalisé un film qui est une nouvelle étape dans l’utilisation du documentaire au sein de la fiction, annonçant un style de docu-fiction qui sera développé entre autres par Jia Zhangke. Le sujet lui a été soufflé par l’un des acteurs amateurs qui jouait dans « Beijing Bastards » et qui habitait dans le même immeuble que Zhang Yuan : il lui a tout simplement suggéré de faire un film sur la vie de sa famille. Les parents étaient membres d’une troupe de dance ; le père était alcoolique, les deux fils étaient au chômage et passablement alcooliques eux aussi. Zhang Yuan et Ning Dai sont allés les interviewer longuement, puis leur a fait rejouer des épisodes de l’histoire qu’ils leur avaient racontée.

 

« Sons » (Erzi 儿子) est ainsi une construction en miroir : une famille met en scène et interprète sa vie telle qu’elle a été vécue. La parole donnée aux protagonistes

 

Sons

leur donnait en même temps la possibilité de s’exprimer en témoins et acteurs de divers problèmes sociaux ordinairement passés sous silence.  

 

Zhang Yuan tournera encore deux autres documentaires :

- un court métrage en 1998 sur les propriétaires qui refusent de quitter leur maison quand leur quartier est livré aux bulldozers - le titre dingzi hu (《钉子户》) étant le terme désignant les maisons isolées qui s’élèvent comme des clous (dingzi ) au milieu d’un vaste champ de ruines urbaines ;

 

- et « Crazy English » (《疯狂英语》) présenté au festival de Locarno en 1999  parallèlement à son film de fiction « Seventeen Years » (《过年回家》) – un documentaire sur le créateur d’une méthode d’anglais complètement folle, demandant des récitations en public comme de grands meetings nationalistes car cette conquête de l’anglais avait pour but de rendre la nation chinoise plus forte. Zhang Yuan a dépeint son film comme un mix du « Triomphe de la volonté » de Leni Riefenstahl et du « Forrest Gump » de Robert Zemeckis.

 

Etonnamment, « Crazy English » a marqué le retour sur les écrans des films de Zhang Yuan, et son retour à la légitimité et légalité : le film a été produit en coopération avec le studio de Xi’an qui figure au générique. Etonnamment, car c’était bien peu de temps après le film qui avait causé de nouvelles frictions avec le bureau du cinéma :

 

Crazy English, le DVD

« East Palace, West Palace » (《东宫西宫》), un film qui est à replacer dans le contexte de la recherche de Zhang Yuan sur la vie des marginaux sociaux, depuis « Mama ». 

 

4. East Palace, West Palace : apogée d’une époque

 

« East Palace, West Palace » est sans doute le film qui a le plus contribué à la notoriété de Zhang Yuan : c’est le premier film de Chine continentale à avoir traité explicitement d’un sujet homosexuel. Le titre se réfère aux deux parcs près de la Cité interdite, et plus spécifiquement à leurs toilettes qui étaient connues pour être des lieux de rencontres pour les homosexuels de Pékin la nuit.

 

East Palace West Palace

 

Le scénario est du grand écrivain Wang Xiaobo (王小波). Il l’a adapté d’une nouvelle intitulée « Tendres sentiments » (《似水柔情》), écrite sur la base d’une étude sur les homosexuels chinois réalisée avec son épouse Li Yinhe (李银河) et publiée début 1992 à Hong Kong : « Leur monde – perspectives sur la communauté des homosexuels en Chine » (《他们的世界——中国男同性恋群落透视》). 

 

Le film est un huis-clos claustrophobique, de nuit, dans un commissariat où se confrontent un jeune homosexuel et le policier qui l’a arrêté la nuit dans le parc, pour « hooliganisme » [2], et qui passe la nuit à l’interroger. C’est une épreuve pour le jeune policier qui se sent peu à peu attiré par le jeune garçon qui lui raconte sa vie et cherche à le séduire. Refusant de céder à la fascination qu’il ressent, il devient violent.

  

« East Palace, West Palace » a été tourné au printemps de 1996 et a bénéficié d’une aide française de dernière minute : coproduit par deux producteurs français, il été envoyé en France en fraude pour la postproduction. Il est sorti en première mondiale en novembre 1996 au festival de Mal del Plata, en Argentine, puis a été présenté en mai 1997 au festival de Cannes dans la section Un Certain Regard, mais sans Zhang Yuan, interdit de Croisette par les autorités de Pékin qui lui avaient retiré son passeport. Par mesure de rétorsion, Pékin a bloqué aux frontières la copie de la comédie « Keep Cool » (《有话好好说》) de Zhang Yimou, qui devait concourir en compétition officielle.

 

Une version théâtrale a été créée au festival d’automne à Paris en 1996, avec le même acteur, Hu Jun (胡军), dans le rôle du policier.

 

C’est l’apogée de la période « indépendante » de Zhang Yuan. Avec « Crazy English », à partir de 1999, il rentre dans le rang et retrouve le chemin des studios et des écrans.

 

5. D’un siècle à l’autre, d’un film à l’autre

 

De 1999 à 2008, de « Seventeen Years » à « Dada’s Dance », ce sont six longs métrages sur dix ans, par un réalisateur qui a peu à peu perdu son image de « mauvais garçon » et de rebelle du cinéma.

 

- Sorti en 1999, « Seventeen Years » (《过年回家》) est un film remarquablement interprété par Li Bingbing (李冰冰) dont c’étaient les débuts d’actrice. Elle interprète le rôle d’une gardienne de prison qui se prend de sympathie pour l’une de ses détenues, qui a accidentellement tué sa belle-sœur pour une querelle stupide. Au bout de 17 ans de prison, elle est sélectionnée pour pouvoir rentrer passer les fêtes du Nouvel An chez elle. Sa gardienne offre de l’accompagner, mais quand elles arrivent, elles voient que le quartier a été détruit et les parents ont déménagé sans laisser d’adresse. Elles entreprennent toutes les deux de les retrouver.

 

Inspiré d’un fait divers vu à la télévision, le scénario a été coécrit avec les grands écrivains Yu Hua (余华) et Zhu Wen (朱文). Le film a valu à Zhang Yuan d’être primé à la Biennale de Venise en septembre 1999.

 

Seventeen Years

 

Le début des années 2000 a ensuite été l’une des périodes les plus productives pour Zhang Yuan. Il a d’abord réalisé un court métrage documentaire sur la danseuse transsexuelle Jin Xing, avec des séquences d’archives sur des interviews données avant son intervention chirurgicale : Jin Xing xiao jie (金星小姐).

 

Jin Xing xiao jie (sous-titres chinois, 30’43) : https://www.bilibili.com/s/video/BV12s411q7dD

 

Puis Zhang Yuan a tourné pas moins de trois films quasiment en même temps :

 

- « I Love You » (《我爱你》) sorti en Chine en octobre 2002, adapté d’un roman du « hooligan des lettres chinoises », Wang Shuo (王朔), passablement assagi lui aussi. C’est la première adaptation littéraire de Zhang Yuan, son premier succès commercial aussi.

 

-  « Jiang Jie » (《江姐》) ou sœur Jiang, opéra moderne de 1964 adapté d’un roman de 1961, et filmé par Zhang Yuan à l’invitation du German World Art Festival dans le Grand Théâtre de Cologne avec la grande chanteuse d’opéra de Pékin Zhang Huoding (张火丁) dans le rôle-titre.

 

- « Green Tea » (《绿茶》), adapté d’un roman de Jin Renshun (金仁顺), tourné pendant l’été 2002, avec pour chef opérateur Christopher Doyle (qui venait de signer la photographie de « In the Mood for Love »), et avec

 

Green Tea

Zhao Wei (赵薇) et Jiang Wen (姜文) dans les rôles principaux. Classé « comédie romantique » mais bordant sur le fantastique, le film est sorti en août 2003 et reste un agréable divertissement qui vaut essentiellement par sa photographie et son interprétation.

 

Trailer

 

Zhang Yuan a ensuite adapté un autre roman, partiellement autobiographique, de Wang Shuo :

- « Little Red Flowers » (《看上去很美》) est l’histoire d’un enfant de quatre ans placé par ses parents dans un pensionnat où il a du mal à s’adapter et se conformer aux règles, ratant éternellement les « petites fleurs rouges » qui récompensent les enfants sages et disciplinés. On sent le réalisateur en symbiose avec son sujet, avec un regard un rien nostalgique d’ancien enfant terrible sur l’enfance qu’il a vécue, comme Wang Shuo.

 

Coproduction sino-italienne (produit entre autres par Marco Müller), le film est sorti au festival de Berlin en février 2006, puis en Chine en mars et en France en décembre.

 

Zhang Yuan a terminé la décennie avec un film sorti en 2008 qui n’a pas la qualité des précédents. C’est un léger trou

 

Little Red Flowers

d’air dans une filmographie menée tambour battant. Il faut attendre 2013 pour voir Zhang Yuan repartir en campagne avec un véritable retour aux sources. 

 

2012 : retour aux sources

 

Beijing Flickers

 

Avec « Beijing Flickers » (《有种》), Zhang Yuan revient, vingt ans plus tard, à la veine de « Beijing Bastards » dont le nouveau film est quasiment une actualisation, indiquée dans le titre chinois : on est passé de zazhong 杂种 à youzhong 有种 , vingt ans plus tard la Chine est encore pleine de jeunes marginaux qui ressemblent à leurs aînés. Signes des temps, la musique

pop a remplacé le rock et la chanteuse est trans, il manque cependant Cui Jian pour électriser l’atmosphère. Elle est plus sombre que jamais, mais avec élégance. « Beijing Flickers », c’est une culture esthétisante du désespoir. 

 

Zhang Yuan est passé lui-même derrière la caméra et s’est entouré d’un trio de nouveaux scénaristes. Le film est sorti au festival de Toronto en septembre 2012 avant de faire le tour des festivals, dont ceux de Venise et de Busan en octobre.

 

Beijing Flickers, trailer

 

Zhang Yuan est ensuite revenu vers le style « comédie romantique » dans l’air du temps dans les années 2010, avec « Boss, I Love You » (老板, 我爱你) en 2014. Mais on a perdu Zhang Yuan quelque part dans les méandres de l’histoire du cinéma…

 


 

Filmographie

 

Longs métrages

1990 : Mama (Mama 《妈妈》)

1993 : Beijing Bastards (Beijing zazhong 《北京杂种》)

1996 : Sons (Erzi 儿子)

1996 : East Palace, West Palace  (Dong gong xi gong 《东宫西宫》)

1999 : 17 Years (Guonian huijia 《过年回家》)

2002 : I Love You (Wo ai ni 《我爱你》)

2003 : Jiang Jie, film d’opéra (《江姐》)

2003 : Green Tea (Lü cha 《绿茶》)

2006 : Little Red Flowers  (Kan shang qu hen mei 《看上去很美》)

2008 : Dada's Dance ( Dádá 达达)

2012 : Beijing Flickers ( Yǒu Zhǒng 《有种》)

2014 : Boss, I Love You 老板, 我爱你

 

Documentaires

1994 : The Square (Guang Chang 《广场》)

1998 : Demolition and Relocation, court métrage (dingzi hu 《钉子户》)

1999 : Crazy English (Fengkuang yingyu 《疯狂英语》)

2000 : Miss Jin Xing, court métrage 金星小姐

 


 

Bibliographie

 

- Speaking in Images, Interviews with Contemporary Chinese Filmmakers, Michael Berry, Columbia University Press, 2005.

 Part I : Voices from China, Zhang Yuan: Working up a Sweat In a Celluloid Sauna pp. 142-161.

 

- The Urban Generation, Chinese Cinema and Society at the Turn of the 21st > Century, Zhang Zhen ed, Duke University Press, 2007.

III. The Production of Desire and Identities, Zhang Yuan’s Imaginary Cities and the Theatricalization of the Chinese “Bastards”, by Berenice Reynaud, pp. 264-294.

 


 


[1] Edition très riche qui – pour replacer le film de Zhang Yuan dans le contexte - comportait par ailleurs en compétition, côté chinois, « Poussières dans le vent » de Hou Hsiao-hsien, « Une belle journée d’été » d’Edward Yang et « Rouge » de Stanley Kwan.

[2] L’homosexualité a été officiellement dépénalisée en Chine en 1997 ; elle a cessé d’être considérée comme une maladie mentale, à traiter comme telle, en 2001.

 

 

 

     

 

 

 

 
     
     
     
     
     
     
     
     

 

   

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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